DRUMMONDVILLE. Le Comptoir alimentaire Drummond tire la sonnette d’alarme. Incapable de fournir des denrées à la population dans le besoin d’ici la fin de l’année, l’organisme réclame une aide financière minimum de 120 000 $.
La directrice générale du Comptoir alimentaire Drummond, Véronique Sawyer, ne cache pas le fait que la situation est difficile. Elle affirme que le stock de nourriture non périssable récolté grâce à la dernière guignolée, censée les aider jusqu’en septembre, est épuisé.
Avec les demandes grandissantes d’immigrants qui ont recours à l’organisme, ses réserves seront entièrement écoulées d’ici le début de l’été. Ils devront racheter des aliments. «On reçoit beaucoup de demandeurs d’asile et des travailleurs étrangers avec des permis fermés qui ont perdu leur emploi», précise-t-elle.
Selon les chiffres fournis par le Comptoir alimentaire Drummond, ce sont 3558 demandes de dépannage qui ont été faites dans la dernière année contre 1807 l’année précédente. Il s’agit d’une augmentation de 96,9 %.
Selon son bilan annuel de 2023-2024, 26 % des ménages aidés étaient issus de l’immigration. De plus, 14 % des ménages étaient des demandeurs d’asile et des travailleurs étrangers (avec permis fermé) ayant perdu leur emploi.
Véronique Sawyer explique que des immigrants demandent jusqu’à 12 dépannages, soit la limite accordée par ménage par l’organisme. «Cette semaine, on a commencé à retourner des gens en leur expliquant qu’on a fait tout ce qu’on pouvait. J’aimerais ça continuer de les aider, mais j’ai une capacité limitée, autant en personnel qu’en denrées», soutient-elle.
Difficile pour le personnel
La directrice générale poursuit en précisant que la situation est déchirante pour son moral et celui de ses employés, surtout lorsqu’il s’agit d’annoncer à des personnes qu’ils ne peuvent plus rien faire pour les aider. «Un immigrant nous a même dit : « Je ne pensais pas que ça serait comme ça au Canada.” Il était déçu et désillusionné», souligne-t-elle.
La barrière de la langue complique également les échanges avec certaines personnes. Des employés sont obligés d’utiliser des logiciels de traduction pour communiquer avec des gens qui ne parlent ni le français, ni l’anglais, ni même l’espagnol.
Véronique Sawyer explique que, contrairement aux réfugiés, par manque de moyens dans la région, les membres du personnel se retrouvent parfois même à aider des travailleurs temporaires et des demandeurs d’asile dans leur demande pour obtenir un permis de travail ou pour les aider financièrement avec leur budget de loyer.
Tenir jusqu’à la fin de l’année
Se sentant à bout de ressources, Mme Sawyer a décidé de rédiger le 22 avril dernier une lettre aux élus et aux représentants locaux dans laquelle elle réclame ni plus ni moins une aide financière de 120 000 $. Ce montant rétroactif lui permettra de passer à travers les prochains mois «si la situation ne va pas en s’empirant». Pour le moment, l’organisme peut compter sur ses ententes avec des distributeurs pour faire des achats à grand volume, selon Mme Sawyer.
«C’est certain qu’on aimerait quelque chose pour tenir le reste de l’année, explique Véronique Sawyer. Jusqu’à présent, les demandeurs d’asile continuent d’affluer. De plus, il y a un ralentissement économique qui entraîne la mise à pied des derniers travailleurs recrutés et ces gens sont souvent les travailleurs étrangers avec permis fermés. S’il y en a plus qui viennent nous voir, alors ça nous demande plus de temps, plus d’énergie et plus de denrées.»
La directrice générale aimerait que les élus travaillent tous de concert avec le Comptoir alimentaire pour trouver un moyen de les aider. Elle propose, par exemple, d’octroyer rapidement aux travailleurs étrangers un permis ouvert à ceux qui ont perdu leur emploi et ne possèdent qu’un permis fermé.
«Dans le cas des travailleurs avec permis fermé ayant perdu leur emploi, c’est facile de dire : « On va leur donner un billet d’avion pour qu’ils rentrent chez eux ». Le problème, c’est qu’ils ne veulent pas rentrer chez eux. Quand je leur parle, ils m’expliquent qu’ils veulent juste vivre mieux et espèrent faire venir leur famille pour qu’ils ne vivent pas dans la pauvreté. Et c’est totalement légitime», exprime-t-elle.
Le Comptoir alimentaire Drummond a également demandé de l’aide auprès de Centraide du Grand Montréal pour recevoir de l’argent venant du fond d’urgence pour les demandeurs d’asile. L’organisme aurait rejeté la demande parce que l’argent, reçu par le gouvernement provincial, est déjà écoulé et distribué.