HOCKEY. Il y a un peu de Drummondville dans le championnat des Tigres de Victoriaville. Dans un rôle discret, mais important, l’entraîneur Sébastien Charpentier a été au cœur de l’étonnante épopée des Félins.
Fortement négligée des parieurs, la formation des Bois-Francs a surpris les puissants Foreurs de Val-d’Or en six parties en finale de la coupe du Président. Les Tigres ont concrétisé le deuxième championnat de leur histoire en arrachant une victoire de 3-2 en deuxième période de prolongation, samedi, au Centre Vidéotron.
Selon Sébastien Charpentier, c’est en se concentrant sur leur propre identité plutôt que sur les qualités des favoris que les Victoriavillois sont parvenus à faire mentir les experts. Au bout du compte, le travail acharné aura eu raison du talent brut.
«C’est cliché de répéter ça, mais c’est tellement facile de regarder de l’autre côté. Certains joueurs de Val-d’Or ont un statut au niveau international ou chez les professionnels. Il y avait de grosses pointures devant nous. C’était difficile d’essayer de bloquer ce bruit-là. Malgré tout, on a réussi à éviter ce piège», a expliqué l’homme de hockey de 44 ans, qui cumule les fonctions d’entraîneur-adjoint et de responsable des gardiens.
Les choses avaient pourtant mal commencé pour les Tigres. Après une dizaine de minutes dans cette finale, les Foreurs menaient 10-0 dans la colonne des tirs et 1-0 au tableau principal.
«Juste en se regardant sur le banc, sans dire un mot, on pensait tous la même chose. On se disait : « Wow! Qu’est-ce qu’on va devoir faire pour gagner un match? » Ça allait vite! Ils étaient partout sur la patinoire, mais tranquillement, on a pris le momentum», a raconté Charpentier.
«On a bien utilisé la pause entre les deux premières périodes pour se ressaisir. On avait regardé le spectacle en première, mais on était capable d’apporter des ajustements et de faire partie du spectacle nous aussi. Après avoir soutiré cette première victoire, on a toujours cru qu’on était capables de jouer avec eux.»
Un partenariat avec les joueurs
Obtenus en renfort sur le marché des transactions, les vétérans Alexis Arsenault, Shawn Element, Benjamin Tardif et Alex Beaucage ont joué un rôle central dans la conquête des Tigres.
«Ça va au-delà de ce qu’ils ont accompli sur la glace. Sans dire qu’ils ont transformé notre culture, parce qu’elle était déjà en train de s’implanter, ils sont venus compléter notre noyau de leaders. Dès leur arrivée, on a vu une étincelle dans le vestiaire. C’était facile de le remarquer, parce qu’on était toujours ensemble», a affirmé Charpentier, en faisant remarquer que l’équipe a passé 105 nuits à l’hôtel cette saison, incluant les 50 derniers jours dans la bulle de Québec.
Devant le filet, Nikolas Hurtubise a connu des moments exceptionnels, notamment lors du dernier duel. Le vétéran Fabio Iacobo a également eu son mot à dire dans cette conquête, notamment dans le troisième match de la finale, quand l’équipe a comblé un déficit de 3-0 pour l’emporter en prolongation. Dans le camp des Foreurs, le pilote Daniel Renaud a d’ailleurs identifié ce revers comme un tournant dans cette série.
«La situation de Fabio n’était pas évidente. Il a vécu des moments difficiles cette année, mais il était toujours là pour ses coéquipiers. Dans ce match, on n’avait rien à reprocher à Nikolas. L’équipe manquait de vie et d’énergie. Embarquer Fabio a été bon pour nous. Les gars le respectent. Ils se sont dit qu’ils ne pouvaient pas le laisser tomber comme ça. Il a fait quelques gros arrêts. Ce fut une victoire monumentale pour nous», a raconté Charpentier.
«Nikolas et Fabio ont connu des hauts et des bas, mais ils n’ont jamais lâché», a ajouté l’ex-gardien professionnel.
Charpentier a également souligné la complicité unissant le personnel d’entraîneurs des Tigres. Le trio tout centricois qu’il forme derrière le banc avec l’entraîneur-chef Carl Mallette et son associé Maxime Desruisseaux fait partie de la nouvelle génération d’instructeurs dans le hockey québécois.
«On est très proches de nos joueurs. Toute l’année, on a parlé de partnership avec eux. Il y avait une belle chimie et un beau respect non seulement entre nous, mais aussi avec le bureau administratif et le directeur général. On voulait que ça se reflète partout dans l’organisation, même avec nos partisans et la ville. Peu importe qui avait besoin d’aide, on était toujours être là pour s’aider et se supporter», a laissé entendre Charpentier.
«Dès le départ, on y a cru, a-t-il continué. On croyait en nos jeunes et on les poussait à devenir meilleurs à tous les jours. On a démontré à notre dg qu’il pouvait faire des échanges pour améliorer l’équipe. On n’est pas rentrés dans les séries à reculons. En bout de ligne, on a le sentiment qu’on a bien fait d’y croire dès le départ.»
Charpentier a néanmoins confié avoir eu un pincement au cœur pour les vétérans défenseurs Xavier Bernard et Thomas Pelletier, qu’il a côtoyés chez les Voltigeurs. Il a d’ailleurs pris le temps d’enlacer ses anciens protégés lors de la traditionnelle poignée de main.
«C’est un moment triste dans une carrière junior. Ils faisaient partie d’une belle équipe et ils y ont cru. C’est une fin abrupte pour eux. Quand tu fais de bonnes choses, tu te retrouves en position de gagner, mais c’est difficile d’aller chercher une coupe. Dans une carrière, on aura tous vécu plus de saisons décevantes que de championnats», a fait valoir celui qui a lui-même vécu l’amertume d’une défaite en finale de la LHJMQ comme joueur en 1995.
C’est en compagnie de ses proches que Sébastien Charpentier a savouré ce triomphe, sa conjointe Isabelle Chartrand ainsi que leurs deux filles le rejoignant pour célébrer sur la glace du Centre Vidéotron. «On a été éloignés très longtemps cette saison. Ce sont des choses que je n’avais pas vécues souvent durant ma carrière. C’était un défi supplémentaire, mais j’ai la chance d’être entouré par des personnes de qualité dans ma vie. Tout le monde s’entraide. Je suis vraiment choyé», a exprimé le natif de L’Avenir, en se disant renversé par la quantité de messages de félicitations reçus au cours des derniers jours.
Sous contrat avec les Tigres pour une autre saison, Sébastien Charpentier envisage-t-il de faire le saut comme entraîneur-chef dans la LHJMQ éventuellement?
«Depuis mes débuts dans le coaching, je ne me suis jamais mis d’ambitions, de buts ou d’objectifs précis. J’ai essayé plein de choses, du junior au collégial en passant par la France. J’ai un côté très curieux qui veut apprendre et toucher à tout dans le hockey. La saison prochaine, ce sera un défi différent. Ce sera probablement plus axé sur le développement des jeunes au début d’un nouveau cycle. Je ne peux pas dire pour l’instant comment l’histoire va se terminer», a conclu l’ex-responsable du programme hockey du Collège Saint-Bernard.