SANTÉ. Un couple de Drummondville a vécu une nuit particulièrement angoissante le week-end dernier. Après deux appels logés au 911, aucune ambulance ne s’est pointée à sa rescousse, faute de véhicule disponible.
À la fin de la soirée du 30 juillet dernier, Rafaël Quessada a commencé à ressentir une intense douleur au ventre. Il en fait part à sa conjointe, qui prend l’initiative de composer le 811 pour parler à une infirmière. Au terme d’une conversation d’environ 30 minutes, cette dernière lui suggère fortement de raccrocher et d’appeler les services d’urgence.
«J’ai composé le 911 à 1 h 12 du matin. C’était la première fois que je faisais ça. J’ai dit à la préposée que mon conjoint était très malade. Il était couché au sol, dans le corridor, il criait et il se tordait de douleur. J’ai demandé une ambulance. L’appel a duré deux minutes», raconte Nancy Dussault. L’état de santé de son conjoint se dégradant de minute en minute – et n’ayant pas de nouvelles des services d’urgence – elle décide, à 1 h 45, de contacter à nouveau le 911 pour insister. «L’appel n’a duré que 50 secondes. On m’a dit qu’il manquait de personnel, qu’il n’y avait pas d’ambulance disponible à Drummondville puis ç’a raccroché. J’aurais aimé au moins que quelqu’un reste au bout du fil pour m’accompagner», poursuit-elle.
Rongée par l’inquiétude, Mme Dussault décide de contacter un ami pour qu’il vienne à la rescousse. «Il est arrivé chez moi en quelques minutes, malgré qu’on était aux petites heures du matin», exprime-t-elle, encore ébranlée par cet événement.
«Ça fait plus de dix ans que je connais Rafaël et je ne l’ai jamais entendu se plaindre. De le voir en souffrance comme ça, c’était clair que c’était grave», lance Stéphane Lanteigne, l’ami en question.
Avec difficulté, ce dernier a réussi l’installer dans sa voiture pour le transporter à l’hôpital. «Ce n’était pas facile. Rafaël fait quand même six pieds et pèse 250 livres», dit-il.
À l’hôpital Sainte-Croix, aucun agent de sécurité ou préposé n’était disponible pour les aider à transporter le patient à l’intérieur. «Ça m’a vraiment fâché, déjà que Nancy s’était fait dire qu’il n’y avait pas d’ambulance. Il a fallu s’organiser tout seul encore une fois. Une chance, une fois à l’urgence, le personnel s’est rapidement occupé de Rafaël. Il a reçu d’excellents soins. Ces gens-là sont très dévoués», informe M. Lanteigne, sous le regard approbatif de celui qui a été hospitalisé plus de 24 heures.
C’est d’ailleurs par une infirmière que le trio a appris qu’une des deux ambulances disponibles avait été affectée à un transport interhospitalier au cours de la soirée, réduisant de moitié les possibilités d’obtenir un service rapidement.
Rafaël Quessada a souffert d’une violente crise de pierres à un rein. «Il avait tellement mal que ça aurait pu être n’importe quoi. Aujourd’hui, je me sens tellement inquiète pour les gens qui vivent seuls ou les personnes âgées. Qu’est-ce qu’ils auraient fait dans cette situation? Qui les aurait amenés à l’hôpital alors qu’il n’y avait pas d’ambulance en ville et qui les aurait fait entrer à l’intérieur de l’hôpital», se questionne Mme Dussault, qui vit sur la rue Leclerc à Drummondville.
Couverture ambulancière «problématique»
Francis Brisebois, coordonnateur aux communications chez Dessercom, confirme que les deux ambulances assurant la couverture de nuit du territoire drummondvillois étaient affectées ailleurs au moment de l’appel du couple Dussault-Quessada. «Nos deux véhicules étaient occupés cette nuit-là. Mais en cas de besoin, des ambulances en périphérie peuvent intervenir à Drummondville. C’est le cas de Pierreville et de Richmond qui agissent en tant que zones de relève», informe-t-il.
Selon ce dernier, c’est le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec qui établit le nombre d’ambulances nécessaires pour assurer la couverture d’un point de service. À Drummondville, seuls deux véhicules sont en service la nuit, un nombre qui s’avère insuffisant.
«On a fait beaucoup de représentation à ce sujet. Ça fait partie de nos priorités chez Dessercom. Il y a plusieurs endroits problématiques en ce moment au Québec, dont Drummondville. On aimerait minimalement qu’il y ait une ambulance de plus sur 24 heures. On remarque par ailleurs à travers le Québec une hausse des signalements, notamment à cause de la pandémie et du vieillissement de la population. Le dossier a été déposé au CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec. Reste la décision du ministère», informe M. Brisebois.
Le porte-parole souligne par ailleurs que les services ambulanciers, de façon générale, composent avec une pénurie de personnel.
«Cela fait en sorte qu’on a beaucoup de difficulté avec les vacances estivales. La pandémie a aussi été très difficile pour notre personnel. Dans le cas qui nous occupe cependant, j’ai de la difficulté à faire le lien avec le manque de ressources humaines», fait-il savoir.
De son côté, le CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec informe qu’il commentera le dossier mercredi.
Ce n’est pas la première fois que la couverture ambulancière fait couler de l’encre à Drummondville. En février dernier, une dame de Drummondville a péri dans un incendie. Les pompiers ont tout fait pour la réanimer alors que l’ambulance est arrivée sur les lieux 40 minutes plus tard. L’entreprise Dessercom avait alors parlé d’un «concours de circonstance».