Soprema veut faire évoluer les façons de construire

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Par Louis-Philippe Samson
Soprema veut faire évoluer les façons de construire
Soprema veut user de son influence pour faire évoluer les façons de construire au Québec. (Photo : Louis-Philippe Samson)

CONSTRUCTION. Constatant une trop grande dépendance aux produits du pétrole en construction, Soprema veut s’imposer comme un chef de file en matière d’innovation au Québec et n’hésitera pas à proposer des idées de grandeur.

Au Québec, comme partout au Canada, des normes encadrent la construction des bâtiments. Celles-ci divergent sur quelques points selon la province. Richard Voyer, vice-président exécutif et chef de la direction de Soprema Amérique du Nord, estime que les exigences en performances énergétiques du Code de construction du Québec (CCQ) sont de 30 % inférieures à celle du Code national du bâtiment du Canada (CNB).

«Notre défi au Québec est de parler de performance énergétique. Chez Soprema, on en parle; j’ai eu la chance d’en discuter avec beaucoup de monde. Il y a un changement à faire dans la province. Nous devons prendre la tendance de mieux construire. Il faut bien faire les choses, bâtir d’une manière durable, être efficace et réduire notre consommation énergétique», expose M. Voyer dans un entrevue accordée à L’Express.

Une façon d’y arriver, selon le chef d’entreprise, est de réduire la dépendance aux produits du pétrole. Il estime que de nouveaux matériaux doivent être conçus.

Richard Voyer, vice-président exécutif et chef de la direction de Soprema Amérique du Nord. (Photo : archives, Ghyslain Bergeron)

«Il y a une chimie du bâtiment qui doit être développée pour arriver à se créer une indépendance du pétrole. Dans nos laboratoires drummondvillois, nous développons des techniques de construction qui sont plus performantes et à meilleur coût. Ce que nous ferons ces prochaines années, en construction de bâtiments, ce sera important de bien le faire et que les performances soient optimales», ajoute Richard Voyer.

Changer les codes

Afin de motiver un changement de masse, Soprema songe à produire son propre code de construction, en compagnie d’autres entreprises du milieu, qui ira plus loin que celui exigé par la Régie du bâtiment du Québec (RBQ).

«On veut rassembler des entreprises influentes, des architectes et de grands entrepreneurs qui ont envie de faire du Québec un endroit où on va bien construire et bien faire les choses. On ne parle pas de produits exclusifs, mais plutôt de manières de faire les choses», indique M. Voyer.

L’objectif de Soprema est simple : transformer l’industrie de la construction québécoise. «Chez Soprema, on n’attend après personne. On veut faire de l’industrie quelque chose de durable et sain. On va arriver, envers et contre tous s’il le faut, à changer la donne et construire des bâtiments plus performants. Avec notre influence, nous serons capables de changer les règles», affirme avec conviction Richard Voyer.

Selon le vice-président exécutif, il faut réviser la base des principes de construction. Il soutient que les bâtiments qui sont actuellement construits laisseront leur empreinte pour les 50 à 80 prochaines années.

«On discute beaucoup avec le gouvernement du Québec pour le conscientiser à la situation. Nous sommes en campagne de sensibilisation et d’éducation des architectes qui doivent être partie prenante de ça. Il faut penser au développement durable et à la fin de vie de nos matériaux», expose-t-il.

Gérer le risque

Selon l’Association de la construction du Québec (ACQ), une entreprise souhaitant adopter son propre code de construction doit prendre en considération la capacité de payer du donneur d’ouvrage. «Il y a différentes variables, signale Guillaume Houle, responsable des affaires publiques à l’ACQ. Il faut avoir en tête qu’on souhaite réaliser les travaux au moindre coût, avec la plus grande efficacité énergétique et la plus petite empreinte écologique. C’est à l’entreprise de gérer son risque si elle utilise son propre code plus exigeant», dit-il.

Guillaume Houle, responsable des affaires publiques à l’Association de la construction du Québec (ACQ). (Photo : ACQ)

L’ACQ amène aussi une explication quant au retard du Québec quant à l’efficacité énergétique. Au Canada, le CNB est révisé chaque cinq ans, la dernière révision remontant à 2020. Le Québec utilise ensuite celui-ci comme base pour élaborer le CCQ, une tâche qui peut elle-même prendre jusqu’à cinq ans pour être complétée.

«Chaque province peut légiférer sur son propre code de construction. Au Québec, c’est la RBQ qui est mandatée pour le faire. Cette situation fait en sorte que la province a toujours entre quatre et cinq ans de retard sur le Canada», explique M. Houle.

Les provinces canadiennes se sont déjà entendues afin d’améliorer le CNB et d’en faire un code unique qui serait appliqué au Canada d’est en ouest. Par ailleurs, le ministère de l’Environnement du Québec vient d’hériter de la responsabilité d’encadrer l’efficacité énergétique des bâtiments à l’aide d’un nouveau code complémentaire au CCQ.

«L’industrie québécoise cherche toujours à améliorer ses façons de faire et à réduire son empreinte écologique. Cependant, ça amène un enjeu de gestion à savoir quel code aura priorité sur l’autre», prévient le responsable des affaires publiques.

L’ACQ estime que beaucoup de travail demeure à réaliser afin de réduire l’empreinte écologique de l’industrie. La gestion des matières résiduelles des chantiers et la récupération des matériaux de construction sont encore des enjeux qui devront être améliorés afin d’atteindre ces objectifs.

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