CULTURE. Après avoir dû tirer un trait sur une subvention importante, la Maison des arts de Drummondville a fait savoir qu’elle laisserait retomber la poussière avant de reprendre les discussions avec la Ville au sujet de la salle multifonctionnelle au centre-ville.
«On a à cœur le projet. Il y a de la déception. On se retrousse les manches. On va continuer à réfléchir. On va raffiner nos idées. On va aller rechercher des alliés», a exprimé la directrice générale Marie-Pierre Simoneau, lors d’un point de presse, mardi.
L’équipe de la Maison des arts souhaite trouver un terrain d’entente avec la Ville de Drummondville. «Actuellement, il n’y a plus d’urgence. On va se donner le temps de laisser la poussière retomber pour préparer une rencontre avec la municipalité, question de garder un dialogue», a indiqué le président du conseil d’administration, Réjean Bergeron.
Vendredi dernier, L’Express annonçait que la Maison des arts n’allait pas soumettre sa candidature au programme d’aide au développement des infrastructures culturelles lancé en septembre dernier par le ministère de la Culture et des Communications. Le lieu de diffusion souhaitait obtenir jusqu’à 70 % du financement prévu pour son projet de salle de spectacle multifonctionnelle.
Selon Jean-François Houle, administrateur de la Maison des arts, la Ville de Drummondville a freiné les ardeurs du lieu de diffusion culturel. «Le conseil municipal, qui est l’arbitre suprême, a décidé de ne pas adopter de résolutions visant le dépôt de ce projet le 26 février dernier.»
Les raisons menant à un tel choix sont méconnues de la part de la Maison des arts. «On ne sait pas exactement l’opinion du conseil municipal. Normalement, le conseil municipal se prononce par résolutions. Comme aucune résolution n’a été adoptée, c’est difficile de comprendre quels sont les considérants exacts de la décision du conseil.»
Des coûts jugés élevés
Si le maire de Drummondville, Alain Carrier, a fait connaître sa position, les autres élus municipaux ne se sont pas prononcés publiquement.
Dans une entrevue accordée à L’Express, lundi, Alain Carrier a déclaré que l’ensemble des coûts reliés à la construction de la salle multifonctionnelle représentait un élément dissuasif.
Si la Maison des arts obtenait le soutien financier demandé, la Ville devait initialement contribuer à hauteur de 4,9 M$ du montant total du projet. En prenant connaissance des modalités du programme d’aide, l’administration a constaté que la somme exigée à la Ville pour construire la salle de spectacle s’élevait plutôt à 9,8 M$.
«Le libellé du programme ne soulignait pas clairement le pourcentage qui s’appliquait jusqu’à un montant maximal. C’est une donnée qui est passée sous le radar», a soutenu Marie-Pierre Simoneau, en précisant que le projet est d’une valeur totale de 18,5 M$.
Dans tous les cas, la directrice générale se dit prête à évaluer les possibilités reliées au financement. «Il y a d’autres façons de faire du financement dans un projet de cette ampleur-là. Il y a des campagnes de financement qui peuvent être mises en place. Il y a d’autres façons de travailler le modèle d’affaires. Ce sont ces solutions qu’on n’a pas été capables jusqu’à l’heure actuelle d’envisager. Peut-être qu’on pourrait présenter le projet d’une autre façon pour arriver à un calcul plus équitable pour chacune des parties.»
Un programme exceptionnel
Pourtant, Jean-François Houle réitère que la participation au programme d’aide gouvernementale ne demandait pas à la Ville de s’engager financièrement dans l’immédiat. «Il ne s’agissait pas pour la Ville de sortir son chéquier et de faire un chèque de 10 M$. Il s’agissait plutôt pour la Ville, de s’inscrire dans un programme de financement pour voir si on était éligible», a-t-il amené, en précisant que la faisabilité du projet aurait été évaluée par la suite, sans oublier l’acceptabilité sociale.
Mentionnons que la Ville devait tout de même être propriétaire du lieu, pour que le dossier soit complet. Or, aucune entente n’a été conclue dans l’optique d’acquérir le site de l’ancien Jean Coutu au centre-ville.
M. Houle souligne que cette subvention avait un caractère exceptionnel. «Il y avait une marge de 4 M$ de plus qu’on pouvait aller chercher du gouvernement contrairement aux programmes habituels.»
À son avis, il s’agit d’un «rendez-vous manqué». «Est-ce que l’occasion reviendra? Je n’en ai aucune idée. On avait une occasion intéressante de relance. On l’a manquée. Or, on ne peut pas dire que le train ne repassera jamais.»
Malgré les derniers développements, la Maison des arts ne compte pas baisser les bras. «On n’est pas en chicane avec personne. On a toujours bien collaboré avec la Ville de Drummondville. Ce n’est pas là que ça va s’arrêter. Il y a un climat avec de la tension. Le projet ne fait pas l’unanimité présentement. On doit trouver comment se repositionner», a terminé Marie-Pierre Simoneau.
Ligne du temps du projet
- 2016 : La Ville de Drummondville confie à la Maison des arts la gestion du projet d’un deuxième espace de diffusion sur le territoire.
- 2018 : Une étude de marché est réalisée pour identifier le besoin ou non d’un nouveau lieu de diffusion à Drummondville.
- 2019 : Un plan d’affaires ainsi qu’une étude de site et préconcept sont élaborés. La Ville réserve une somme de 100 000 $ dans son budget d’investissements 2020 pour le projet de salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville. Dans cette optique, certains bâtiments sont ciblés, dont celui qui abritait autrefois la pharmacie Jean Coutu, sur la rue Heriot.
- 2020 : La Maison des arts procède à une analyse des modes de gouvernance ainsi qu’une analyse de la circulation et du stationnement.
- Septembre 2020 : Le maire Alain Carrier évoque la possibilité d’aménager la salle de spectacle multifonctionnelle sur le toit d’un stationnement étagé projeté entre les rues Loring et du Pont. Au même moment, le ministère de la Culture et des Communications du Québec lance le Programme d’aide au développement des infrastructures culturelles, faisant passer la subvention possible pour le projet de 40 à 70 %.
- Octobre 2020 : Dans son budget d’investissement 2021, Drummondville prévoit une somme de 100 000 $ pour soutenir et analyser des projets, dont l’aménagement d’une salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville.
- Février 2021 : La Maison des arts a jusqu’au 26 février pour déposer son projet dans le cadre du Programme d’aide au développement des infrastructures culturelles et ainsi obtenir une subvention allant jusqu’à 70 %, mais le temps manque.
- Mars 2021 : Le maire Alain Carrier fait savoir que le projet de salle de spectacle multifonctionnelle au centre-ville n’est plus dans les cartons.
(Avec la collaboration de Marilyne Demers)