SOCCER. Le jour n’est peut-être pas si loin où l’on verra Pierre-Luc Lauzière arbitrer un match aux Jeux olympiques ou à la Coupe du monde de soccer. À 38 ans, le Drummondvillois vit pleinement son rêve en tant qu’officiel sur la scène professionnelle et internationale.
Après une longue carrière dans le milieu de l’enseignement, Pierre-Luc Lauzière en est à sa troisième saison comme arbitre à temps plein dans la Ligue majeure de soccer (MLS). Chaque semaine, il se déplace aux quatre coins de l’Amérique du Nord pour arbitrer des matchs. Un horaire chargé au quart de tour à travers lequel il est également appelé à officier des parties sur la scène canadienne et internationale.
«C’est un métier où on est toujours sur la route, à voyager de ville en ville et parfois de pays en pays, raconte Pierre-Luc Lauzière alors qu’il se prépare à monter dans l’avion en direction de Washington. Je donne souvent l’exemple des équipes, qui jouent 50 % de leurs matchs à domicile. Moi, 100 % de mes matchs sont sur la route. C’est beaucoup de temps loin de la maison, même si j’essaie toujours de revenir le plus rapidement possible.»
«Le plus difficile, c’est de rater des moments familiaux, ajoute le père de deux enfants. C’est hyper challengeant pour moi, mais aussi pour ma femme. Heureusement, mes parents nous aident beaucoup. Et quand les matchs sont proches, comme à Montréal ou à Boston, ma famille vient parfois me voir.»
À travers cette vie mouvementée, le membre de l’Organisation des arbitres professionnels (PRO) doit aussi jongler avec son sommeil, sa nutrition et son entraînement.
«Ton outil de travail, c’est ton corps. Il faut que tu en prennes soin. Il faut bien dormir malgré le décalage horaire. Il faut trouver le temps de s’entraîner et de bien manger. Ça prend énormément de discipline. C’est la réalité du métier», affirme celui qui arbitrera bientôt son 50e match en carrière dans la MLS.
La partie de son travail qui le passionne le plus? Les 90 minutes d’action passées sur le terrain, répond immédiatement Pierre-Luc Lauzière.
«C’est vraiment la partie elle-même qui est la plus passionnante. J’aime ça relever des défis. J’aime ça aussi être placé dans des environnements plus hostiles. J’aime le sentiment que ça apporte en dedans, même si c’est dur à exprimer. On se dit : «Let’s go, je suis capable! On le fait!» On s’en va vivre une expérience incroyable pendant 90 minutes. Lorsque ça se passe bien, on est content et on s’en va la tête haute.»
Très exigeant envers lui-même, Pierre-Luc Lauzière ne cache pas être affecté quand les choses ne se déroulent pas à son goût.
«Ça arrive qu’on fasse des erreurs coûteuses. Parfois, on peut aussi être malchanceux. Je vais parler pour moi, mais je me mets beaucoup de pression pour livrer de bonnes performances. Je veux livrer la marchandise, mais malgré toute notre préparation et nos efforts, on se trompe parfois. Ce côté-là est plus dur mentalement. Quand je fais une erreur, je trouve ça difficile à avaler. J’essaie toujours de trouver des solutions», explique celui qui participe chaque mois à un camp de quatre jours réunissant les arbitres de la MLS à Dallas.
«On est très bien encadrés. On a toute l’aide nécessaire pour bien performer, mais au bout de la ligne, c’est toi qui dois faire le travail.»
Avec le temps, la préparation devient plus simple pour le Drummondvillois, qui en vient à bien connaître les joueurs et les équipes de la MLS. Chaque semaine, il étudie les matchs des clubs qu’il s’apprête à arbitrer.
«Je veux m’assurer de ne rien manquer. Je me prépare de la même façon qu’un coach va préparer ses joueurs. La première chose que je regarde, c’est la stratégie principale de l’équipe. Est-ce qu’ils jouent en mettant beaucoup de pression vers l’avant ou en jouant avec la possession du ballon à partir du gardien de but? Ça va influencer beaucoup la façon dont je vais me déplacer sur le terrain. Je veux éviter d’être dans le jeu, tout en ayant un bon angle de vue sur l’action. L’objectif, c’est que je sois capable d’anticiper ce qui peut arriver dans le match pour être bien positionné afin de prendre la bonne décision.»
L’homme au sifflet prend également le temps d’observer les athlètes, qui peuvent accumuler certaines frustrations d’un match à l’autre. «Si un joueur a tendance à aller se faire justice lui-même, je dois garder un œil sur lui. Je dois être prêt à anticiper ce qui va arriver.»
À deux reprises, Pierre-Luc Lauzière a eu l’occasion de côtoyer l’étoile internationale Lionel Messi en tant que quatrième officiel. La première fois, c’était en finale du tournoi de la coupe des Ligues, dans un stade plein à craquer à Nashville.
«L’ambiance était complètement débile. Il y avait beaucoup de talent sur le terrain. C’était une expérience mémorable. Tout s’est bien passé. Et après ce match-là, personne n’a parlé de l’arbitrage. Ça rend l’expérience encore plus agréable.»
Confronté à la critique
Confronté aux critiques des joueurs, des entraîneurs, des spectateurs et des journalistes, un arbitre professionnel doit savoir garder son sang-froid dans les situations les plus corsées.
«La critique la plus difficile, elle vient de moi-même, soutient Pierre-Luc Lauzière. Celle des joueurs ou des coachs, je ne leur en tiens jamais rigueur. La critique de mes patrons, qui ont arbitré au plus haut niveau international, j’y porte beaucoup d’attention, parce qu’ils ont réussi là où je veux réussir», affirme celui qui se passionne pour ce rôle depuis l’âge de 14 ans.
Malheureusement, certains partisans dépassent les bornes en envoyant des messages haineux aux arbitres sur les médias sociaux. «C’est la seule partie négative dans cette job. Il y a du monde qui perd son temps à nous écrire en privé pour attaquer la personne et même la famille.»
Parmi ses inspirations, Pierre-Luc Lauzière cite l’Albertain Drew Fischer, l’un des trois Canadiens choisis pour arbitrer aux Jeux olympiques de Paris.
«À chaque étape de ma carrière, il y a des gens différents qui m’ont aidé. On est dans un monde de compétitions où tout le monde essaie de s’améliorer, mais entre arbitres, l’esprit de compétition est assez sain. Quand un nouveau arrive, il me pousse à être meilleur, et de mon côté, je sais que je pousse d’autres gens à devenir meilleurs également.»
Figurant sur la liste d’arbitres de la Fédération internationale de football (FIFA) depuis 2021, Pierre-Luc Lauzière a officié trois finales de la Confédération de soccer d’Amérique du Nord, d’Amérique centrale et des Caraïbes (CONCACAF) l’an dernier. Dernièrement, il a aussi arbitré un match de qualification pour la Coupe du monde de 2026. Le Drummondvillois veut continuer de gravir les échelons sur la scène internationale.
«Dans ce milieu-là, il y a beaucoup de choses qu’on ne contrôle pas. Une fois que tu le comprends et que tu l’acceptes, c’est plus simple et plus sain. Je ne me mets donc pas trop de pression de ce côté-là. J’essaie de donner mon 100 % dans ma préparation et lors des matchs, puis il adviendra ce qu’il adviendra. J’aimerais vraiment ça arbitrer aux Jeux olympiques, à la Coupe du monde ou dans une autre compétition internationale, mais ça ne m’empêche pas de dormir le soir.»
À travers ce rythme de vie effréné où il est aussi appelé à former la prochaine génération d’arbitres canadiens, l’ex-professeur à l’école Jeanne-Mance n’a pas le temps de s’ennuyer de son ancienne vie. «Enseigner l’éducation physique, c’est la plus belle job qui existe, mais en ce moment, je n’ai pas l’impression de travailler. J’ai simplement l’impression de vivre ma passion tous les jours.»
Préparant déjà son après-carrière, Pierre-Luc Lauzière retournera sur les bancs d’école à l’automne afin d’étudier en management du sport. Celui qui s’implique au sein du conseil d’administration des Dragons souhaite éventuellement devenir gestionnaire dans le milieu du soccer.
D’ici là, Pierre-Luc Lauzière n’est toutefois pas prêt à ranger son sifflet. Le passionné souhaite poursuivre cette aventure tant que son corps lui permettra et que ses performances seront à la hauteur.
«Mon objectif, c’est de continuer pendant encore dix ans. Pour y arriver, il faut que je sois capable de suivre le rythme des matchs. C’est pourquoi j’axe beaucoup mes entraînements sur la vitesse», conclut celui qui s’entraîne à l’Institut du guerrier.
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