Le système de santé québécois manifeste des symptômes inquiétants qui ne semblent pas sur le point de se régler, que l’on pense, entre autres, au long temps d’attente dans les urgences, à l’épuisement du personnel médical, à la surconsommation de médicaments et au gouffre financier. Le Dr Martin Moisan fait part de ses observations dans son ouvrage, «La dérive du système de santé québécois», fruit d’un cheminement personnel et professionnel.
Après avoir pratiqué la médecine générale pendant plus de 15 ans, en milieu hospitalier et en cabinet privé, il conclut que le système de santé québécois est présentement dans une dérive qui ne peut qu’empirer si aucun changement significatif n’est apporté.
D’abord, il estime que le système de santé est au bord du gouffre financier, considérant que le gouvernement n’est plus en mesure d’augmenter le budget.
«Plus de 13 milliards de dollars ont été investis dans le système de santé en dix ans. La part consacré au budget de la Santé est de 47,5 % et les dépenses pour les autres ministères se chiffrent à 52,5 %. À mon avis, nous n’avons plus de marge de manœuvre. Il est ainsi primordial de trouver des solutions. Par exemple, il faut rendre les gens encore plus autonomes et ce n’est pas en leur prescrivant automatiquement des médicaments qu’on va y parvenir. S’ils sont plus informés sur les approches complémentaires, dont l’acupuncture, cela peut aider à réduire le nombre de consultations et du même coup, à diminuer les dépenses», explique celui qui est également praticien en massothérapie et instructeur en Tao (Chi Kung, Tai Chi, etc.).
Il décrit également certains malaises et problèmes qu’éprouve actuellement la médecine moderne. Il met en évidence le fait que la science médicale, malgré son expertise dans les situations d’urgence et ses mérites d’avoir prolongé l’espérance de vie, arrive à un point où elle est confrontée à elle-même, c’est-à-dire à son incapacité de percevoir l’être humain dans sa globalité.
«L’approche rationnelle de la médecine moderne conduit les médecins à prescrire des médicaments aussitôt qu’ils constatent la présence de symptômes quelconques. Je ne dis pas que je suis contre les médicaments, mais je suis d’avis qu’il ne faut pas s’en tenir qu’à ça. L’être humain n’a pas seulement qu’un aspect physique, il a également des composantes émotives et énergétiques dont il faut tenir compte et qui sont traitables par les thérapies, comme l’acupuncture», tient-il à préciser.
Surconsommation
Il y a quelques semaines, M. Moisan était à Drummondville pour présenter son livre ainsi que pour donner une conférence sur le phénomène inquiétant du nombre croissant de prescriptions d’antidépresseurs, sujet dont il est aussi question dans le livre.
«Présentement au Canada, 10 % de la population sont sous antidépresseurs. En 2010, les Québécois consommaient 36 % des antidépresseurs au pays. C’est aussi ici qu’on prescrit le plus de ces médicaments aux jeunes de 19 ans et moins», fait savoir le Dr Moisan qui offre actuellement des soins dans la communauté amérindienne de Kanesatake, à Oka.
Selon lui, plusieurs facteurs peuvent expliquer cette surconsommation.
«Il ne faut pas mettre toute la faute sur le dos des médecins. Il y a une pensée magique qui dit qu’une pilule apporte la guérison, ce qui fait en sorte que les patients exigent de prendre des médicaments aussitôt qu’ils ont un doute. De plus, l’industrie pharmaceutique cache de nombreux résultats de recherche pour ne montrer que le positif», laisse-t-il tomber.
«La dérive du système de santé québécois» est disponible à la librairie Renaud-Bray et sur le site du Dr Moisan au www.martinmoisan.com .