DRUMMONDVILLE. Située sur la rue Rocheleau à Drummondville depuis plus de vingt-cinq ans, l’entreprise Innergy Tech fermera ses portes d’ici la fin de l’année. L’ensemble de sa production sera transférée aux États-Unis.
La nouvelle a été «difficile à encaisser, mais n’est pas surprenante» selon une employée qui a accepté de s’adresser à L’Express. Elle compte plus de quinze ans de service au sein de cette entreprise spécialisée dans la fabrication d’échangeurs d’air et de récupération de chaleur dédiés au secteur résidentiel et commercial. Les 70 employés en fabriquaient des milliers chaque année. Dès cette semaine, une cellule de production sera mise à l’arrêt puis rapatriée vers le pays de l’Oncle Sam.
«Le transfert de la production se fera graduellement dans deux de nos compagnies sœurs du côté américain (Madison Industries). Le bâtiment où nous travaillons est loué. Nos activités cesseront donc à la fin du bail, à la fin de l’année 2024», fait savoir notre source.
Tout comme la production qui s’effritera étape par étape, les employés aussi quitteront le bercail d’une manière graduelle. Plusieurs sont d’ailleurs déjà partis : des ingénieurs, des dessinateurs tout comme des employés de production.
«En novembre dernier, l’entreprise a remercié cinq ou six personnes, dont le directeur général. Ça nous a mis la puce à l’oreille, nous disant que quelque chose clochait. On sait très bien que l’économie tourne au ralenti actuellement. On nous a expliqué que les usines aux États-Unis manquaient d’ouvrage. C’est pour ça que l’entreprise a décidé d’y envoyer notre production même si nous sommes rentables et performants à Drummondville», ajoute l’employée.
Étant aussi une entreprise sœur de Venmar Broan NuTone (Drummondville), Innergy Tech assure que «l’annonce de sa fermeture ne les concerne pas du tout pour l’instant.»
«Ça touche cependant nos fournisseurs avec qui on faisait affaire localement. Pour la prochaine année, les Américains souhaitent continuer de travailler avec ceux-ci, mais on s’entend pour dire que ce serait plus simple pour eux de commander les pièces qu’ils auront besoin près de leurs usines de fabrication», précise-t-on.
Selon son site Web, Innergy Tech distribuait ses produits dans plus de 20 pays à travers le monde. Elle a déménagé trois fois au cours de son existence afin de répondre à la forte demande.
Le bâtiment de la rue Rocheleau, déjà mis à louer, occupe une superficie de 41 000 pieds carrés.
Une année difficile
La fermeture de l’usine Innergy Tech de Drummondville a résonné chez Drummond économique. Le directeur général Gerry Gagnon fait observer que l’année 2023 s’est avérée particulièrement rude pour les entrepreneurs. Et ce n’est pas fini.
«On ne peut pas faire l’autruche : l’année 2023 a été marquée par un taux d’inflation élevé et des taux d’intérêt élevés qui ont créé des ralentissements dans certains projets. Quand on parle aux entreprises ces temps-ci, elles nous disent qu’elles ne sont pas dans le trouble, qu’elles sont bien capitalisées, mais que la dernière année a entraîné bel et bien des répercussions. En ce moment, les carnets de commandes sont un peu plus petits, mais les entreprises roulent quand même», indique M. Gagnon qui estime toutefois que la fermeture d’Innergy Tech est davantage liée à une «décision de logistique».
Il fonde par ailleurs de l’espoir envers la Banque du Canada qui pourrait éventuellement baisser son taux directeur.
«Ça pourrait insuffler dans l’économie un peu plus d’énergie, croit-il. Les projets qui ont été mis temporairement sur la glace pourraient repartir. On pourra anticiper à ce moment-là une reprise au cours de l’année 2024 et 2025. Il faut rester optimiste. Rien n’annonce un arrêt brusque, d’autant plus que l’économie américaine va bien et que nous sommes l’un de leurs grands fournisseurs externes.»
Ombre au tableau : les guerres entraînent également des perturbations au niveau des chaînes d’approvisionnement et créent de l’insécurité au point de vue économique.
«Tout ça crée des conditions pas toujours faciles et nous rappelle à quel point l’entrepreneuriat local est un élément important du développement économique. C’est notre pain et notre beurre. Une entreprise d’ici va rarement se délocaliser de cette façon. Chez Drummond économique, notre façon de parer à ça est de générer plusieurs nouvelles entreprises vigoureuses ici même à Drummondville. D’ailleurs, on peut se targuer d’avoir plusieurs fleurons chez nous», a conclu M. Gagnon.