Drames familiaux : le coroner Yvon Garneau sert une mise en garde aux médias

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Par Lise Tremblay
Drames familiaux : le coroner Yvon Garneau sert une mise en garde aux médias
Le coroner Yvon Garneau.

Le coroner Yvon Garneau a servi une mise en garde aux médias en déposant son rapport d’investigation concernant le drame familial qui a secoué la municipalité de Saint-Edmond-de-Grantham le 2 mai 2011 et qui a coûté la vie à deux enfants âgés de 2 et 8 ans. Les petits, on se rappellera, avaient été retrouvés entièrement calcinés dans le véhicule de leur père, Martin Houle. Un troisième enfant, un garçon de 6 ans, avait miraculeusement eu la vie sauve.

Le rapport d’investigation, qui a été rendu public aujourd’hui, rappelle les faits de cet événement hautement médiatisé.

Après avoir fait l’achat de bombonnes de propane, Martin Houle, 37 ans, annonce à ses enfants qu’ils partent à la cabane à sucre de leur grand-père pour y voir un feu d’artifices. Il avait consommé de la cocaïne, selon le document officiel.

Il passe à l’acte à 8 h 55. Une explosion se fait entendre et son véhicule, un pick-up Ford, s’enflamme. Zacharie et Florence Houle n’ont eu aucune chance. Leurs corps ont été carbonisés.

À la suite de cet événement des plus tragiques, Martin Houle quitte les lieux du drame.

Ce n’est que le jour suivant, soit le 3 mai, vers 11 h 45, que les policiers le retrouvent mort, un couteau de type « X-acto » près de lui. Il se trouvait dans un boisé, à plus d’un kilomètre du véhicule incendié dans lequel ont été retrouvés les deux enfants. L’homme présentait plusieurs coupures linéaires, dont une plus importante au cou.

Toujours selon le rapport du coroner, M. Houle avait des problèmes financiers, vivait des problèmes conjugaux et se remettait mal d’une séparation.

Ce drame, rappelle Yvon Garneau, s’est déroulé dans une période au cours de laquelle les médias parlaient abondamment d’un drame semblable ayant impliqué une famille de la région des Laurentides en 2010. Aussi, le procès du cardiologue Guy Turcotte faisait régulièrement les manchettes dans les médias.

Martin Houle a-t-il subi une quelconque influence?

Selon M. Garneau, bien qu’il soit impossible de répondre à cette question avec certitude puisque l’homme est aujourd’hui décédé, il y a lieu tout de même de se poser la question.

«J’ai eu l’occasion en cours d’investigation d’échanger avec une experte en psychologie, soit la professeure Suzanne Léveillée de l’UQTR, indique-t-il. Entre autres, ce qu’elle m’indique, c’est qu’étant donné l’importante difficulté à composer avec le stress relié à la rupture amoureuse ou aux enjeux de garde d’enfants, ces individus (comme dans ce cas-ci le père des enfants) sont à la recherche de solutions pour se sortir de l’impasse. La professeure indique aussi que ces personnes présentent une personnalité fragile et que, face à certains stress, elles n’arrivent pas à se contenir et passent à l’acte. De plus, dans cette période de fragilité intense, il est fort possible qu’elles deviennent influençables aux commentaires des gens incluant les événements relatés dans les médias».

Ainsi, le coroner Yvon Garneau recommande au Conseil de presse du Québec que la diffusion d’informations sur les drames familiaux soient restreinte et pertinente, tout en respectant le droit du public à l’information.

«Si on recule dans les événements, au mois de mai 2011, c’était épouvantable ce qu’on donnait comme information dans les médias. On était dans le procès du docteur Turcotte. Des détails parfois sadiques étaient rapportés. Aujourd’hui, la recommandation que j’ai osé faire, en est une qui porte à la réflexion. Oui, il faut raconter ces événements, mais je pense que les journalistes ne peuvent pas livrer n’importe quoi, surtout dans le contexte des médias sociaux. Je me questionne donc sur la pertinence de communiquer les détails de pareil drame et aussi sur la répétition», explique Yvon Garneau.

En se gardant bien de vouloir dicter une marche à suivre aux médias, le coroner, qui a déjà occupé un emploi dans une salle des nouvelles, suggère néanmoins aux journalistes qui ont à faire des suivis de cas semblables d’axer davantage sur les noms des victimes ou de la ville où s’est joué le drame plutôt que de marteler le nom de l’agresseur durant des semaines.

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