Bannir le menthol : une fausse bonne idée, selon l’AQDA

Bannir le menthol : une fausse bonne idée, selon l’AQDA

DRUMMONDVILLE. Tout le monde sera perdant, sauf les contrebandiers du tabac, si le gouvernement du Québec adopte le projet de loi 44 qui prévoit bannir le menthol sous prétexte que cette saveur est populaire chez les jeunes et les incite à fumer.

C’est la position que défend l’Association québécoise des dépanneurs en alimentation (AQDA) qui soutient que la ministre de la Santé publique, Lucie Charlebois, fait fausse route.

«La ministre prétend que 30 % des jeunes consomment la cigarette mentholée, contre 5 % des adultes. Or, ce n’est pas vrai», affirme Guy Leroux, directeur des affaires publiques de l’AQDA. Selon lui, les propriétaires de dépanneurs au Québec connaissent bien ce produit et ils savent que le menthol n’est pas populaire chez les jeunes.

«La ministre ne peut pas s’appuyer sur de telles statistiques et nous avons des chiffres qui prouvent le contraire. Nous avons vérifié en procédant à des études de mégots effectuées par une firme indépendante (Niric) en juin 2015, soit avant la fin des classes, autour de deux écoles de Drummondville, Jean-Raimbault et La Poudrière, et deux de Victoriaville. Il s’agissait d’analyser des mégots trouvés par terre, non pas dans les cours d’écoles, mais dans des endroits tout près où les jeunes se rassemblent pour fumer à la récréation ou sur l’heure du lunch. L’étude nous a permis de constater que les mégots provenant de cigarettes mentholées représentaient une moyenne de 1,1 %; un résultat qui est en conformité avec la réalité que nous vivons dans les dépanneurs», fait valoir M. Leroux.

Pour être plus précis, la cigarette mentholée était présente dans 2,3 % des mégots observés à Jean-Raimbault, de 0 % à La Poudrière, de 1,2 % à l’école Le Boisé et de 0,7 % à l’école Le Tamdem.

Selon lui, en bannissant le menthol, le gouvernement ne fera qu’en donner l’exclusivité aux contrebandiers. «Le marché de la cigarette mentholée est d’environ 5 % chez les adultes, surtout des femmes, âgées dans la quarantaine et la cinquantaine. C’est comme ça depuis les années 40. Que vont faire ces consommateurs et consommatrices? Ils vont sans doute prendre la direction des cabanes à tabac pour s’en procurer. Non seulement vont-ils délaisser les dépanneurs, mais ils deviendront de nouveaux clients des contrebandiers et paieront moins de taxes au gouvernement. Tout le monde sera perdant», avance M. Leroux.

Les études de mégots ne sont pas nouvelles pour l’AQDA. «En 2008, 2009 et 2010, nous avions financé des études semblables pour connaître à l’époque le taux de pénétration des cigarettes de contrebande. Ces études ont confirmé nos appréhensions. Et les résultats obtenus au Québec sont les mêmes que ceux que nous avons eus en Ontario et en Nouvelle-Écosse».

À ce chapitre, il est intéressant de noter cette autre révélation: dans l’ensemble du Québec, le taux de contrebande relevé est de 15,9 % pour l’ensemble des sites et de 16,8 % pour les écoles. À Drummondville, la moyenne de contrebande est nettement plus élevée, soit 26,2 % pour les deux écoles. À Victoriaville, la moyenne de contrebande est un peu moindre, soit 13,2 % pour les deux écoles.

Les propriétaires de dépanneurs ont autre chose à reprocher au projet de loi 44; ce sont les amendes qui grimperaient à un niveau astronomique lorsqu’un dépanneur serait trouvé coupable d’avoir vendu des cigarettes aux jeunes de moins de 18 ans. «On parle de 125 000 $ pour une première offense et de 250 000 $ pour une deuxième offense. Ces amendes seraient les plus élevées dans le monde. C’est vrai qu’il y a des failles dans le système de cartage et que le taux d’erreur est d’environ 15 %, mais ce serait très exagéré d’imposer de telles amendes. Il y a eu 5000 inspections en 2014 dans les 6400 dépanneurs du Québec et le taux de conformité dépasse les 80 %, de préciser M. Leroux.

«Nous proposons un système de cartage obligatoire pour tous, une carte d’identité qui pourrait être utilisé dans les machines de Loto-Québec. De cette façon, il n’y aurait plus de doute», a-t-il suggéré.

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