RIVIÈRE SAINT-FRANÇOIS. Hydro-Québec a tenu une rencontre virtuelle 15 mars dernier afin de discuter de crue printanière et pour répondre aux questions des citoyens sur le sujet. Il était question de crue dans le contexte de changements climatiques, de l’état de la situation actuelle et de l’installation de haussoirs pour la période estivale.
Jean-Philippe Martin, conseiller en développement durable chez Hydro-Québec, a parlé de changements climatiques et à quoi on peut s’attendre pour la rivière Saint-François dans le futur. «L’émergence des changements climatiques ne datent pas d’hier», a-t-il d’abord souligné. En effet, des variations ont été observées et notées dès les années 1980. Selon les modélisations présentées, il faut d’abord savoir qu’indépendamment des actions entreprises pour réduire les gaz à effets de serre (GES), la planète sera victime de son inaction passée, dans les deux prochaines décennies. «Donc, on veut à la fois agir pour le futur, en réduisant les GES, mais on doit aussi s’attendre à une hausse des températures dans un futur proche», exprime M. Martin.
Les projections à long terme (2050) montrent une hausse des températures d’environ 3,5 degrés et 10% de plus de précipitations extrêmes pour le sud du Québec. Cela aura des impacts sur la santé, sur la quantité d’inondations, et sur la demande d’énergie l’été, à cause de la climatisation. Ces mêmes prévisions entrevoient des crues plus hâtives causées par la hausse des températures, moins de neige, et plus de pluie. Cependant, les spécialistes ne peuvent prévoir avec certitude l’ampleur de la pointe. Spécifiquement pour la rivière Saint-François, les prévisions à long terme annoncent une diminution des débits moyens, surtout en mai et en juin, ainsi que des débits de crue sur 14 jours qui seront plus bas. Durant l’été, on s’attend à plus d’étiages, c’est-à-dire le moment où le débit est le plus bas, durant des périodes de sécheresse. On prévoit aussi des pointes de crues de 5% à 15% plus sévères.
«Hydro-Québec n’a pas eu le choix de s’intéresser aux changements climatiques depuis le déluge du Saguenay, où la Loi sur la sécurité des barrages a été adoptée», explique M. Martin. Après la crise du verglas, la société d’état et les deux paliers de gouvernement se sont engagés à co-fonder le consortium Ouranos, qui s’occupe de recherche sur l’adaptation aux changements climatiques.
Crue printanière
La crue de printemps dépend de la quantité de neige accumulée sur le bassin versant, de la vitesse de fonte de la neige et des précipitations qui s’y ajoutent. C’est cette chronologie qui influence la crue. Il existe plusieurs installations de production d’électricité sur la rivière Saint-François, appartenant à des municipalités (Magog, Sherbrooke, Coaticook), au ministère de l’Environnement et de la lutte contre les changements climatiques et à des entreprises privées. Les installations d’Hydro-Québec sont les dernières sur la rivière.
À Drummondville, il y a la centrale de la Chute-Hemming, d’une puissance de 29 mégawatts, et la centrale de Drummondville, qui est d’une puissance de 16 mégawatts. «Il faut noter que les réservoirs de ces deux installations sont de très petite taille. Ils ne font pas de régularisation de débit, il n’y a pas assez de volume», spécifie Jérémie Gaucher, ingénieur civil. Ces centrales ne permettant pas de stocker l’eau, elles doivent donc laisser passer les apports naturels qui évidemment, sont imprévisibles.
Au 16 mars, la quantité de neige au sol est sous la moyenne, ce qui présage bien pour la crue printanière. «Il faut comprendre que ce n’est pas une garantie de ne pas avoir une grosse crue. C’est le contexte dans lequel cette neige va fondre qui importe. Si cette neige tend à rester au sol et à fondre plus tard, en avril, combinée avec de la pluie, c’est sûr qu’on pourrait avoir une crue aussi importante que si on avait eu un stock de neige normal», précise M. Gaucher.
Installation des haussoirs
En plus de produire de l’énergie, Hydro-Québec procure aux Drummondvillois un niveau d’eau plus élevé en amont de la centrale Chute-Hemmings durant la période estivale afin de favoriser la pratique d’activités nautiques, grâce notamment aux haussoirs.
Après la crue de printemps, quand le débit de la rivière est sécuritaire, ces panneaux mobiles sont installés sur la crête déversante du barrage. Ils permettent de maintenir le niveau d’eau plus haut. Leur installation est assez complexe. L’assemblage des haussoirs prend une semaine environ, mais il faut ajouter à cela du temps d’inspection et de réparation au besoin. Ensuite, c’est le temps de la mise en eau. La durée de cette opération dépend du débit d’eau : cela peut prendre 2 jours comme 3 semaines.
Comme les haussoirs ne sont pas conçus pour résister aux embâcles printaniers et automnaux, ils sont retirés avant le gel.
«Une installation de cette ampleur, avec un mur temporaire de cette taille-là, il n’y a pas ça ailleurs au Québec», s’exclame Jean-Philippe Deschênes, chef ouvrier civil.