MAGAZINE. Le Musée de la photographie n’aurait pas pu trouver un meilleur ambassadeur pour compléter son conseil d’administration. Depuis quelques années déjà, Luc Courchesne, un artiste respecté et respectable qui participe à l’émergence des arts médiatiques et numériques, fait partie de ceux qui se donnent le défi d’amener l’institution drummondvilloise à un autre niveau.
Lauréat du prestigieux Prix Paul-Émile-Borduas en 2019, Luc Courchesne a été professeur à l’école de design industriel de l’Université de Montréal. Son curriculum vitae est impressionnant. Depuis déjà quatre ans, il investit temps et énergie au Musée de la photographie Desjardins.
«La petite histoire de mon implication au musée est assez amusante. Quand je vivais à Drummondville, de 12 à 17 ans, des amis et moi avions convaincu nos parents de nous laisser faire un voyage en Europe à la fin du secondaire avec nos sacs à dos. Nous sommes partis en août 1970. En 2020, on a souligné le 50e anniversaire de ce voyage au cours duquel d’ailleurs j’ai acheté ma première caméra. Aux retrouvailles, il y avait Jean Côté, qui est le vice-président du conseil d’administration du Musée. Il m’a parlé du musée. Et je suis devenu administrateur», raconte M. Courchesne.
Quand cet artiste parle de la photographie, on sent à quel point cet art est imprégné en lui, qu’il a été important tout au long de sa carrière.
«Quand on fait une photo, on redécouvre souvent les choses d’une autre façon. On prend le temps d’observer les détails, de les recadrer. La photo est la base de ma pratique. D’ailleurs, la collection du musée est exceptionnelle dans l’argentique. Elle se compare à de grandes collections dans le monde», souligne-t-il.
À ses yeux, le Musée de la photographie mérite d’être reconnu à sa juste valeur. Le conseil d’administration se donne d’ailleurs l’objectif de convaincre le ministère de la Culture et des Communications de délivrer l’agrément qui fera de ce lieu un véritable musée éligible à tout un éventail de programme de subventions. On cible l’année 2025 pour y parvenir.
«Il n’y a aucune raison pour que ce musée n’obtienne pas une reconnaissance nationale et même internationale, insiste M. Courchesne au bout du fil. On tient quelque chose à Drummondville. C’est unique au monde et c’est une opportunité. Vous savez, la photographie rend hommage à l’art de l’entrepreneuriat. Il y a un sens d’avoir un tel musée localement. On a beaucoup d’ambition. On veut construire un musée de niveau international. L’idée est de faire de Drummondville un pôle culturel, une destination», insiste-t-il.
Au cours des derniers mois, beaucoup d’effort a été consacré à l’amélioration de la salle d’exposition. Les appareils ont été classés par date et déposés sur de jolis présentoirs. La grande majorité est fonctionnelle, malgré leur âge vénérable.
«Chaque appareil-photo invente quelque chose de nouveau ou débloque quelque chose qui est déjà inventé. C’est une technologie qui n’arrête pas d’évoluer. On est presque capable maintenant de se téléporter à l’intérieur d’une image à distance! On capture ce qui existe. La collection du musée s’arrêtait avec les caméras argentiques. Maintenant, on a décidé de poursuivre avec le numérique. C’est incroyable, car il n’y a jamais eu autant de caméras dans le monde. Dans notre mission du musée, ce sera très important d’en tenir compte», ajoute Luc Courchesne.
Inspiré par son père
Âgé de 72 ans et vivant aujourd’hui à Montréal et à Sutton, Luc Courchesne a grandi jusqu’à l’âge de 12 ans à Saint-Léonard d’Aston. Il a vécu son adolescence à Drummondville. Il a notamment fréquenté l’école Jean-Raimbault.
«J’ai été très inspiré par mon père qui était un homme d’affaires. J’ai vite compris que si je voulais quelque chose qu’il fallait que je m’organise pour l’avoir. Il n’y a rien de gratuit dans la vie. Mon père a commencé à travailler dans les petites fromageries. Ensuite, il est devenu plombier puis il a créé son entreprise dans la ventilation. Il m’a montré l’importance de créer son chemin. J’ai choisi l’art plutôt que la gestion», dit celui qui se définit comme un artiste-inventeur.
Ainsi, Luc Courchesne a réalisé que les petits pas font les grands parcours. Il a obtenu un baccalauréat en design du Nova Scotia College of Art and Design en 1974. Dix ans plus tard, il a réussi une maîtrise en science des études visuelles du Massachussets Institute of Technology puis il est devenu professeur à l’École de design de l’Université de Montréal de 1989 à 2013. Il en a été directeur pendant cinq années.
Luc Courchesne se démarque par son approche de la photographie panoramique et sphérique. Parmi ses réalisations en design, mentionnons le système de signalisation des parcs du Québec, toujours en usage après plus de 40 ans, ainsi que son sac Boule, breveté en 1976 et en production ininterrompue depuis. En muséographie, l’installation multimédia qu’il a créée pour le lieu historique national Louis-S.-Saint-Laurent en 1982 est présentée sans interruption depuis et classée au patrimoine historique canadien.
Inventeur, il conçoit et brevette en 2000 le Panoscope 360°, un dispositif de projection panoramique. Couplé aux moteurs graphiques temps réel développés pour l’industrie du jeu vidéo, son dispositif permettant d’entrer dans un espace 3D dynamique a inspiré les concepteurs du film Star Trek en 2009.
À l’Université de Montréal, il a créé le Laboratoire de muséographie, lequel a permis d’ouvrir la voie aux pratiques contemporaines du design d’interaction et d’expérience en collaboration avec des institutions culturelles et scientifiques québécoises.
Ses idées à court terme pour le musée
- Proposer aux jeunes des camps estivaux sur la photographie
- Améliorer l’accueil
- Organiser des causeries avec des photographes de renom
- Intéresser des mécènes à la photographie, au fait qu’il s’agit de l’art de l’entrepreneuriat
- Inviter la communauté drummondvilloise à soutenir le musée
- Convaincre le gouvernement du Québec de délivrer l’agrément d’institution muséale