POLITIQUE. Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, et le député de Drummond, Martin Champoux, ont réagi aux changements que le ministre de l’Immigration, Marc Miller, suggère d’apporter au programme des travailleurs étrangers temporaires.
Le Bloc québécois souscrit au consensus du Québec quant au nombre d’immigrants temporaires qui y sont présents, toutes catégories confondues, qui est bien au-dessus de la capacité du Québec à rendre à la population les services de qualité auxquels elle a droit en matière d’éducation, de services de garde, de santé, d’accès au logement et aussi de francisation.
«Il était temps qu’Ottawa se réveille! Le Bloc insiste toutefois : l’intervention la plus urgente doit assurer une juste répartition des demandeurs d’asile sur le territoire canadien en proportion de la population de chaque province et du Québec», soutient le chef du parti.
«En 2020, à la demande des milieux économiques, industriels et agricoles, le gouvernement fédéral a modifié les règles applicables de telle sorte que certaines entreprises étaient désormais autorisées, dans le contexte de la pandémie, à retenir les services de main-d’œuvre temporaire étrangère à hauteur de 30 % du nombre de leurs employés. Les entreprises ont déployé d’importants moyens humains et financiers pour se prévaloir de cette opportunité, et littéralement transformé leurs processus internes. Il semble ainsi impossible de ramener ce pourcentage à 10 % en quelques mois sans conséquences graves pour les entreprises. Il s’agit de main-d’œuvre formée et qualifiée, souvent francisée, qui devra être mise à pied, et qui n’est toujours pas remplaçable par le bassin de main-d’œuvre domestique du Québec. Il y a même des secteurs névralgiques où il sera impossible de remplacer cette main-d’œuvre, comme l’assainissement des eaux ou la production de matériaux de construction», renchérit le député Champoux.
Le Bloc québécois demande au ministre de considérer plutôt une mesure progressive sur trois ans jusqu’à atteindre le retour à un niveau de 10 % de main-d’œuvre temporaire étrangère au sein d’une entreprise tout en maintenant les exceptions dans le secteur agricole et celui de la santé.
«En outre, la productivité au Canada est dramatiquement plus faible que celle des États-Unis, et le recours à la main-d’œuvre étrangère temporaire, parfois moins coûteux, retarde les efforts de croissance de la productivité. Il semble donc essentiel que le fédéral augmente aussi les gains en productivité», explique Yves-François Blanchet.
De telles mesures ne régleront toutefois pas un enjeu spécifique au Québec : la nécessité de franciser cette main-d’œuvre qui contribue à l’anglicisation du Québec, particulièrement à Montréal, insistent les politiciens.
Le Bloc québécois rappelle que le recours à la main-d’œuvre étrangère a pour but de compenser le rétrécissement du bassin de main-d’œuvre domestique, en particulier dans certains secteurs agricoles et industriels. Il ne doit pas s’agir d’un expédient pour payer moins cher un travail égal. Cependant, la mesure selon laquelle le cap en dessous duquel la main-d’œuvre est considérée comme à bas salaire qui passerait de 27 $ à 33 $ l’heure semble inapplicable.
«Évidemment, la hausse des salaires de 6 $ l’heure ne serait pas appliquée qu’aux travailleurs étrangers, s’inquiète Martin Champoux. On voit mal comment des entreprises pourraient d’un coup augmenter le taux horaire de tous leurs employés de 6 $ et demeurer compétitives, ou même survivre.»
«À la lumière des réactions très vives observées dans les milieux économiques, industriels, de la construction, de l’agroalimentaire et des Chambres de commerce, une consultation et d’importantes modifications sont nécessaires à la mise en œuvre des propositions du ministre, suggère Yves-François Blanchet. De plus, pourquoi Ottawa impose-t-il des restrictions au recours aux travailleurs étrangers temporaires qui sont sous juridiction québécoise alors qu’il n’impose pas de telles réductions aux 60 % d’entre eux qui sont admis sur le territoire en vertu de sa propre juridiction fédérale dans le cadre du programme PMI? La vraie solution demeure, par souci de cohérence et de préservation du tissu national, que Québec gère seul l’immigration sur son territoire.»