HOCKEY. La crise du coronavirus engendre des répercussions sans précédent sur la santé financière de la plupart des organisations sportives de la planète. Les Voltigeurs de Drummondville n’y font pas exception.
Selon le président du conseil d’administration, Éric Verrier, l’annulation des derniers matchs de la saison régulière ainsi que des séries éliminatoires dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ) signifie un manque à gagner d’environ 200 000 dollars pour les Voltigeurs. Annuellement, l’organisme sans but lucratif boucle un budget avoisinant 2,5 millions de dollars.
«C’est dur de prévoir combien de matchs locaux on aurait joués en séries, car il y a toujours des surprises. C’est clair que les séries sont importantes dans notre budget, mais c’est moins important qu’à l’époque. En raison de notre modèle d’affaires, ce n’est plus une question de survie pour notre organisation», a expliqué Éric Verrier dans un entretien avec L’Express.
Ce modèle d’affaires, c’est celui instauré par le comité de relance de l’organisation dès son entrée en scène en 2004.
«La première chose qu’on a voulu faire, c’est d’enlever de la pression sur les revenus aux guichets, qui sont tributaires des performances de l’équipe sur la glace. Jusque-là, quand les performances hockey n’étaient pas au rendez-vous, les assistances chutaient drastiquement. Résultat, l’organisation vivotait tout le temps. C’est pourquoi on a créé des activités-bénéfice pour générer des recettes autrement que par les assistances», a expliqué Éric Verrier en faisant référence à la Classique de golf, au Cellier, à la Soirée rouge ainsi qu’à la Loto-études.
Sur le plan strictement hockey, les Voltigeurs étaient dans une position enviable au moment où le coronavirus a frappé. À l’an 1 de sa reconstruction, la troupe de Steve Hartley a fait fi de la perte de nombreux vétérans pour s’imposer comme la principale surprise à travers la LHJMQ.
«Contrairement à nous, certaines organisations doivent vivre avec le fait d’avoir joué le tout pour le tout, a fait remarquer Éric Verrier. Elles ont hypothéqué leur futur pour acquérir des joueurs de premier plan. Bien sûr, la coupe n’était pas garantie, mais ces clubs-là n’auront même pas eu la chance de se faire valoir en séries. C’est malheureux, mais il n’y a aucune façon de les compenser. On doit regarder en avant.»
Une longue pause menaçante
S’il se montre rassurant sur la survie immédiate des Voltigeurs, Éric Verrier ne cache pas ses craintes advenant que la situation s’éternise durant plusieurs mois. Actuellement, la LHJMQ étudie différents scénarios quant à la reprise de ses activités. Selon les directives gouvernementales, la saison régulière qui débute habituellement en septembre pourrait être repoussée jusqu’au mois de janvier prochain.
«Si la saison est écourtée, ça deviendrait drôlement inquiétant. Ça nous causerait des soucis financiers beaucoup plus significatifs qu’en ce moment. Tout dépend de combien de parties locales notre calendrier serait amputé. S’il fallait que la saison soit annulée au complet, ce serait catastrophique, mais on est loin d’être rendus là. On y va au jour le jour», a laissé entendre l’homme d’affaires drummondvillois.
Déjà, on sait que le tournoi de golf de l’équipe qui devait avoir lieu en juin a été repoussé au mois d’août ou de septembre. Habituellement tenue en début de saison, la soirée Cellier pourrait également être compromise.
Malgré ces pertes financières, aucun employé permanent des Voltigeurs n’a été mis à pied jusqu’ici. L’organisation compte néanmoins faire appel à la subvention salariale d’urgence du gouvernement fédéral. Éric Verrier ne cache pas que si la prochaine saison est amputée de plusieurs matchs, l’organisation devra prendre des décisions difficiles.
Une longue pause pourrait également avoir des répercussions sur le cheminement scolaire des jeunes hockeyeurs. «Habituellement, les camps se déroulent en août, ce qui permet de faire des coupures dépendamment du niveau académique des joueurs, a rappelé Éric Verrier. Si on tient nos camps plus tard, alors que l’année scolaire est déjà commencée, ça voudra dire que des jeunes devront changer d’école. Ce sera toute une gymnastique pour ne pas nuire à leur cheminement académique.»
«Chose certaine, je n’aimerais pas être dans les souliers de la Ligue en ce moment», a laissé tomber le président des Voltigeurs.
Dollar-loisir et craintes sanitaires
La crise actuelle aura aussi des impacts financiers importants chez les commanditaires des Voltigeurs, ce qui signifiera d’autres pertes de revenus pour l’organisation. Il en va de même pour les amateurs de hockey junior, parmi lesquels on retrouve plusieurs nouveaux chômeurs.
«Au-delà des Voltigeurs, tout le monde a pris une méchante débarque dans la société. Ce sera à nous d’être prêts quand le hockey va recommencer. Le dollar-loisir, c’est un dollar-émotion : ce sera à nous de ramener cette équation dans l’imaginaire des gens. Il faudra être créatifs pour donner le goût à nos partisans de revenir à l’aréna. On a de gros défis devant nous», a admis Éric Verrier.
D’autres partisans pourraient également être réticents à l’idée de s’entasser au Centre Marcel-Dionne par peur d’être contaminés par le coronavirus. Une situation qui pourrait perdurer tant et aussi longtemps qu’un vaccin ne sera pas disponible.
«Probablement que les gens vont avoir des craintes. Le retour à l’aréna se fera sans doute progressivement. Est-ce qu’on pourrait respecter la distance sécuritaire de deux mètres en laissant deux sièges libres entre chaque partisan? C’est une hypothèse valable, mais c’est le gouvernement qui va avoir le dernier mot. D’ici là, on pourra tirer des leçons du déconfinement en Europe», a soulevé Éric Verrier.
«Comme tout le monde, on est dans le néant. La Ligue nous informe, mais il y a beaucoup d’inconnu. On essaie d’être proactifs. On se prépare pour l’après-crise», a conclu celui qui occupe le siège de président depuis maintenant 16 ans, de loin le plus long règne dans l’histoire de la concession née en 1982.