TRIBUNE LIBRE. Après avoir passé trente ans de ma vie professionnelle à l’hôpital Sainte-Croix, dont plus de 10 ans à un poste de direction, je ne peux pas demeurer indifférent à l’avenir des services hospitaliers à Drummondville, tel que prévu par madame Nathalie Boisvert, PDG adjointe au CIUSSSMCQ. Celle-ci propose la construction d’un nouvel hôpital à Drummondville d’ici 15-20 ans.
Il faut bien voir qu’au cours des prochaines années, la pénurie de main-d’oeuvre devrait s’accentuer. Le nombre de personnes de 75 ans doublera d’ici 15 ans tandis que les 85 ans tripleront en nombre durant cette même période et exigeront des services hospitaliers de plus en plus complexes. La croissance démographique de la population du Centre-du-Québec poursuivra son accélération. La position géographique et stratégique de
Drummondville, où plus de 500 000 personnes habitent à moins d’une heure de route, devrait favoriser Drummondville pour une offre privilégiée et facilitante des services hospitaliers.
Toutes ces réalités démontrent l’urgence d’agir et de se doter d’un centre hospitalier régional apte à répondre aux besoins d’une population de 250 000 personnes et de plus en plus en demande de soins. Attendre 15-20 ans, n’est pas une option.
Notre système de santé demande des réactions rapides, tant dans sa structure que dans son offre de services. Il est inquiétant de penser à une solution dans 15-20 ans ou encore à dépenser notre argent pour des travaux temporaires qui seront démolis à moyen terme.
Nos décideurs ont de grandes responsabilités pour nous soigner et nous garder en santé le plus longtemps possible.
Face aux constats de madame Boisvert, il m’apparaît qu’il y a trois solutions :
La première solution, soit celle de madame Boisvert, consiste à adopter la recette des fonctionnaires de Québec et de franchir les quelques 50 étapes du Plan fonctionnel et technique au cours des 25 à 30 prochaines années. Dans ce cas, nous devons nous astreindre au rythme des fonctionnaires et aux interventions politiques de toutes sortes.
C’est une solution qui vise à pousser le problème par en avant et à accepter une diminution graduelle des services.
La deuxième solution est plus politique et plus agressive. Elle oblige une rapidité d’actions et une implication de plusieurs intervenants. Au moins 7 étapes devraient être franchies d’ici juin 2023, par exemple :
- Mettre en place un comité interdisciplinaire à l’interne formé de médecins, d’infirmières et de professionnels en plus d’experts de haut calibre dans le but de concevoir un avant-projet pour un centre hospitalier régional du Centre-du-Québec dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre prolongée et de développement des techniques innovantes en santé;
- Demander à la Ville de Drummondville d’assurer le suivi politique de la mise en place du CHRCQ, comme la Ville l’a fait pour l’université;
- Réserver immédiatement un terrain pour le futur CHRCQ en collaboration avec la Ville de Drummondville (le terrain situé derrière l’ancien local de la SQ sur le boulevard Foucault me semble approprié à première vue);
- Inviter les élus provinciaux et fédéraux à se commettre pour la réalisation à court terme du CHRCQ (attention aux fausses promesses de M. Legault comme le CISSSCQ, il y a 4 ans);
- Solliciter une rencontre à Drummondville avec la réelle «boss» du réseau de la santé au Québec, soit la sous-ministre madame Dominique Savoie pour lui présenter tous les défis à surmonter et s’assurer de son aide, afin de doter notre population de services hospitaliers appropriés à notre région;
- S’assurer que la Fondation Ste-Croix-Hériot démarre rapidement un fonds spécial dédié à ce projet de nouveau centre hospitalier. Surtout, ne pas demander à la Fondation d’investir à court terme dans la rénovation des murs du vieux centre hospitalier actuel;
- Impliquer les gens d’affaires et la population du Centre-du-Québec dans la réalisation de ce projet en les informant régulièrement et en suscitant les groupes de pression politique en collaboration avec la Ville.
La dernière solution et malheureusement celle qui me semble la plus probable est celle qui amènerait l’hôpital de Drummondville à subir le même sort que l’hôpital de Nicolet par une décision du CIUSSSMCQ. C’est-à-dire nous ramener graduellement aux services d’un dispensaire où on retrouverait que les services hospitaliers de base. Tous les services secondaires et tertiaires seraient offerts par Trois-Rivières. Pour accoucher,
pour obtenir des services de chirurgie, de dialyse, de diagnostic, etc., il faudrait que la population de Drummondville se déplace vers Trois-Rivières, comme le CIUSSS MCQ a obligé les gens de Nicolet et de Bécancour, il y a quelques années.
Il faut être conscient qu’au cours des dernières années, plusieurs services hospitaliers ont été transférés de Drummondville vers Trois-Rivières sans aucune réaction de la population ou de nos députés. Ainsi la mise en place du dispensaire de Drummondville pourrait se poursuivre en toute tranquillité dans un contexte de rentabilité gouvernemental et permettrait enfin à Trois-Rivières de réaliser ses ambitions et de rivaliser avec Sherbrooke quant au volume de clientèle à desservir.
Vous croyez que je fabule? Gardez ce texte et relisez-le dans 10 ans…
Bonne chance madame Boisvert.
Pierre Levasseur Msc, démographe