Le propriétaire de la Fromagerie Lemaire veut mondialiser la poutine

Le propriétaire de la Fromagerie Lemaire veut mondialiser la poutine
Les producteurs de fromage en grains croient pouvoir produire assez facilement les milliers de kilos de fromage nécessaires à leur projet d'exportation. (Photo : Deposit)

FROMAGE. À l’image du parmesan d’Italie, les producteurs de fromage en grains du Québec négocient actuellement les termes d’une entente qui leur permettrait de s’unir et exporter leur produit vers l’Europe et les États-Unis. Luc Boivin, directeur général de la Fromagerie Boivin, qui possède la Fromagerie Lemaire de Saint-Cyrille-de-Wendover, est au cœur de ces discussions historiques.

Un comité, composé d’une union de producteurs de fromage en grains, s’est créé pour évaluer les possibilités qu’offrirait une expansion dans de nouveaux marchés. «On cherche à mettre en place une stratégie conjointe de mise en marché, de promotion et d’image de marque du fromage en grains pour la poutine dans des marchés d’exportation. La poutine s’inscrit dans une tendance culinaire qui s’étend en dehors du Québec et du Canada», a commenté M. Boivin.

Les ententes concernant les importations alimentaires adoptées au Canada rendent le marché du fromage encore plus compétitif. Les comptoirs de fromages fins des épiceries voient une plus grande part de produits importés y faire leur place. C’est pour ces raisons que les producteurs de fromage cherchent de nouvelles façons de poursuivre leur croissance à l’extérieur des frontières.

«Ce n’était pas naturel pour l’industrie fromagère du Québec de penser à l’exportation. Avec l’ouverture des ententes, on n’est pas toujours compétitifs pour le prix du lait, mais, dans le cas de la poutine, nos usines sont modernes et construites pour produire ce fromage, ce qui n’est pas le cas nulle part ailleurs dans le monde. On a une certaine longueur d’avance qu’il faut exploiter», a poursuivi Luc Boivin.

Luc Boivin. (Photo : Gracieuseté)

M. Boivin est un partisan de l’approche collective qui est présentement en marche. Selon lui, la force du nombre sera bénéfique à tous pour ce projet. «C’est certain qu’en groupe, c’est plus long que seul, mais je crois à l’approche collective. S’il fallait approvisionner une chaîne comme McDonald’s seul, on ne serait pas capable. Le modèle d’une société qui achète le fromage des producteurs et le redistribue sous une même appellation pourrait être intéressant. Ça pourrait permettre de déployer, à l’échelle du Canada, une force de production qu’une seule usine n’aurait pas», a-t-il ajouté.

Mettre à contribution toutes les usines

En créant cette union de producteurs, autant les plus gros producteurs que les petits pourront profiter de l’expansion. Par exemple, le marché américain représente 10 fois celui du Canada, ce qui offre un éventail de nouvelles possibilités aux producteurs. «L’objectif est de faire bénéficier l’ensemble des usines du potentiel de croissance. Si l’on réussit à mettre en place ce projet, on peut plus que rêver aux bienfaits. Les capacités excédentaires des usines seraient mises à contribution pour répondre à cette nouvelle demande», a fait savoir l’homme d’affaires.

La Fromagerie Lemaire participera aussi à l’effort de production. (Photo : Archives – Ghyslain Bergeron)

Il est cependant encore trop tôt pour parler d’embauches massives, d’investissements ou d’agrandissements d’installations de production. Les équipes de travail tentent plutôt de bien lancer le projet sur les rails. «On n’est pas encore rendu à cette étape. Avec la pandémie, le marché s’est écrasé un peu, mais on sait que ça va revenir. Le timing est bon parce qu’au courant des prochains mois, il y aura plus de développements. Pour les employés, ce projet peut faire la différence entre des fromageries qui fermeront et des fromageries qui continueront de grandir», a laissé entendre Luc Boivin.

Conserver les racines

Avec la mondialisation de la poutine en vue, Luc Boivin voudrait que les racines québécoises du plat, inventé à Drummondville, perdurent. «On peut penser qu’il pourrait y avoir de l’appropriation culturelle au niveau culinaire et, ça, il ne faudrait surtout pas que ça se produise. Il ne faut pas que la poutine devienne américaine. Il faut qu’elle demeure québécoise et canadienne. C’est pour cette raison qu’il faut s’unir, définir un standard et une identité propre au fromage», a expliqué le directeur général.

«Dans le cas de la poutine, c’est nous qui l’avons inventé. C’est notre fromage et nous sommes les seuls à l’avoir. C’est une opportunité unique qu’il faut étudier», a conclu Luc Boivin.

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