Le Madrid 2.0 perd sa cause

Le Madrid 2.0 perd sa cause
Depuis plus de 60 ans

ÉCONOMIE. Le Tribunal administratif du Québec (TAQ) a rejeté la requête des propriétaires du Madrid 2.0 qui contestaient leur évaluation municipale, eux qui estimaient sa valeur à 2,8 M$ de moins.

Selon la méthode utilisée par Le Madrid, la valeur du terrain de 45 989 mètres carrés et du bâtiment de 1499 mètres carrés aurait dû être de 5 670 000 $, tandis que celle de l’évaluateur de la MRC de Nicolet-Yamaska arrivait à une valeur de 8 410 000 $.

Dans une décision rendue il y a quelques semaines, le Tribunal a rejeté le recours et maintenu les valeurs inscrites au rôle triennal 2012-2013-2014. Il a aussi rejeté la méthode de calcul des deux parties.

Comme l’édifice est entièrement loué en vertu d’ententes minimales de dix ans par les bannières Couche-Tard, McDonald’s et St-Hubert Express, la méthode du revenu aurait normalement dû être priorisée étant donné que l’immeuble serait acquis en fonction de son rendement financier.

Elle a toutefois été jugée «trop hypothétique» par le Tribunal. Les juges l’ont rejetée parce qu’au moment de l’évaluation, en juillet 2012, l’immeuble était en opération depuis seulement une semaine.

Il devenait alors aléatoire de se prononcer sur le chiffre d’affaires des commerçants étant donné l’absence d’historique des ventes. On ne pouvait pas non plus se fier sur l’achalandage au Madrid original, puisqu’il était bien différent de ce qui est en place aujourd’hui.

Quelle valeur?

Le TAQ a donc privilégié la méthode du coût, comme le réclamaient les propriétaires du Madrid 2.0, mais n’a pas tenu compte de ses arguments pour l’appliquer.

La partie requérante, soit la société en commandite (S.E.C.) Le Madrid, évaluait le terrain comme s’il était vague à un prix de base de 500 000 $. Elle se basait sur une offre d’achat formulée par Immostar afin d’acquérir un lot qu’elle jugeait comparable à la sortie suivante, de l’autre côté de la rivière Nicolet, à Sainte-Eulalie. Une transaction qui n’a toutefois jamais été finalisée.

Il s’agissait d’un terrain sur le rang des Plaines, qui est aussi situé à quelques mètres d’une bretelle d’accès à l’autoroute 20, sur lequel était érigé un bâtiment délabré où les opérations de restaurant, station-service et bar érotique ont cessé depuis quelques années. Celui-ci était en vente au prix de 800 000 $ depuis plus de huit ans et n’avait toujours pas trouvé preneur.

C’est pourquoi le Tribunal administratif s’est dit étonné que l’évaluateur s’en remette à une transaction qui n’a jamais abouti pour déterminer la valeur du terrain. D’autant plus que ce terrain n’a un accès direct que d’un seul côté et que sa superficie est de plus de la moitié inférieure.

Les juges administratifs ont plutôt établi le prix du terrain à 2 349 600 $, en y intégrant les coûts de démolition de l’ancien Madrid et la décontamination du terrain qui se sont élevés à 334 000 $.

Ce montant a toutefois été soustrait de la valeur étant donné que la transaction comporte aussi une clause de non-concurrence interdisant aux vendeurs d’exploiter tout autre commerce semblable dans un rayon de 25 kilomètres, et ce, pour une période de cinq ans à partir de 2011.

La valeur du terrain s’est donc chiffrée à 2 015 600 $, soit sensiblement le même que le prix d’acquisition du Madrid, une institution reconstruite dans le style espagnol après l’incendie du Moulin Rouge, en 1967. Le terrain avait été racheté par la famille Arel, en 1987, où ils ont exploité un restaurant, un hôtel et un poste d’essence avec des «monster trucks», puis de «dinosaures».

Le Tribunal administratif a fixé à 5 650 000 $ la valeur du bâtiment, pour un total de 7 665 600 $. Comme la différence est de seulement 360 000 $ de plus que sa valeur inscrite à la MRC de Nicolet-Yamaska, les juges Charles Gosselin et Claude de Champlain ont décidé de ne pas intervenir étant donné qu’elle est inférieure à 10%.

Des baux contestés?

La S.E.C. Le Madrid a également demandé une diminution de 10% de son évaluation, en raison de la désuétude économique, soit des facteurs externes menant à un déséquilibre entre l’offre et la demande.

Elle a fait valoir que les locataires contesteront éventuellement les baux en raison des coûts excessifs pour la cueillette des ordures, le déneigement ainsi que les frais liés au surdimensionnement des installations d’approvisionnement et de traitement des eaux.

Les propriétaires ont aussi rappelé que leurs revenus sont étroitement liés à ceux des locataires et que des concurrents pourraient s’installer à proximité.

Le Tribunal n’a toutefois pas tenu compte de ces arguments, jugeant hypothétique la présence de concurrents qui ne se sont pas manifestés. Les juges administratifs ont toutefois laissé la porte ouverte à une révision lors d’un autre rôle triennal d’évaluation, afin qu’il reflète mieux la situation économique de l’immeuble à ce moment-là.

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