En ce 29 décembre 1862, à Saint-Germain, le curé Baillargeon vint prodiguer les derniers sacrements à Julie Désilie, mais refusa de mettre la défunte en terre sans la clarification d’une enquête. Une première enquête conclut à une mort naturelle, mais de nouvelles preuves furent mises à jour tendant à incriminer son mari, Pierre Barbina, obligeant le coroner à demander une seconde enquête, ce qui obligea la tenue d’un procès.
Barbina aurait acheté des remèdes et de l’arsenic au docteur Pierre Bérard de Drummondville fin novembre. Les remèdes étaient destinés à sa femme et l’arsenic devait servir à tuer les rats qui saccageaient la grange de son frère George. Les absences prolongées de Barbina, qui travaillait chez le boulanger Ferdinand Caya de Drummondville depuis 18 mois, occasionnaient de multiples disputes avec sa femme. Ces querelles, connues des voisins, se bornaient à des mots, absents de coups, sans que l’on puisse en mettre la faute sur l’un plus que sur l’autre. Son travail à Drummondville fournissait un gagne-pain à sa famille, sa frêle charpente ne lui permettait pas de supporter les rudes labeurs agricoles. Barbina aurait révélé à Honoré Gagnon, le 28 décembre, que sa femme lui causait bien du chagrin, le faisant passer pour ce qu’il n’était pas. Il a été dit que l’accusé n’entretenait aucune liaison illégitime, soulignant son caractère honnête exempt de médisance.
Louis, le fils de Julie, né quatre ans avant son mariage, témoigna que Barbina le pressa de dire que la poudre administrée à sa mère comportait du jaune, alors qu’elle était blanche. En ce sens, la défunte aurait confié qu’elle se pensait empoisonnée par la dernière pilule qu’elle avait prise.
La plaidoirie de la défense souligna des lacunes lors du transport des viscères, ce qui mettait en doute leur authenticité. On mentionna également le fait que Julie puisse s’être procuré d’autres remèdes que ceux de son mari. On s’attarda aussi aux contradictions du témoignage de Louis.
Hemming apporta un échantillon de la substance blanche que déclarait avoir trouvé sous sa grange le frère de l’accusé, appuyé de son voisin. Une analyse fut faite, mais ne fut pas utilisée malgré les protestations de la défense. À cette entorse s’ajoute la partialité du juge déclarant sa culpabilité irréfutable et ne lui laissant le bénéfice du doute que par l’intervention des avocats de la défense.
Sa culpabilité fut prononcé et son exécution fixée au quinze mai. Toutefois, sa cause allait être portée en appel, une première au Bas-Canada. (à suivre)
Source : -Procés de Pierre Barbina dit Duval pour l’empoisonnement de Julie Désilie, son épouse. 1863, Trois-rivières. -Journaux : Le Défricheur, Le courrier du Canada, Le Canadien, The Montreal Witness.
Lien vers le compte-rendu du procès en ligne sur le site Web de l’Express : www.archive.org/stream/cihm_29568#page/n5/mode/2up