COMMENTAIRE. Il y a quelques jours à peine, au moment où le Canadien de Montréal semblait dans les câbles, une multitude de partisans et d’analystes débattaient déjà de l’identité de son successeur. Aujourd’hui, au lendemain de l’élimination des Maple Leafs de Toronto, Dominique Ducharme semble avoir obtenu un sursis… jusqu’à la prochaine défaite.
Au cours des dernières semaines, j’ai été soufflé par la vague de commentaires négatifs et souvent injustifiés à l’endroit de Ducharme. J’omets ici volontairement les propos injurieux que j’ai lus sur les médias sociaux, tout simplement car je juge que leurs auteurs ne méritent même pas qu’on s’y attarde. Je fais plutôt référence aux critiques constantes à l’endroit du coach du Tricolore concernant la moindre de ses décisions.
Je veux bien croire que le Bleu-Blanc-Rouge soit une véritable religion au Québec. Je comprends que les partisans et même les commentateurs puissent parfois se laisser emporter par leurs émotions. Mais ça me dépasse de voir que la moindre décision, le moindre fait et geste de l’entraîneur-chef soit scruté à la loupe et presque systématiquement remis en question. Ce n’est plus de l’analyse : ça tombe carrément dans la suranalyse. À la longue, ça devient lourd…
Au cours des derniers mois, Dominique Ducharme a parfois pris des décisions audacieuses. Pendant la saison, l’utilisation de certains joueurs ou encore la fameuse stratégie de l’équipe pendant les prolongations à trois contre trois ont fait couler beaucoup d’encre. Puis, dès le début de la série contre les Leafs, le retrait de l’alignement des jeunes Jesperi Kotkaniemi, Cole Caufield et Alexander Romanov a mis le Québec a feu à et sang. La présence des vétérans Eric Staal, Jon Merrill et Erik Gustafsson dans la formation a vivement été contestée au départ, mais les critiques se sont faites plus discrètes à mesure que ces joueurs élevaient leur jeu d’un cran. Quant au retrait du vétéran Tomas Tatar, il a semblé faire l’unanimité dans le cercle des partisans et des pseudo-experts. Comme si les hommes de hockey avaient besoin de la bénédiction des amateurs ou des médias avant de modifier leur alignement!
À l’époque où il dirigeait les Voltigeurs de Drummondville, entre 2016 et 2018, Dominique Ducharme a pris des décisions tout aussi courageuses. À l’époque, le coach avait toutefois la cote auprès des partisans de l’équipe. Celui qui a mené les Mooseheads de Halifax et Équipe Canada junior aux grands honneurs était un homme respecté dans les cercles du hockey junior. Ses décisions comme coach et directeur général étaient rarement remises en question par les amateurs, même si ça arrivait parfois.
La plupart des prédécesseurs de Ducharme à la barre des Voltigeurs n’ont toutefois pas bénéficié de cette immunité. Nombre d’entre eux ont été bombardés de critiques parfois injustifiées. Untel faisait trop jouer ses vétérans. L’autre était trop axé sur la défensive. Ou encore, il jonglait sans cesse avec ses trios. Le successeur de Ducharme, son complice de longue date Steve Hartley, n’est pas à l’abri des critiques non plus malgré les excellents résultats obtenus depuis qu’il a pris la barre de l’équipe.
C’est comme si le fait de payer un billet ou de tenir un micro entre ses mains donnait le droit de juger le travail du coach ou de trancher sur sa compétence. En ce qui me concerne, en tant que journaliste, je ne me permets pas de critiquer une décision d’un entraîneur, que ce soit dans la composition de son alignement ou encore dans ses choix stratégiques pendant le match. Pour la simple et bonne raison que j’estime que ce n’est pas mon rôle.
Certes, je pose des questions. Je me fais parfois même insistant quand c’est nécessaire. Mais je ne remets pas systématiquement en question les méthodes employées. J’estime que l’essentiel, c’est que le coach puisse expliquer ses principales décisions aux partisans de l’équipe. Une fois qu’il a fait connaître la logique derrière son raisonnement, je ne vois pas la pertinence de tomber dans la suranalyse ou la critique instantanée. On peut être d’accord ou pas avec les choix de l’entraîneur, mais ultimement, il demeure que l’expert du hockey… c’est lui, non?
Plus de trois mois après sa nomination par intérim, Dominique Ducharme doit encore se battre pour justifier la moindre de ses décisions. Il me semble que le successeur de Claude Julien a suffisamment fait ses preuves pour mériter notre respect. Les performances de l’équipe dans la série contre les Maple Leafs sont là pour le prouver.