MAGAZINE. La vie. La mort. Les deux plus grands moments de l’existence humaine. À Drummondville, il existe des alternatives pour accompagner ceux qui débutent et terminent leur vie. Place à la découverte des doulas et… de leur sagesse.
Kate Petitclerc, 35 ans – doula, accompagnante à la naissance
Mme Petitclerc a fondé Concevoir, centre de ressources périnatales et familiales, il y a une dizaine d’années après avoir recouru à une clinique de fertilité dans l’espoir de devenir maman. C’est durant cette période qu’elle a ressenti le besoin d’humaniser tout ce qui touche à la naissance et à l’accompagnement. Depuis janvier 2020, elle dispose d’un pied à terre au centre-ville de Drummondville, sur la rue Heriot.
De concert avec une psychoéducatrice et une ostéopathe, elle offre une large gamme de services aux familles de la région. «Nous avons vraiment une approche multidisciplinaire, même interdisciplinaire», soutient Mme Petitclerc, qui est entourée de cinq professionnelles.
Le terme «doula» tire son origine des racines grecques. «Il signifie esclave au féminin. En réalité, c’est une femme au service d’une autre femme pendant une période charnière de sa vie, que ce soit les premières menstruations, la grossesse ou la périménopause», explique-t-elle.
Le rôle de l’accompagnante à la naissance est d’ailleurs très différent de celui d’une sage-femme, celle-ci étant une professionnelle du réseau de la santé habilitée à prendre en charge totalement un suivi de grossesse, un accouchement et un post-partum. L’accompagnante, quant à elle, agit d’une manière complémentaire au suivi médical. Elle offre un soutien objectif qui va permettre aux parents de prendre des décisions éclairées. Les femmes – et les familles – qui font appel à ses services ont ce souci de vouloir vivre une expérience différente. Un lien de confiance très fort les unit, que ce soit avant, pendant et après la naissance.
«Je reçois parfois des demandes de femmes qui ont vécu un traumatisme lors d’un accouchement. Elles veulent transformer une expérience négative en quelque chose de plus positif», exprime Kate Petitclerc, en ajoutant qu’elle accompagne aussi les femmes qui en sont à leur première grossesse.
Elle ajoute : «On connaît tellement bien les couples qu’à l’accouchement, on est capable de déceler de petites subtilités que parfois le corps médical ne voit pas, car c’est la première fois qu’il rencontre cette maman-là. Je pense notamment à une femme que j’ai accompagnée et qui a vécu une naissance très difficile. À son deuxième accouchement, juste à voir comment elle bougeait et qu’elle respirait, je savais qu’elle était en train de replonger dans le traumatisme du premier. J’ai pu l’aider en y parlant tranquillement, en mettant de la douceur dans cet événement si important.»
Parfois, l’accompagnante doit aussi soutenir les pères, qui sont là pour leur conjointe. «On est très caméléon. Quand on entre dans une chambre d’accouchement, on ne sait jamais ce qui va se passer. Il n’y en a pas deux pareils», lance Mme Petitclerc.
Concevoir offre une pléiade de services : cours et rencontres prénatales, cours de mise en forme prénataux, hypnodoula, danse naissance et préparation affective à la naissance. Lors du grand jour, l’accompagnante se déplace au lieu choisi que ce soit à l’hôpital, à la maison avec sage-femme ou à la maison de naissance.
Claude-Hélène Desrosiers, 43 ans – doula, accompagnatrice de fin de vie
Claude-Hélène Desrosiers a toujours eu l’amour des gens et le milieu communautaire tatoués sur le cœur. D’ailleurs, ses parents ont adopté douze enfants handicapés, leur offrant un univers bienveillant pour bien grandir, malgré leurs difficultés. «Certains avaient de grands besoins de santé et quelques-uns sont décédés. J’ai été confrontée à la mort assez jeune. Ça m’a ouvert aussi à la différence», met-elle en contexte.
Après avoir étudié en communication et travaillé pour des organismes de charité, comme la Fondation Beaudoin-Desrosiers et l’Association Emmanuel, Mme Desrosiers a décidé de tirer un trait sur ce travail pour devenir une accompagnatrice de fin de vie, la seule à Drummondville, sous toutes réserves. Sa bougie d’allumage a été les décès presque simultanés de ses grands-mères.
«Elles sont décédées il y a quatre ans dans des conditions opposées. Ma grand-mère paternelle était à l’hôpital. Elle avait très peur de la mort. C’était difficile. Inversement, ma grand-mère maternelle a eu la chance d’aller à la Maison René-Verrier où elle était bien entourée. Elle était très sereine. Tout s’est fait en douceur. Sa mort a laissé une marque sur moi», partage-t-elle.
Durant leurs dernières semaines de vie, Claude-Hélène Desrosiers est allée fouiller dans la bibliothèque d’une de ses grands-mères.
«J’ai trouvé un livre sur la mort d’Elisabeth Kübler-Ross qui datait de la fin des années 1960. Il traitait de l’importance de l’environnement pour le mourant. C’est là que j’ai réalisé qu’en créant un environnement calme et paisible, je pouvais contribuer à ce que les gens aient une belle fin. J’ai mis en pratique certaines choses avec ma grand-mère et j’ai vu qu’elle se détendait. Elle est partie tout en douceur et j’ai trouvé ça magnifique», raconte Claude-Hélène Desrosiers.
De fil en aiguille, la Drummondvilloise a pris en charge sa destinée en s’inscrivant à un cours en ligne. Depuis décembre 2021, elle est en mesure d’offrir un service personnalisé aux gens en fin de vie, qui se traduit par un accompagnement portant sur la réflexion de la vie, la planification des derniers jours et l’aide aux proches lors du deuil. «Il y a une approche très spirituelle. On contribue au bien-être de la personne en fin de vie et de ses proches. On s’assure aussi de la dignité du mourant», résume-t-elle.
Elle ajoute : «On offre un espace sécuritaire où les gens peuvent vraiment être authentiques, car, parfois, les personnes en fin de vie s’inquiètent pour leurs proches et craignent d’alourdir leurs tâches. D’avoir une personne à leur côté, qui est là pour les guider sans être émotivement impliquée, aide beaucoup au niveau de la gestion des émotions. Ça leur permet de ressentir, de s’exprimer et parfois même de dénouer certains problèmes qui traînent depuis plusieurs années.»
Comme la doula de la naissance, Mme Desrosiers se déplace là où une personne en fin de vie a besoin d’elle, que ce soit à domicile, à l’hôpital ou en centre spécialisé. Dans tous les cas, l’humain est mis à l’avant-plan, lui assurant tout le respect qu’il mérite.