LITTÉRATURE. Tristesse, colère, frustration, déception. Virginie Bisson et Sarah Milette ont passé à travers une gamme d’émotions dans leur parcours en fertilité. Alors que plusieurs femmes souffrent en silence, elles ont accepté de raconter une partie de leur histoire afin d’ouvrir le dialogue sur le sujet.
En apparence, Virginie Bisson a une vie parfaite. Elle est en couple avec son conjoint Jean-Simon depuis huit ans. Ils habitent dans une maison neuve à Drummondville. La designer cuisiniste de métier excelle dans son travail.
Pourtant, tout n’est pas si rose. Depuis maintenant cinq ans, le couple tente par tous les moyens d’avoir un enfant. Celle qui rêve de fonder une famille est freinée par des problèmes de fertilité. «On dirait que ma vie a été mise sur pause», soutient celle qui est âgée de 28 ans.
C’est au début de la vingtaine que Virginie Bisson a fait le choix d’arrêter de prendre la pilule contraceptive, alors qu’elle avait de fortes migraines. «Ça faisait trois ans que j’étais avec mon copain quand on a commencé les essais. Je venais de finir l’école. On commençait une construction de maison. On a décidé de se lancer.»
Les mois se sont écoulés, sans résultat concluant. Deux ans plus tard, la situation était toujours la même.
La Drummondvilloise a débuté, bien malgré elle, un parcours en procréation insistée. Elle s’est tournée vers une clinique en fertilité. «Je n’acceptais pas de ne pas réussir seule. Je ne voulais pas prendre d’hormones. Je ne voulais pas faire d’inséminations. J’ai une phobie des aiguilles. C’était hors de question que j’aie une fécondation in vitro», soutient celle qui a dû affronter ses peurs.
Prête à tout, Virginie Bisson a eu recours à neuf inséminations. Chaque tentative a été éprouvante pour la jeune femme. Elle ressentait de la douleur physique, tout en étant épuisée mentalement.
Habitée par une détermination sans limites, elle a approché une clinique privée située à l’extérieur de Drummondville. «J’ai fait une fécondation in vitro. Je devais prendre 12 médicaments et j’avais de trois à quatre injections d’hormones dans le ventre par jour. À la fin du processus, j’ai juste eu un embryon final. Mon transfert n’a pas fonctionné malheureusement.»
La nouvelle a été dure à encaisser. Virginie Bisson a sombré dans la dépression. Une fois remise sur pied, elle a poursuivi ses démarches en fertilité. «Après ça, je suis retombée en fécondation in vitro. J’ai dû payer de ma poche. En deux mois, ça nous a coûté 12 000 $. J’ai eu deux transferts d’embryon. Ça n’a toujours pas fonctionné. Il me reste trois embryons en ce moment au congélateur.»
Celle qui a un diagnostic d’infertilité inexpliquée n’a jamais baissé les bras, malgré les échecs répétés. «C’est vraiment comme des montagnes russes. Je continue d’espérer à chaque cycle menstruel. Quand je tombe dans ma semaine, je braille ma vie. Et je recommence. C’est comme ça tous les mois. Chaque fois que je vois un test négatif, je pogne un mur. Je continue quand même.»
À travers cette aventure, Virginie Bisson peut compter sur l’appui de Sarah, une personne qu’elle a connue à l’école secondaire, avec qui elle a repris contact.
Au fil des discussions, les deux femmes ont réalisé qu’elles vivaient une réalité semblable.
Un petit miracle
Sarah Milette a un parcours différent en fertilité. Une fois son stérilet retiré, la Drummondvilloise a constaté des irrégularités dans son cycle menstruel. Elle a aussitôt consulté un gynécologue. «Ma mère et ma sœur ont eu des difficultés à concevoir. J’avais déjà une puce à l’oreille, celle de ne pas tenir la fertilité pour acquise», indique la technicienne en éducation spécialisée.
Le couple s’est rendu compte qu’il vivait une double problématique. Alors que Sarah est atteinte du syndrome des ovaires polykystiques, son conjoint Maxime produit un nombre de spermatozoïdes inférieur à la moyenne. «On s’est fait dire que ça serait probablement impossible d’avoir un enfant naturellement.»
Au total, Sarah Milette a eu sept inséminations. Les déceptions s’accumulaient; le moral se détériorait. «Ça crée excessivement d’anxiété de performance sur des éléments que je ne contrôle pas. On augmentait mes doses de médication. On faisait des échographies et des suivis plus serrés. Malgré tout, mon corps ne répondait pas davantage. Au final, j’étais impuissante.»
Le couple a tenté sa chance avec la fécondation in vitro. «Je suis passée de 34 ovules ponctionnés à quatre embryons, fait-elle savoir. À mon premier transfert, j’ai eu la chance incroyable de voir une ligne sur le test de grossesse. Je suis tombée enceinte.»
Les réjouissances n’ont pas été de longues durées. Malheureusement, Sarah Milette n’a pas entendu le cœur de l’embryon à l’échographie de viabilité. Sa grossesse s’est interrompue à la fin de la cinquième semaine. «Sur le coup, je n’étais même pas capable de pleurer. J’étais juste sous le choc», commente celle qui a dû prendre de la médication pour provoquer une fausse couche.
Au plus grand bonheur du couple, le deuxième transfert d’embryon a été fructueux. Une seconde grossesse s’est amorcée.
Durant le processus, les parents ont appris que leur fille Eugénie est atteinte de la trisomie 21. Ils ont fait le choix de garder le bébé. «J’étais confiante qu’on puisse offrir une qualité de vie à cet enfant», affirme celle qui travaille avec une clientèle ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme.
Témoigner à cœur ouvert
L’éditrice et auteure Kate Lalic a fait un appel à tous à l’intention de femmes intéressées à raconter leur parcours en fertilité. Les Drummondvilloises ont répondu présentes en s’engageant à écrire un chapitre dans le livre.
L’égo de l’infertilité est un collectif qui rassemble les histoires de neuf femmes qui proviennent de partout à travers le Québec. L’objectif de l’éditrice était de créer une communauté d’entraide autour de l’infertilité, tout en mettant en lumière l’aspect de la santé mentale.
Pour sa part, Sarah Milette souhaite ouvrir le dialogue dans le but de briser le tabou. «Chaque fois que j’en parle, je réalise que je ne suis jamais seule, mentionne-t-elle, en précisant que l’infertilité touche un couple sur six au Canada. Plusieurs personnes restent dans le silence. Ça me faisait plaisir de raconter mon histoire. J’ai trouvé ça libérateur.»
Quant à elle, Virginie Bisson encourage les femmes à s’exprimer à leur tour. «Il va avoir un signet dans le livre où les gens vont pouvoir scanner un code et écrire leur propre histoire.»
Le recueil, publié aux Éditions JED Lab, est disponible en prévente. Sa sortie est prévue le vendredi 1er septembre.
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