TÉMOIGNAGE. Impliqué dans un grave accident de la route, Henrik Lajoie dénonce que la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) refuse de reconnaître son traumatisme craniocérébral léger (TCCL) et de lui verser les indemnités auxquelles il considère avoir droit.
La vie de Henrik Lajoie a basculé le 19 avril 2022. Après une journée de travail comme charpentier-menuisier, l’homme a été impliqué dans une collision de type face-à-face en voiture. Il dit avoir subi trois impacts, mais il ne se souvient que du premier. Lorsqu’il a repris connaissance, il a été capable de s’extirper de sa voiture. Il a été transporté à l’hôpital où on lui a diagnostiqué une fracture du sternum.
«J’ai obtenu mon congé la soirée même. On m’a fait un scan cervical qui n’a pas montré d’anévrisme. J’étais tellement sur l’adrénaline à l’hôpital que je ne présentais pas de symptômes de blessure crânienne selon les médecins. Avec la fracture, j’ai été forcé de tout faire tranquillement pendant des semaines. C’est quand j’ai été capable de bouger un peu plus que les symptômes de TCCL sont apparus. Ça a pris cinq mois pour avoir le diagnostic officiel», a raconté le Drummondvillois de 33 ans.
Les médecins ont découvert une lésion de six millimètres à son cerveau qui affecte le nerf optique de l’œil gauche. Cela lui occasionne des étourdissements lors de certaines actions, sa vision est embrouillée et il n’arrive plus à se concentrer sur une tâche de façon prolongée. De plus, son cœur a aussi souffert des séquelles du traumatisme. Ses médecins l’ont donc envoyé consulter des spécialistes à la Clinique Cortex, à Québec, qui ont confirmé le diagnostic et proposé certains traitements.
Cependant, lorsque le diagnostic a été transmis à la SAAQ, elle a refusé de le reconnaître, dit M. Lajoie. D’un autre côté, les symptômes reliés au TCCL étaient acceptés, ajoute-t-il.
«Dès qu’elle refuse un diagnostic, la SAAQ n’indemnise pas. Elle n’a rien payé pour mes traitements à Québec. Je dois débourser tous les frais de déplacement, le prix des consultations avec les spécialistes et sans compter ma mère qui devait rater du travail parce que je ne pouvais pas conduire. J’ai aussi des assurances personnelles qui ont refusé de m’indemniser parce que je devais l’être par la SAAQ. Celle-ci n’a rien fait pour m’aider depuis l’accident», a-t-il déploré.
Dur coup
Le jeudi 29 juin à 15 h 30, M. Lajoie a reçu un appel de la SAAQ qu’il n’a pu prendre immédiatement. En moins de cinq minutes, il a écouté le message vocal et a tenté de rappeler l’employée en vain, puisque celle-ci avait déjà quitté le bureau pour la longue fin de semaine. Dans ce message, on l’a informé que la SAAQ cessait, de façon immédiate, le versement de toutes indemnités puisqu’il est jugé apte à retourner au travail en raison de la guérison de sa fracture.
«Ça a été complètement inhumain de me l’annoncer de cette façon. J’attends de rencontrer un psychologue depuis avril 2022, que je n’ai toujours pas vu d’ailleurs. Ces gens, à la SAAQ, n’ont aucune idée de mon état psychologique. J’ai l’impression que je ne suis rien pour eux. Je leur ai dit que de laisser un message comme ça à une personne démolie, c’est l’équivalent de lui donner une corde», a dit M. Lajoie qui a vécu une séparation après l’accident.
«La SAAQ m’a détruit de A à Z»
Voyant la santé mentale de son fils se détériorer, Linda Desnoyers a pris les choses en main. Elle a contacté près de 80 psychologues. Seulement 10 ont répondu à son courriel, dont huit qui ont affirmé se tenir loin des dossiers de la SAAQ.
«Notre priorité a toujours été d’offrir à Henrik les soins dont il a besoin. À ce moment-là, Henrik était en détresse. J’ai fait ces démarches parce que je craignais de retrouver mon gars n’importe où», a appuyé Mme Desnoyers, la gorge nouée.
«La SAAQ m’a détruit de A à Z. Le 29 juin, ils ont ruiné l’espoir que j’avais de m’en sortir dans un délai raisonnable. Ça m’a pris trois semaines à me remettre de cet appel. Pour moi, c’est inconcevable ce qu’ils m’ont fait», a témoigné le fils.
L’indemnité versée par la SAAQ représentait 90 % du salaire qu’il empochait comme charpentier-menuisier. «Je me suis retrouvé avec rien du jour au lendemain. Je ne peux pas aller travailler ailleurs parce que personne ne va m’engager avec mon diagnostic, mes symptômes et les pauses que je dois prendre pour me remettre», a signifié Henrik Lajoie.
Par chance, le gouvernement fédéral lui verse un montant à l’aide de l’assurance-emploi. Une situation qui l’amuse par son invraisemblance. Ce dernier reçoit aussi un petit soutien financier de sa mère et son frère pour couvrir une partie des frais médicaux.
Bataille légale
Depuis, Henrik, aidé par sa mère Linda Desnoyers, tente d’obtenir l’aide financière à laquelle il estime avoir droit. Ils font appel, depuis près d’un an, aux services d’un avocat spécialisé en dossiers impliquant la SAAQ. Étant donné l’état de santé de Henrik, la mère a pris en charge la gestion du dossier clérical.
«Les démarches contre la SAAQ exigent un dossier lourd; heureusement que je m’y connais en la matière. La SAAQ a refusé tous les traitements de Henrik et notre avocat les a contestés», a dit Linda Desnoyers qui travaille comme technicienne administrative.
Afin de couvrir une partie des frais légaux et médicaux, elle a lancé une campagne de financement sur la plateforme GoFundMe. «Chaque expert médical que Henrik rencontre vient avec une facture de plus de 2 000 $. Notre priorité est de trouver les traitements nécessaires. J’ai lancé le GoFundMe pour nous aider à payer l’essentiel des frais médicaux. Actuellement, on s’attend à des frais d’avocat de plusieurs milliers de dollars», a détaillé Mme Desnoyers.
«Nous avons parlé avec d’autres personnes qui ont vécu des situations semblables avec la SAAQ. Chacun d’entre eux a dû mettre des milliers de dollars en frais d’avocats pour se battre contre notre Société d’assurance automobile», a poursuivi le fils.
Dans l’éventualité où Henrik Lajoie remporterait sa cause contre la SAAQ, il recevrait, de façon rétroactive, les indemnités salariales qui lui ont été initialement refusées.
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