Une loi adoptée sous bâillon qui passe mal

Une loi adoptée sous bâillon qui passe mal
Le juriste Langelier croit que la partie n'est pas encore terminée.

L’adoption du projet de loi 106 par l’Assemblée nationale, qui se tiendra vraisemblablement vendredi, a soulevé de vives réactions dans la communauté, à commencer par les différentes organisations de surveillance et le juriste Richard E. Langelier, qui jure que les citoyens ne se laisseront pas imposer une telle loi sans dire un mot.

Le juriste Langelier fulmine, bien qu’il ne soit guère surpris. Il est  clair pour lui que le gouvernement, sentant la grogne populaire augmenter, a accéléré l’adoption du projet de loi 106, quitte à utiliser le bâillon. Au retour de l’Assemblée nationale, en février, l’opposition citoyenne aurait gagné encore du terrain, croit-il.

La matinée était à peine entamée qu’il avait déjà reçu des dizaines de courriels de citoyens outragés. «Ça ne dérougit pas», a laissé savoir le juriste, lors d’une entrevue téléphonique avec L’Express.

«J’ai rarement vu un tel consensus d’opposition dans la société. On se prépare à une dangereuse tempête, car les groupes citoyens parlent de désobéissance civile pacifique», clame-t-il. Un sondage effectué cet automne par la firme Som révélait qu’effectivement le deux tiers des Québécois s’oppose au projet de loi 106.

Des maires s’opposent

M. Langelier appuie également la démarche du groupe de neuf élus municipaux, qui s’adresse jeudi au ministre de L’Énergie et des Ressources naturelles par le truchement d’une lettre ouverte dans les médias afin de dénoncer le bâillon. Même la municipalité de Restigouche a mis son drapeau en berne, insiste-t-il.

«Ce geste odieux constitue la plus criante illustration que votre gouvernement entretient un souverain mépris pour le débat démocratique et qu’il n’a eu cesse d’écouter que des spéculateurs et leurs lobbyistes au détriment d’un consensus large de la population opposée à la transformation du Québec en pétroéconomie, voire en pétrosociété», peut-on lire dans la lettre.

Selon M. Langelier si le PL106 suscite tant d’opposition chez les citoyens et les élus municipaux, c’est que le pouvoir qu’elle laisse aux exploitants d’hydrocarbures sera étendu, souligne M. Langelier. Le projet de loi 106 comporte l’étude de 400 articles. À lui seul, le chapitre IV sur les hydrocarbures contient 269 articles.

Du côté des municipalités, elles n’auront pas le choix de respecter les droits acquis de ceux qui détiennent une licence d’exploitation – sans pouvoir imposer de distances séparatrices –  et ce, malgré les amendements ajoutés par le ministre Pierre Arcand, a averti à plusieurs reprises le juriste Langelier.

Puis, il y a le risque d’expropriation. «Le projet de loi efface tous les droits acquis sur le sous-sol d’au moins 65 000 propriétaires québécois qui n’ont même pas été mis au courant de cette expropriation déguisée et sans compensation», a déjà indiqué M. Langelier.

Et il y a les puits. Au Québec, 1000 puits sont exploités et de ce nombre, deux très profonds sont situés dans le Centre-du-Québec, soit à Drummondville et à Notre-Dame-du-Bon-Conseil.

«Si les sociétés gazières et pétrolières veulent entrer sur le territoire, elles vont faire face à une opposition citoyenne plus déterminée que jamais. Il faut comprendre que la lutte va continuer», assure le juriste.

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