MAGAZINE. Dans l’univers du spectacle, les artistes sont les premiers à briller en avant-plan. En amont, une poignée d’artisans sont présents pour propulser ces vedettes. Tapis dans l’ombre, les éclairagistes jouent un rôle méconnu auprès du public. Plein feux sur cette profession par l’entremise de Sylvain Carignan, un passionné qui cumule plusieurs années d’expérience dans le domaine.
À la Maison des arts, tout le monde connaît Sylvain Carignan. Il n’est ni chanteur, comédien ou humoriste. Encore mieux, il est chef éclairagiste. Il connaît tous les secrets de l’arrière-scène de la salle Léo-Paul-Therrien et il manie de main de maître la console d’éclairage. Quand un spectacle débarque à la Maison des arts, Sylvain Carignan est au rendez-vous.
«En tant que chef éclairagiste, je reçois le plan d’éclairage de l’artiste quelques semaines avant la représentation. Je regarde le plan et je regarde si on a tout le matériel. Je suis responsable d’une équipe qui va accrocher le plan d’éclairage avant l’arrivée de la production. Ça prend entre une heure et une heure trente pour installer l’équivalent d’une centaine de projecteurs. Ensuite, l’éclairagiste, qui est attitré à la tournée, arrive et on fait le focus», explique-t-il.
Contrairement à la pensée populaire, ce n’est pas tous les groupes de musique qui ont leur propre éclairagiste. Ainsi, régulièrement, Sylvain Carignan donne un coup de main à la console.
«Si on recule il y a dix ans, l’éclairagiste de salle pouvait éclairer un événement professionnel par mois. Maintenant, on est de plus en plus appelé à éclairer des spectacles. Ça a beaucoup changé. Sur trois représentations dans une semaine, je pouvais éclairer les trois», indique celui qui a dû s’adapter à ce rythme différent.
Des expériences formatrices
Sylvain Carignan a toujours été passionné par son métier, qu’il exerce depuis 30 ans. «Je suis natif de Montréal. J’ai fait de la musique à l’adolescence jusqu’à une trentaine d’années. La famille est arrivée. Ce n’était pas facile de vivre de la musique. Je me suis demandé ce que je pouvais faire en cherchant un domaine connexe. J’ai vu qu’il y avait un cours à Drummondville en enregistrement sonore. Je suis déménagé à Drummondville pour deux ans», explique celui qui a finalement décidé de s’établir au Centre-du-Québec.
À la fin de ses études, ce dernier a travaillé à titre de technicien en audiovisuel au Cégep de Drummondville pour finalement être le directeur technique de la salle de spectacle. «Je faisais beaucoup de sons et d’éclairage. C’est là que ça a basculé. Je devais choisir. J’ai senti que j’avais beaucoup plus de liberté créative dans l’éclairage que dans le son. J’ai décidé de me diriger vers la conception d’éclairage», raconte-t-il.
Au fil des années, Sylvain Carignan a accumulé beaucoup d’expériences, en étant entre autres éclairagiste-programmeur pour les Légendes Fantastiques et éclairagiste-programmateur et coconcepteur pour AO La Légende. Ce dernier a également assuré la conception de l’éclairage et la direction technique de D31 du 200e de la Ville de Drummondville.
Il y a cinq ans, le Drummondvillois a fait son entrée à la Maison des arts, à la recherche de défis. «Je suis habitué de travailler avec mes choses et avoir mon temps de programmation. J’allais aux répétitions. Je faisais des conceptions. C’est un travail de deux à trois mois. Je savais qu’en devenant chef éclairagiste à la Maison des arts, j’étais appelé à éclairer des spectacles en une journée. Je sortais vraiment de ma zone de confort.»
Sylvain Carignan a dû s’adapter à cette nouvelle réalité. «Après trois mois, je me suis dit que je n’allais pas être capable de créer aussi rapidement avec le stress du temps. L’heure avance constamment. C’était un saut dans le vide.»
Une fibre artistique développée
Après plusieurs spectacles à son actif, le stress s’est envolé pour laisser place au trac. Un sentiment qui est tout à fait normal, selon lui. «Quand le spectacle part, le trac s’en va. Je fais partie intégrante de la gang. L’une des plus grosses récompenses, c’est quand il y a une symbiose avec ce qu’il se passe sur scène. C’est ma paie. C’est magique. Mais ça n’arrive pas tous les jours», exprime-t-il.
Lorsque le rideau est levé, la créativité de l’éclairagiste est à son apogée. «En musique, l’éclairage va être plus au feeling. Je ne dis pas qu’il n’y a rien de programmé, mais l’éclairagiste va toujours faire de nouvelles choses chaque soir. Il va y aller à l’émotion de la chanson.»
Grâce à ses connaissances en musique, ce dernier peut se fier à son instinct. «Ce n’est pas une nécessité d’être musicien pour faire de l’éclairage. C’est un atout. Il y a des musiques complexes. Si tu n’as pas la partition et tu ne sais pas où est la fin, c’est rock and roll parfois. La musique n’est pas toujours en 4/4», soutient-il, en faisant référence à la mesure.
M. Carignan précise que les représentations de danse et de théâtre demandent une organisation différente. «On parle de programmations et de répétitions. On ne peut pas faire ça en une journée. C’est impossible.»
Dans tous les cas, le but commun est d’appuyer les faits et gestes des personnes sur la scène. «L’éclairage doit mettre en valeur l’artiste et ce qu’il se passe sur la scène. Les lumières sont censées renforcer le message.»
Tout est une question de nuance. «En éclairage, c’est facile d’en faire trop. Avant, c’était plus difficile parce qu’on n’avait pas les équipements. Les équipements aujourd’hui sont sophistiqués et c’est très facile de faire des ‘’feux d’artifice’’», soutient-il en précisant que le secret se trouve dans le dosage.
Même s’il est dans l’ombre, Sylvain Carignan assume pleinement sa position. Dans ses temps libres, il adore enseigner afin de partager ses connaissances. À son tour, il transmet la passion aux jeunes de la relève, où tout a commencé pour lui, au Cégep de Drummondville.