SANTÉ. L’efficacité du traitement nettement supérieure aux antidépresseurs et une équipe psychiatrique nombreuse sont deux raisons qui peuvent expliquer le nombre élevé d’électrochocs administrés à l’Hôpital Sainte-Croix de Drummondville.
C’est du moins les explications que donne la chef de département régional de psychiatrie au CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec, Marie-Claude Parent à la suite de l’article publié la semaine dernière portant le titre Le Centre-du-Québec, le royaume des électrochocs».
«Le traitement de la dépression majeure par les électrochocs a une efficacité supérieure aux antidépresseurs (du simple au double), donne des résultats plus rapidement et est sécuritaire malgré tout ce qu’on lit dans les médias à ce sujet», note-t-elle.
«Le fait que nous pouvons compter au Centre-du-Québec sur une équipe psychiatrique complète, cela explique en partie la possibilité de traiter un aussi grand nombre d’usagers par cette intervention. Un réaménagement des horaires de la chirurgie, il y a quelques années, permet aussi de faire plus de place au traitement par électrochocs, étant donné que la salle de réveil est nécessaire pour ce type de traitement», poursuit la psychiatre.
Rappelons que le ratio de la région est de 2,3 électrochocs par 1000 de population tandis que la moyenne nationale se trouve à 1,0.
Précisément, l’Hôpital Sainte-Croix de Drummondville a réalisé 662 séances d’électrochocs. À titre comparatif, 194 électrochocs ont été administrés à l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska de Victoriaville.
Pas si nocifs pour la santé
Plusieurs personnes et groupes dénoncent cette pratique, dont le comité Pare-Chocs, parce qu’elle est «dangereuse et peut amener des complications graves». Selon Mme Parent, les effets secondaires les plus fréquents ne sont pas graves, soit la nausée, la fatigue, les maux de tête et les douleurs musculaires.
«Plusieurs patients rapportent des effets cognitifs, particulièrement sur leur mémoire. Il faut préciser que la dépression est elle-même nocive pour les fonctions cognitives et c’est sans parler du risque suicidaire. Des études ont démontré que les troubles cognitifs notés tout de suite après les traitements par électrochocs s’améliorent par la suite de façon significative», précise-t-elle.
«En toute connaissance de cause»
Dans l’article publié sur le www.journalexpress.ca la semaine dernière, Ghislain Goulet, porte-parole du comité Pare-Chocs, rapportait que les électrochocs sont fréquemment administrés à des personnes vulnérables, notamment à des femmes âgées, un fait que la psychiatre ne nie pas.
«Il y a effectivement une prévalence plus importante de troubles dépressifs dans la population gériatrique avec un pronostic plus sombre que dans la population adulte. En effet, on ne doit pas minimiser les symptômes du trouble dépressif majeur chez les personnes âgées. Elles présentent davantage de résistance et d’intolérance à la médication, font des tentatives de suicide plus létales, ont des conditions médicales qui sont associées à des symptômes dépressifs et ces mêmes conditions les rendent plus fragiles à la déshydratation, la perte de poids et autres conséquences pouvant leur être fatales», explique-t-elle.
Elle tient à souligner que pour chaque patient présentant une indication (dépression majeure, trouble bipolaire ou troubles psychotiques, notamment) pour ce traitement, l’évaluation est faite de façon rigoureuse et cette méthode n’est pas proposée systématiquement.
«Rechercher le meilleur traitement n’est ni barbare ni dégradant. Transmettre une information juste concernant les alternatives efficaces de traitement dont les électrochocs permettent au patient d’avoir un vrai choix éclairé et de se sentir légitimé de le faire dans le but de guérir.»
Aucun électrochoc n’est administré à une personne qui ne le souhaite pas.
«Il faut également savoir que les personnes qui reçoivent ce traitement le font dans leur intérêt et en toute connaissance de cause. Si la personne n’est pas apte à décider de son traitement, un membre de sa famille ou de son entourage le plus près d’elle selon la désignation prescrite par la loi, pourra donner un consentement substitué. La décision d’un traitement quel qu’il soit doit se faire sur des preuves scientifiques en respect avec le choix du patient ou de son représentant.»
La science évoluant constamment, il est primordial pour l’équipe psychiatrique et la direction du CIUSSS MCQ de se questionner et d’être à l’affût des nouveautés démontrées efficaces, efficientes et sécuritaires.
«La mise en place d’un registre des électrochocs nous permettrait de répondre de manière véridique sur l’utilisation des électrochocs, plutôt que de faire des suppositions», laisse-t-elle entendre.