CULTURE. En collaboration avec l’Orchestre symphonique de Drummondville (OSD), Catherine Varvaro a rendu un vibrant hommage à Alma Mahler, compositrice et épouse du célèbre compositeur Gustav Mahler, lors de la première représentation du concert Illumine la nuit: la symphonie illustrée présenté jeudi à la Maison des arts.
Les spectateurs ont été transportés dans l’univers d’Alma Mahler, grâce à la projection d’un roman graphique imaginé par Catherine Varvaro, timbalière de l’OSD, et conçu par l’illustratrice Pauline Stive. Une quarantaine de musiciens, dirigés par le chef d’orchestre, Julien Proulx, ont joué la Symphonie numéro 5 de Gustav Mahler ainsi que deux œuvres d’Alma Malher. La soliste invitée Rose Naggar-Tremblay a également montré l’étendue de son talent.
Illumine la nuit a retracé les moments marquants de la vie d’Alma Mahler. Cultivée, musicienne, belle, intelligente, indépendante d’esprit, elle a fait sa place dans le milieu de la musique classique, en se destinant à une carrière en composition. Du haut de ses 22 ans, la jeune femme s’est mariée à Gustav Malher. Par ce geste, elle a accepté de renoncer à ses propres aspirations artistiques, faisant une croix sur ses rêves de grandeur.
Au fil de la représentation, les illustrations se sont succédé, tantôt avec dynamisme, tantôt avec douceur, en suivant le rythme de la musique. À travers les chapitres, le public a pris conscience du dévouement sans bornes d’Alma Mahler. Le ménage. Le lavage. La cuisine. Les tâches domestiques se multipliaient pour celle qui assumait le rôle de maîtresse de maison, tout en étant mère de famille. Pendant ce temps, Gustav Mahler a poursuivi son travail musical, à la conquête du succès. Lorsqu’il planchait sur ses compositions, Alma était toujours derrière lui, en le supportant et le conseillant.
Postée en régie, Catherine Varvaro contrôlait manuellement les images à l’aide d’un logiciel de projection. Pas moins de 800 illustrations ont défilé sur l’écran géant. La magie a opéré.
Un travail colossal
Catherine Varvaro a traversé une tonne d’émotions, jeudi soir. Elle attendait le déploiement du roman graphique avec impatience. «Ça représente beaucoup pour moi. C’est une grande étape dans ma vie de créer quelque chose de cette envergure et de le voir sur la scène», commente-t-elle.
Cette passionnée de musique travaille sur ce projet depuis maintenant trois ans. L’idée mijote depuis longtemps dans sa tête. «La Symphonie numéro 5 de Gustav Mahler m’interpelle beaucoup. C’est l’une des premières pièces que j’ai jouées avec l’orchestre de l’université. Elle a une place spéciale dans mon cœur, soutient-elle. La musique de Mahler est très complexe. Je voulais trouver une manière de la rendre plus accessible et de la démystifier. Je me suis dit que je pourrais ajouter des images, raconter une histoire. C’est là que j’ai trouvé le roman graphique.»
Pendant la pandémie de COVID-19, la musicienne s’est retrouvée sans concert. Elle a profité de ce temps d’arrêt pour mettre son projet sur papier. «Ça a été tout un processus. J’ai travaillé en collaboration avec une illustratrice. J’écrivais l’histoire et elle interprétait mes mots pour en faire des dessins. Le plus gros défi était de trouver un langage commun.»
Pour ce faire, Catherine Varvaro a fait plusieurs recherches à propos de Gustav Mahler. Au fil de ses lectures, elle a été touchée par l’histoire d’Alma Mahler.
«Je voulais mettre de l’avant son travail de soutien pour permettre à son mari de composer ses chefs-d’œuvre. C’est elle qui a assuré la pérennité de sa musique. Elle a insisté pour qu’elle soit jouée et publiée. C’est vraiment grâce à Alma qu’on a encore accès aux compositions de Gustav», indique-t-elle.
Selon elle, la place des femmes dans la musique classique a évolué depuis la fin du 19e siècle, mais «il y a encore du chemin à faire». «Dans les grands orchestres professionnels, il y a un ratio plus élevé d’hommes que de femmes. En cours de route, les femmes s’éliminent pour avoir un travail plus flexible pour s’occuper des enfants. Ça reste un milieu masculin.»
Dans tous les cas, Catherine Varvaro s’est réjoui d’avoir pu partager le fruit de son travail avec le public drummondvillois. Maintenant, elle n’a plus qu’un souhait : faire rayonner le projet à l’international.