De Saint-Bonaventure à Las Vegas

De Saint-Bonaventure à Las Vegas
France La Bonté

QUE SONT-ILS DEVENUS. Il y a de ces personnes qui laissent leurs traces. France La Bonté est l’une d’elles. Née «dans le 2 de Saint-Bonne» comme elle se plaît à dire, l’artiste multidisciplinaire est de retour à Drummondville après une carrière bien remplie sur la scène mondiale avec le Cirque du Soleil.

Personne ne reste indifférent devant cette femme. Au premier regard, elle impressionne. Même dans le silence, elle communique. Elle n’a pas besoin d’ouvrir la bouche pour montrer qu’elle est là, son physique suffit. Tout passe par son expression corporelle.

Ce n’est pas pour rien que le Cirque du Soleil l’a engagée comme clown dans un spectacle présenté au début des années 1990.

«Je ne travaillais pas; j’étais en dépression et il n’y avait rien pour moi. J’étais dans un café avec un ami qui m’a présenté Franco Dragone (metteur en scène pour le Cirque du Soleil). Ça ne m’intéressait même pas, mais en jasant, j’ai fini par accepter. Le pire, je ne connaissais rien au cirque!», a raconté Mme La Bonté. Deux jours plus tard, elle a été invitée à aller porter son curriculum vitae au siège social du cirque, mais, à sa grande surprise, un contrat l’attendait.

«J’étais complètement surprise. Je m’attendais à être assistante, mais on m’offrait le rôle de maître de piste, une première pour une femme au Cirque du Soleil. J’ai eu une bonne réflexion. J’en ai discuté avec des amis et ils m’ont tous dit que c’était une bonne idée», s’est rappelée Mme La Bonté. Son expérience comme comédienne au Théâtre du chiendent à la fin des années 1970 et son rôle de conteuse de légendes dans les débuts du Village québécois d’antan lui ont donné des outils pour mieux camper son nouveau personnage de clown. De plus, elle enseignait les arts dramatiques à l’école Jeanne-Mance.

À partir de ce moment, une tournée nord-américaine de deux ans offre un spectacle d’improvisation sans scénario, appelé Nouvelle expérience, duquel seulement les meilleurs moments sont conservés.

Pendant deux ans à Las Vegas, on pouvait apercevoir le facies clownesque de France la Bonté sur les panneaux près des autoroutes, sur les publicités des taxis et dans les abribus.

Par la suite, un séjour de deux ans en Allemagne lui a permis d’apprendre la langue pendant qu’elle foulait le sol en tant qu’assistante-chef cuisinière dans le cadre de soupers cabarets spectacles.

«C’était un rôle très physique. Il y avait une partie de ma prestation où je devais simuler un orgasme (oui, elle me l’a fait en entrevue!) alors que je décrivais le goût d’une soupe…», a expliqué et gesticulé la Bonaventuraine.

Vers 1995, un producteur la remarque et lui fait une offre pour jouer dans une nouvelle production qui l’obligea à faire ses bagages pour Seattle et San Francisco, aux États-Unis. Son fort accent anglophone lui permet de monter sur les planches pendant cinq ans. Par amour, elle quitte le cirque pour revenir au Québec, mais plus personne ici ne la remarque, c’est le calme plat.

«Le retour a été difficile. Très difficile, mais j’ai eu la chance de monter un programme d’art dramatique à Victoriaville pour les cours aux adultes. Je suis tellement fière de cette réalisation, car les gens découvrent leur potentiel et ils se réalisent à travers des situations, des choses qu’ils n’auraient jamais pu vivre autrement. Ça leur permettait aussi de donner un spectacle à la fin de l’année», a raconté Mme La Bonté. Malheureusement, le programme a été abandonné après 12 ans.

Par la suite, elle a tenté d’ouvrir une école de théâtre. «Je suis une piètre gestionnaire et ç’a été un échec total. J’ai eu des idées noires, j’ai perdu confiance en moi et j’ai fait une profonde dépression, mais j’ai des amies qui m’ont aidée. Aujourd’hui, ça va mieux», a confié France La Bonté.

Depuis quelques années, elle s’occupe des tout-petits à Saint-Nicéphore et Saint-Eugène-de-Grantham. Elle donne des ateliers de cuisine, de cirque, de théâtre et de construction. De plus, elle incarne Mme Placotte, un mystérieux personnage qui raconte des histoires inventées et des légendes, afin d’apprendre le vocabulaire aux enfants par le jeu.

«C’est valorisant quand un enfant vient te demander d’être sa grand-mère. Je laisse mon héritage aux enfants, ça m’aide beaucoup de montrer tout ce que je sais», a conclu la femme de 60 ans.

Partager cet article