Le jour où j’ai posté mes cheveux

Le jour où j’ai posté mes cheveux
Ces cheveux serviront sans doute à la conception d'une perruque. (Photo : Josyane Cloutier)

LA GRANO DU BUREAU. Je n’aurais jamais songé envoyer mes cheveux par la poste en Ontario. C’est pourtant ce que j’ai fait il y a quelques semaines, lorsque j’ai réalisé un don de cheveux.

Je ne sais pas si je suis la seule à qui l’idée d’envoyer une partie de mon corps par Postes Canada donne un drôle de sentiment… (Ceux qui me connaissent savent que j’ai tendance à sur-analyser beaucoup de choses, c’est peut-être l’explication à ce questionnement.)

Quoiqu’il en soit, drôle de sentiment ou pas, j’ai fait un deuxième don de cheveux à la Société canadienne du cancer, afin qu’on puisse en utiliser pour des perruques destinées aux femmes qui perdent les leurs pendant la chimiothérapie.

C’est relativement simple : les cheveux doivent être propres et sans trace de teinture, et la longueur doit atteindre minimum 8 pouces, ce qui équivaut environ à 20 cm. Ma chère coiffeuse a donc fait une queue de cheval sur ma nuque et, d’un coup de ciseau, a coupé mes longs cheveux juste au-dessus de l’élastique. Je vous laisse imaginer le genre de coupe que cela donne… Elle a donc dû enlever un autre 2 cm afin d’égaliser le tout et faire quelque chose qui a un peu de bon sens avec ce qu’il me restait sur la tête.

Résultat : je suis passée d’une crinière qui m’arrivait dans le milieu du dos à une petite coupe aux épaules qui me donne l’air d’avoir environ huit ans.

Toutes les informations nécessaires, y compris la fameuse adresse ontarienne à inscrire au dos de l’enveloppe, se trouvent sur le site de la Société canadienne du cancer.

Je tiens à préciser que je n’ai pas écrit ce texte dans le but de mettre en valeur une bonne action que j’ai réalisée dans ma vie. Simplement, je me suis rendu compte que ce n’est pas quelque chose qui est très connu. J’ai une tribune et j’en profite pour, peut-être, un jour, inciter quelqu’un à faire la même chose. Je comprends également que ce n’est pas tout le monde qui est aussi indifférent que moi par rapport à la longueur de ses cheveux, et c’est correct. Il y a mille façons de donner, et toutes sont bonnes.

La raison derrière tout ça

Je dois cependant vous avouer quelque chose : l’idée de donner mes cheveux ne m’est pas venue spontanément.
Il y a quelques années, une de mes tantes, de qui je suis très proche, a reçu un diagnostic de cancer.
On n’est jamais préparé à ce genre d’annonce. C’est comme un coup de brique dans le front, comme un plafond qui cède.

Ma première pensée, allez savoir pourquoi, a été pour Astérix le gaulois, qui n’avait peur que d’une chose : que le ciel lui tombe sur la tête. Je me suis dit ça y est, le ciel s’est effondré sur la mienne…

Je me souviens d’une intense impuissance. Je n’ai pas de pouvoirs magiques, aucune connaissance médicale et, à seize ans, je n’avais pas les moyens d’envoyer ma tante dans les cliniques les plus réputées du monde. Restait donc les chaises saumon et les murs fades du département d’oncologie de l’hôpital Sainte-Croix, et les dîners rapides avec elle lors de ses rendez-vous, entre deux de mes cours à l’école secondaire.

Je me suis promis que, si je trouvais une façon de redonner à ces femmes courageuses qui doivent vivre avec un tel diagnostic, je le ferais autant que possible. À l’époque, je ne savais pas que les dons de cheveux pouvaient être faits sans les raser complètement. Ce n’est que quelques années plus tard que j’ai fait mon premier don en pensant à ces foulards colorés que ma proche nouait avec dextérité autour de sa tête.

Aujourd’hui, ma tante est guérie. Mais quand je confie mes cheveux à Postes Canada et à la Société canadienne du cancer, je pense à elle.

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