MAGAZINE. Nicolas Champagne a passé ses deux derniers étés reclu dans le bois, à planter de jeunes pousses pour renouveler les forêts du Québec. Cette année, il repousse ses limites pour la troisième fois, pour son plus grand bonheur.
«Plus la saison avance, moins j’ai d’énergie et plus j’ai mal partout», souligne en souriant le planteur d’expérience. Pour lui, bien que son travail d’été soit éprouvant physiquement et mentalement, il n’est pas question d’arrêter ou de changer de branche. Il adore passer la période estivale en nature.
Concrètement, Nicolas travaille entre cinq et six jours par semaine. Quotidiennement, il plante en moyenne 3500 arbres. Pour chacun d’eux, il reçoit 18 sous. Il est aussi logé et nourri. «Mes chefs d’équipe m’amènent des arbres [qui ont presque 30 centimètres] sur le bord du chemin, je prends les arbres, je les mets dans mes sacs. Je pars avec ma pelle et je plante tous les arbres», explique l’homme de 20 ans qui transporte dans les trois gros sacs autour de sa taille près de 180 arbres.
Lorsqu’il travaille, Nicolas n’a pas le temps de jaser avec ses collègues. De toute façon, ils sont tellement dispersés que ce ne serait pas possible. Chaque planteur s’occupe d’un hectare par jour en plantant une jeune pousse aux deux mètres.
Le jeune homme passe donc de 12 à 13 heures par jour avec lui-même. «Dans ta tête, tu es confronté à toi-même. Il y a des journées qui fait beaucoup trop chaud, d’autres qui fait vraiment froid avec de la pluie. Peu importe, tu plantes, tu n’as pas le choix. Ça ne te tente plus et tu t’assoies, tu n’es pas payé tout simplement», témoigne celui qui essaie année après année de faire le plus de semaines possible afin de dépasser ses limites.
Selon lui, la première année est toujours la plus difficile. Pourtant, il s’agit de son plus bel été. «La première année, c’est clairement le plus bel été que j’ai eu de ma vie pour l’instant. Je n’avais jamais eu un aussi bel été. Les fins de semaine là-bas, c’est du monde qui sont là pour relaxer et s’amuser. Tu t’en fous de lâcher ton fou avec eux», souligne Nicolas avec enthousiasme.
Pendant les jours de congé, l’équipe d’une dizaine de planteurs part faire du camping dans le bois près d’une rivière. Ils font des feux, ils pêchent et ils passent du temps tous ensemble.
Durant les deux dernières années, l’autre élément que Nicolas a particulièrement apprécié, c’est le fait de décrocher complètement. «C’est quand tu décroches un été au complet que tu réalises qu’on est dans une société stressante. C’est là que tu vois que le stress est autour de nous, et on ne le voit même plus», soutient celui qui, aujourd’hui, décroche le plus souvent possible.
Pour Nicolas, le sentiment de devoir accompli, le dépassement de soi tout au long de l’été et les souvenirs estivaux sont des éléments qu’il se rappellera toute sa vie. «Ça va être trois années que je vais pouvoir dire à mes enfants que j’ai fait ça quand j’étais jeune», indique-t-il avec fierté.
Le futur étudiant universitaire a appris une grande leçon au cours des dernières années. «C’est toi la limite. Si tu continues à travailler, il n’y a rien qui t’arrête, c’est la plus grande chose que j’ai apprise là-dedans», termine celui qui songe peut-être à revenir une dernière fois alors qu’il devait clore ce chapitre de sa vie cette année.
Pour ceux et celles qui souhaitent vivre cette expérience, le meilleur conseil de ce planteur d’expérience est de contacter une personne qui l’a déjà fait pour connaitre les trucs et astuces de celui-ci.