Un nouvel outil numérique de dépistage universel en écriture

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Par William Hamelin
Un nouvel outil numérique de dépistage universel en écriture
Cette année, 54 écoles à travers la province et deux établissements au Yukon et en Ontario utilisent ÉvadiGraphe, selon la PDG d’Évadi. (Photo : William Hamelin)

ÉDUCATION. L’entreprise drummondvilloise spécialisée en conception d’outils numériques pour l’évaluation diagnostique des apprentissages, Évadi, lance à pleine échelle son nouvel outil de dépistage universel en écriture, ÉvadiGraphe.

Le logiciel propose d’évaluer les compétences en écriture des élèves grâce à une dictée découpée par sections de phrase. Les élèves peuvent augmenter ou diminuer la vitesse de lecture selon leur désir, puis, une fois la dictée finie, le logiciel analyse les résultats. Le professeur ainsi que l’élève obtiennent instantanément un rapport complet de toutes les règles de français que l’élève doit travailler.

L’orthopédagogue à la retraite et présidente-directrice générale (PDG) d’Évadi, Michèle Potvin, explique que l’outil comprend deux dictées par niveau, allant de la troisième année du primaire aux étudiants universitaires qui doivent passer le Test de certification en français écrit pour l’enseignement. L’utilisation de la dictée pour le dépistage universel sert à mieux discerner les erreurs de grammaire ou d’accords qu’un élève peut faire sans s’en rendre compte, selon elle.

«L’avantage avec les dictées c’est qu’on sait quel mot doit être écrit à tel endroit et comment. On sait ce que l’élève doit écrire, donc c’est beaucoup plus facile à corriger, contrairement à une production écrite où l’élève peut rester dans une zone de confort en prenant des mots et des tournures de phrase qu’il connait, et cacher ses erreurs en se servant d’outils comme un dictionnaire ou un Bescherelle», met en lumière Mme Potvin.

À la fin de la dictée, les élèves sont accueillis par des graphiques leur montrant leurs erreurs les plus fréquentes. (Photo : William Hamelin)

La PDG d’Évadi confirme que, depuis la rentrée scolaire de 2023, le logiciel est complètement automatisé. L’implantation d’algorithmes de correction « très efficace, et beaucoup plus précis rapidement » leur permettent de trouver toutes les erreurs et les exceptions qu’ils ont programmées pour chaque dictée.

Populaire dès le début

Michèle Potvin raconte que son équipe et elle travaillent sur cet outil depuis 2016. Elle cherchait un moyen de sauver du temps de correction pour les enseignants qui doivent aussi passer à travers les dépistages en lecture.

«Le dépistage est important en lecture et en écriture. On le fait plus en lecture dans les écoles et les profs passent tellement de temps à corriger individuellement chaque élève que, souvent, ils n’ont plus de temps pour l’écriture», souligne-t-elle.

À la suite d’une étude d’évaluation en 2017, pour vérifier la validité des résultats d’ÉvadiGraphe, l’outil a été utilisé en version bêta sur 690 élèves dans 10 écoles à travers la province. Mme Potvin raconte que le logiciel a tellement conquis les professeurs qu’ils n’ont pas voulu attendre la version finale. Ils ont pu continuer à s’en servir tout en donnant des suggestions pour l’améliorer à l’équipe d’Évadi depuis 2018.

«Avant, il y avait un délai de trois à cinq jours avant d’avoir les résultats. Les professeurs me disaient : «Ce n’est pas grave! On fera autre chose pendant ce temps-là. Au moins, on n’a pas à faire l’analyse.»», se souvient la PDG d’Évadi.

De plus en plus d’écoles se sont mises à utiliser l’outil numérique d’année en année. En 2024, Mme Potvin relève que ce sont 54 écoles au Québec, deux au Yukon et une en Ontario qui y ont recours pour faire le dépistage universel d’écriture de près de 22 400 élèves.

Un exemple de dictée proposé par ÉvadiGraphe. (Photo : William Hamelin)

Les retours sont tous aussi positifs de la part des professeurs que de la part des étudiants, selon l’orthopédagogue à la retraite. «Les profs nous ont dit que les élèves étaient plus motivés à se corriger quand ils avaient un outil comme celui-ci parce que c’est concret pour eux. Ils savent ce sur quoi ils doivent travailler», affirme-t-elle.

Mme Potvin prépare en ce moment une recherche pour 2024-2025 avec une équipe de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR). L’étude visera à mesurer la motivation à s’autocorriger quand des élèves utilisent ÉvadiGraphe. Cela permettra en même temps de savoir si ce que les professeurs lui rapportent, sur les retours des élèves, est véridique.

Démocratisation du dépistage

Pour Michèle Potvin, il est essentiel de faire un dépistage universel en écriture dès le primaire et de le faire d’année en année pour repérer rapidement les élèves qui ont des lacunes, et ce même chez ceux qui se considèrent bons en français.

«Chaque année, on dépiste un ou deux élèves qui ne s’attendaient jamais à avoir des difficultés. Avec l’aide d’un dictionnaire ou d’un Bescherelle, l’élève peut réussir, s’il est très intelligent, à camoufler ses difficultés et on ne les verra pas. Dans un dépistage, ils n’ont le droit à aucun outil parce qu’on veut vérifier la maîtrise du français. C’est là que c’est intéressant parce que les élèves doivent démontrer ce qu’ils savent», explique-t-elle.

La PDG d’Évadi croit que repérer en avance les lacunes des élèves leur permettraient de mieux se préparer, par exemple, à l’évaluation finale de cinquième secondaire. L’an dernier, c’est moins d’un jeune sur deux qui a obtenu la note de passage au critère du respect des normes relatives à l’orthographe d’usage et à l’orthographe grammaticale lors de l’épreuve finale de français.

Michèle Potvin a eu l’idée d’ÉvadiGraphe en 2016, alors qu’elle devait corriger les résultats de dépistage de près de 750 élèves. (Photo : William Hamelin)

Évadi propose un montant de 4,40$ par année par élève, pour des groupes de moins de 99 élèves, aux écoles qui souhaitent utiliser l’outil numérique. Le prix est réduit jusqu’à 3,90$ pour les groupes de plus de 600 élèves. Michèle Potvin justifie ce prix minime parce qu’elle veut encourager les établissements à en faire l’usage.

Son but avec ÉvadiGraphe est de pouvoir aider le plus d’élèves possible que ce soit au Québec ou dans le reste de la francophonie canadienne. Pour l’instant, chaque école doit payer elle-même les frais pour avoir accès à l’outil numérique.

« Je serais prête à faire une entente avec le gouvernement du Québec pour qu’il achète des abonnements pour différentes écoles, mais, pour le moment, on m’a dit de faire affaire individuellement avec chacune d’entre elles», soulève celle qui souhaite également réaliser une étude à l’échelle de la province pour le gouvernement.

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