Un podium pour des championnes

Un podium pour des championnes
Samedi matin

L’intégration des personnes déficientes passe bien souvent par l’acceptation de leurs limites par la société dans laquelle elles vivent. Les parents d’Océane Rajotte et de Laurence Blondeau, eux, ont décidé de normaliser leur vie quotidienne en leur faisant pratiquer un sport d’élite comme le patinage artistique.

C’était le rêve de Laurence que de chausser des patins pour s’élancer de figure en figure sur  une grande surface glacée devant tous. Comme sa sœur Éricka, son aînée de deux ans, qu’elle venait voir patiner à l’aréna.

C’est ainsi que Laurence, qui est atteinte de dysphasie sévère, a commencé à patiner. Elle avait à peine quatre ans. Aujourd’hui, cette adolescente de 16 ans de Drummondville participe à des compétitions, du moins celles incluant une section pour athlètes spéciaux.

C’est toute une victoire pour Laurence qui a commencé à marcher à 23 mois, après que des médecins eurent certifié à sa mère Nathalie que jamais sa fille ne marcherait. Une phrase qu’il ne fallait pas prononcer devant Nathalie, qui s’est vite mise en tête que sa  fille vivrait malgré une vie normale malgré ses différences, ses handicaps.

Laurence poursuit son parcours scolaire à l’école Marie-Rivier et la direction lui a accordé une permission spéciale afin qu’elle puisse s’entrainer deux fois par semaine, durant l’horaire des classes.

À la Compétition Claude-Routhier, qui avait lieu samedi à l’Olympia Yvan-Cournoyer, Laurence s’est distinguée dans sa catégorie en remportant la première place….et en recevant son prix des mains de monsieur le maire Alexandre Cusson en personne. Une fierté pour elle.

«En 2016, Laurence s’est classée en troisième place aux Jeux olympiques spéciaux du Canada, qui se tenaient à Terre-Neuve. Elle rêve maintenant de se rendre aux Mondiaux», affirme sa mère Nathalie René, qui accompagnait sa fille, samedi matin.

«C’est toute sa vie»

Océane Rajotte s’est elle aussi distinguée en patinage artistique. Malgré son autisme, la fillette de huit ans patine deux fois par semaine avant de se rendre en classe et s’entraine pas moins de six fois sur une base hebdomadaire. Elle est inscrite en sports-études de 3e année à son école primaire de Magog.

Ses parents, originaires de Drummondville, tenaient à la voir s’épanouir. Ils ont inscrit Océane au cours de patinage artistique dès l’âge de deux ans et demi. «Même si ce sont des enfants différents, elles veulent être comme leur grande sœur», assure son père, Claude Rajotte.

Au début, elle ne parvenait à suivre sa formation que quelques minutes, excédée par trop d’éléments stimulants comme le bruit, la musique et le groupe.  

Avec le temps, Océane a apprivoisé cette sensibilité, de sorte que tout se passe bien désormais. Pour elle, le patinage est devenu une passion, un milieu où elle a su développer de vraies amitiés avec ses compagnes de cours, qu’elle côtoie depuis six ans.

«Le patin, c’est toute sa vie, raconte son père. Plus que l’école même. Faudrait pas lui enlever ça, ce serait la fin du monde.»

Océane s’est elle aussi démarquée dans sa discipline. Au volet des athlètes spéciaux des derniers Jeux du Québec, à Drummondville, elle a été la plus jeune athlète à recevoir une médaille, toute discipline confondue, soutient Claude Rajotte.

Le parcours d’Océane a d’ailleurs été remarqué par la Fondation Edmée Falaise, qui lui remet une bourse depuis deux ans afin de la soutenir. Samedi, elle est montée sur le podium des gagnants, en deuxième position, dans sa catégorie.

Décision injuste

Claude Rajotte, sa femme Élaine et Nathalie René ont été déconcertés dernièrement en apprenant l’absence des compétitions pour athlètes spéciaux aux Jeux du Québec de 2017. La raison ? Les régions du Québec ne seraient pas toutes représentées.

Une décision qu’ils considèrent injuste. Après tout, cela fait plus de vingt ans que cette catégorie est incluse aux compétitions provinciales.

«Retirer cette catégorie, c’est comme revenir 50 ans en arrière, affirme celui-ci. C’est une richesse que de leur permettre de vivre l’expérience des Jeux du Québec. Ça leur permet de côtoyer d’autres jeunes.»

La famille Rajotte a toujours du plaisir à venir aux compétitions de Drummondville, où l’accueil est extraordinaire, renchérit Nathalie René.

«Dans les arénas, c’est là qu’on se sent le mieux, qu’on se sent comme des parents normaux», assure M. Rajotte, qui a dû faire face à bien des préjugés sur les soi-disant limites de sa fille. «C’est tellement difficile partout où l’on va. On se fait dire tellement de choses», insiste celui-ci.

Pour lui comme pour bien d’autres parents d’enfants différents, ces compétitions réservées aux athlètes spéciaux ont une valeur irremplaçable.

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