COMMUNAUTÉ. Le Comptoir alimentaire Drummond est confronté à une hausse de 25 % des demandes d’aide depuis le printemps dernier, ce qui représente 200 bouches supplémentaires à nourrir par mois. Cueillette des denrées, préparation des repas, confection des paniers, distribution alimentaire : l’équipe n’a pas le temps de chômer.
Il est à peine 9 h et tous les départements de la banque alimentaire sont déjà à l’œuvre. Employés et bénévoles se mobilisent afin d’accomplir une mission commune, celle de soulager la faim des personnes et des familles démunies de la MRC de Drummond.
En cuisine, les membres de la brigade s’activent derrière les fourneaux, dans un esprit de solidarité, de fraternité et de partage. La responsable de la transformation alimentaire, Isabelle Gignac, se promène entre les stations. Elle s’assure du bon fonctionnement de l’équipe.
La cuisinière de formation joue un rôle clé dans la brigade. «C’est moi qui sors les recettes. Je ne peux pas trop planifier à l’avance. Tout dépend des aliments qui arrivent. Je dois souvent me virer sur un dix cennes», indique-t-elle, en précisant qu’ils produisent 2000 livres de mets préparés par mois.
Pendant que certains préparent le potage, d’autres transvident dans des contenants les repas qui ont été cuisinés la veille. Même si la journée s’annonce chargée, les tâches sont effectuées dans la légèreté. «C’est tout le temps drôle. On tisse des liens entre nous. Isabelle est plus qu’une collègue de travail, c’est une amie», soutient le bénévole Jean-Maurice Riel, alors qu’il est en train d’étiqueter les produits.
Juste à côté, Louise Robert montre à sa camarade les différentes façons de couper des légumes. La retraitée a longtemps travaillé dans le domaine de la restauration et elle adore transmettre ses connaissances. «J’aime partager des techniques de base qui permettent d’acquérir de la vitesse et de la dextérité. Par exemple, pour stabiliser une planche à découper, il suffit de mettre un linge mouillé en dessous», explique la bénévole.
Tous les jours, une cueillette est effectuée chez les marchands épiciers et les entreprises alimentaires qui donnent leurs denrées non commercialisables, mais comestibles. Au total, il y a 21 points de récupération à travers le territoire.
Ce matin-là, la récolte a été fructueuse. À l’arrivée du camion, l’équipe de la banque alimentaire donne un coup de main pour décharger la marchandise, provenant de l’épicerie IGA située sur le boulevard Saint-Joseph et celle sur le boulevard Foucault, du Métro sur le boulevard Lemire, le Walmart ainsi que le Marché Bouvette à Saint-Cyrille-de-Wendover. L’hôpital Sainte-Croix a également donné les restants des soupers de la veille.
Le contenu des boîtes est pesé, trié et classé avec efficacité. Il n’y a rien qui s’accumule. Le rythme de travail est fluide.
Dans une pièce voisine, les bénévoles s’affairent à remplir les paniers. Chaque commande est personnalisée. Les dépannages alimentaires contiennent des produits frais et non périssables, des mets préparés ainsi que des produits d’hygiène et d’entretien.
Derrière le comptoir, les usagers font la rencontre de Sylvain Manseau, un employé qui s’occupe de la distribution. Ce dernier a un contact privilégié avec la clientèle. «Une fois, c’était la fête d’un garçon de cinq ans et on lui a donné un gâteau de Naruto. Il a sauté de joie. Ça a donné le sourire à tout le monde. Ce sont des moments magiques», se remémore-t-il, avec entrain.
Les citoyens qui utilisent les services du Comptoir alimentaire de Drummond ont des profils variés. Ils sont tous rencontrés par des intervenants, question de déterminer leurs besoins.
Pour sa part, Marie-Pier Lambert a approché l’organisme en juillet dernier, alors que ses dettes s’accumulaient. «Quand j’étais enceinte, j’étais caissière chez Maxi. Je savais que les produits qui n’étaient pas vendus se retrouvaient ici. Ma réalité a changé et maintenant, c’est moi qui ai besoin de ce service, raconte celle qui est âgée de 31 ans. J’ai eu un déclic quand j’ai voulu ouvrir une poubelle extérieure d’un restaurant pour me nourrir. J’ai réalisé que j’avais besoin d’aide.»
Répondre à la demande
Les besoins alimentaires ont explosé sur le territoire de la MRC de Drummond, fait savoir la directrice générale Véronique Sawyer. «Avant, on avait surtout des personnes seules. Et là, on a plus de gens en couple ou de familles. On nourrit plus de personnes. Ça fait des dépannages plus gros.»
La hausse est attribuable à plusieurs facteurs, soit la pandémie, le prix des aliments, les salaires qui ne suivent pas les coûts de la vie et l’accessibilité à des logements abordables.
En ce sens, Véronique Sawyer éprouve quelques inquiétudes. «On n’a plus de marge de manœuvre. Il y a cinq ans, on les rencontrait dans notre bureau et on constatait que le loyer prenait une grande portion du budget. On les conseillait fortement de regarder pour un loyer moins cher. Maintenant, ce n’est plus une alternative.»
«Il y a de plus en plus de gens qui sont à risque d’itinérance. Ils se retrouvent avec un loyer trop cher pour leur budget. Même si on les aide au niveau de l’alimentation, ils s’endettent à nouveau», poursuit-elle.
Toutes les urgences alimentaires sont traitées dans les temps, mais l’organisme a de la difficulté à respecter l’échéancier pour les rendez-vous hebdomadaires. «Nous avons besoin d’argent pour bonifier nos ressources humaines et assurer la stabilité de notre équipe», souligne Véronique Sawyer. Pour répondre à la demande actuelle, le Comptoir alimentaire Drummond doit embaucher deux intervenants supplémentaires.
En ce sens, le centre d’aide sollicite les paliers gouvernementaux afin qu’ils rehaussent les subventions accordées. Rappelons que le financement en provenance des gouvernements provincial et fédéral représentent environ 17 % du budget total de la banque alimentaire.