Un regard nouveau sur le territoire

Photo de Emmanuelle LeBlond
Par Emmanuelle LeBlond
Un regard nouveau sur le territoire
L’artiste française Karine Bonneval propose d’écouter le sol par l’entremise d’une installation sonore. (Photo : Ghyslain Bergeron)

CULTURE. L’exposition La carte n’est pas le territoire, présentée à la Fondation Grantham pour l’art et l’environnement, propose de repenser notre rapport au sol.

La carte n’est pas le territoire est une exposition de Karine Bonneval, artiste française, et de Mériol Lehmann, artiste né en Suisse et vivant au Québec depuis 40 ans.

Réunies à la Fondation Grantham, les œuvres inédites des deux artistes instaurent un dialogue sur la fragile écologie des sols. L’exposition invite à considérer le sol comme un espace vécu, l’hôte d’une multitude d’organismes vivants et le porteur d’une mémoire affective.

Chacune des deux installations tente de combler un écart entre les outils cartographiques qui découpent et synthétisent les milieux de manière abstraite, et la richesse des écosystèmes.

Toucher terre

L’artiste française Karine Bonneval est allée à la rencontre des élèves du GARAF. (Photo: Emmanuelle LeBlond)

Avez-vous déjà écouté la vie qui grouille sous vos pieds? C’est ce que propose l’installation sonore Toucher terre de Karine Bonneval. La réalisation de cette œuvre est le fruit d’une résidence de création qui s’est tenue l’été dernier à la Fondation Grantham.

L’artiste française a parcouru le Centre-du-Québec pour aller à la rencontre de ses habitants. Un total de 97 personnes, issues de toutes les générations, ont croisé son chemin. «C’est un grand privilège en tant qu’artiste de pouvoir partager un projet avec les gens. Mon meilleur souvenir est avec celui du Cercle de fermières de Saint-Lucien. Il y avait une dizaine de personnes. Je suis restée pendant quatre heures», se remémore-t-elle.

En juillet dernier, L’Express est allé à la rencontre de Karine Bonneval, en compagnie des élèves du GARAF. Les participants étaient invités à «écouter la terre» grâce aux outils bioacoustiques de l’artiste. Collemboles, vers de terre, larves, cloportes, nématodes : le sol fourmillait de vie.

Une fois les enregistrements complétés, Karine Bonneval a prélevé un échantillon de la terre. Le but? Réaliser des portraits de sol grâce à la chromatographie. Cette méthode permet d’analyser les différentes matières présentes dans la terre.

Les portraits de sol ont été réalisés grâce à la chromatographie. (Photo: Ghyslain Bergeron)

L’installation sonore Toucher terre dresse un portrait sonore et visuel du territoire. Six tapis de laine naturelle, qui s’inspire des cartes pédologiques de la région, sont disposés dans l’espace. Chacun d’entre eux représente un milieu naturel, tel que les forêts, les bords de rivière, le jardin, les cultures vivrières, les prairies et les champs. Les portraits de sol émergent sous forme de champignons. À tendant l’oreille, il est possible d’écouter différentes séquences sonores.

Les visiteurs sont invités à s’asseoir sur les tapis pour s’imprégner de la vie souterraine. «Le sol est quelque chose qui nous est étranger. En même temps c’est quelque chose de magnifique, d’unique et de très précieux. Il faut en prendre soin. En écoutant cette diversité, on a envie d’y prêter attention.»

Deux appareils sonores ont été installés dans l’espace d’exposition. On peut écouter différents témoignages des participants.

De nos champs s’élèvent poussières

Quant à lui, l’artiste Mériol Lehmann s’intéresse à la représentation de la ruralité.

«Dans la façon dont l’agriculture est présentée aux citadins, il y a une déconnexion avec la réalité du territoire. On nous propose une agriculture qui date des années 50 qui ne tient pas compte des immenses transformations qu’il a eu dans les 70 dernières années», indique celui qui a passé son enfance sur une ferme laitière.

Mériol Lehmann se penche sur l’érosion des sols arables des basses-terres du Saint-Laurent. (Photo: Ghyslain Bergeron)

L’agriculture productiviste a eu un impact important sur le territoire, notamment par la diminution des fermes, le changement des cultures, l’arrivée des monocultures et l’arrivée des élevages hors du sol.

Résultat : le paysage rural québécois a changé. C’est ce que l’artiste met en lumière à travers ses œuvres. Dans l’espace d’exposition, les spectateurs peuvent admirer une installation photographique qui se penche sur l’érosion des sols arables des basses-terres du Saint-Laurent.

Mériol Lehmann illustre cette réalité sans jugement. «L’idée n’est pas de lancer la pierre aux agriculteurs, mais plutôt de présenter de manière assez objective ce qu’ils font.»

Éveiller la population face à l’agriculture contemporaine, telle est la mission de l’artiste. «J’espère que les gens qui vont venir voir l’exposition vont se sentir plus interpellés par les enjeux de l’agriculture et qui vont s’y intéresser», dit-il, en encourageant les consommateurs à soutenir une agriculture locale et responsable.

La carte n’est pas le territoire est présentée jusqu’au 9 juin à la Fondation Grantham. L’entrée est gratuite, mais il est nécessaire de réserver une plage horaire pour visiter l’exposition.

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