COMMUNAUTÉ. Face à l’augmentation du nombre de demandes de contestations, l’Association des bibliothèques publiques du Québec et la Bibliothèque et Archives nationales du Québec ont préparé et proposé un projet de motion pour la liberté intellectuelle en bibliothèques publiques. Drummondville est l’une des premières municipalités à rejoindre le mouvement.
Jean-François Fortin est bien connu à Drummondville comme étant le chef de division de la bibliothèque publique. Depuis le mois d’avril dernier, il est également le président du conseil d’administration de l’Association des bibliothèques publiques du Québec.
Ce dernier observe que le nombre de demandes de contestations augmente à travers la province. Il y a des usagers qui pointent du doigt des conférences ou des activités, tandis que d’autres effectuent des demandes de retrait ou de reclassement d’ouvrages.
Résultat : certaines situations de censure, de restrictions ou de jugements peuvent faire craindre pour l’avenir et la mission fondamentale des établissements culturels, constate Jean-François Fortin.
C’est que les bibliothèques publiques ont pour mission d’offrir à la population une diversité de savoirs et d’œuvres dans le but de nourrir leur curiosité intellectuelle.
«On s’assure de mettre à la disposition des gens des informations fiables et vérifiées. Dans certains documents, il y a des opinions, des biais, des points de vue, mais on présente tout le temps les deux côtés de la médaille», soutient-il.
Un protocole à suivre
À Drummondville, les plaintes et les demandes de retrait à la bibliothèque publique sont traitées selon un protocole précis, en lien avec la politique de gestion et de développement des collections.
«Les gens ont le droit d’exprimer leur opinion. Par contre, on veut une demande écrite. On s’engage à faire un processus d’évaluation. Tout dépendant de la suite de l’analyse, on voit s’il y a une action qui est posée ou s’il n’y en a pas. Dans tous les cas, il y a un suivi avec la personne», explique-t-il.
Concrètement, le nombre de demandes de retrait reste stable à Drummondville, informe Jean-François Fortin. «Ailleurs, notamment aux États-Unis et dans le reste du Canada, il y a des augmentations considérables. Souvent, les tendances partent du sud et finissent par arriver ici quelques années plus tard.»
En février dernier, une candidate républicaine, au poste de secrétaire d’État du Missouri, a brûlé au lance-flamme un livre québécois traitant de questions liées à la sexualité.
Cet ouvrage, intitulé Tout nu!, est entre autres disponible à l’édifice Francine-Ruest-Jutras. «Souvent, ces contenus vont être identifiés comme étant sexuellement explicites. C’est de l’éducation à la sexualité qui est pour les adolescents.»
«C’est une spécialiste en la matière et une autrice reconnue qui a écrit le livre. Il a été traduit en anglais et il est présent dans toutes les collections de bibliothèques du Québec. J’espère qu’il est dans les écoles aussi avec une section identifiée. C’est une ressource qui est importante pour nos adolescents», affirme Jean-François Fortin.
La sensibilisation à la diversité (genre, orientation sexuelle ou origine), les contextes historiques, les questions d’âge et l’incitation au suicide suscitent également la controverse.
Notons que la bibliothèque publique de la rue des Forges effectue une évaluation de la collection en continu. Plus de 250 000 documents en font partie.
À la défense de la liberté intellectuelle
L’Association des bibliothèques publiques du Québec et la Bibliothèque et Archives nationales du Québec, appuyé par le Réseau BIBLIO du Québec, encouragent les municipalités à adopter la motion pour la liberté intellectuelle en bibliothèques publiques.
La Ville de Drummondville a décidé de se joindre au mouvement, lors de la séance du conseil municipal du 21 octobre.
«On s’est fait une grille d’évaluation pour s’assurer de garder la liberté des bibliothèques publiques pour que les citoyens puissent chercher des ouvrages qui leur conviennent, sur lesquels ils veulent avoir de l’information. C’est dans ce contexte-là qu’on appuie la liberté intellectuelle des bibliothèques publiques», a dit la mairesse Stéphanie Lacoste.
Le tout est bien accueilli de la part de Jean-François Fortin. «Ça nous rappelle que notre rôle est important et reconnu par l’organisation. C’est vraiment un témoignage de confiance et un appui important pour la suite des choses», exprime-t-il, en précisant que Drummondville fait partie des premières municipalités à adopter la motion.
Pour les intéressés, une conférence intitulée Des sensibilités, des droits, une bibliothèque est offerte gratuitement à la bibliothèque publique, le 28 novembre, sous réservation. Mathilde Barraband, conférencière et professeure universitaire, abordera les grands principes qui guident la liberté d’expression.