MAGAZINE. Lorsque la pandémie de COVID-19 a frappé le Québec en mars dernier, Julie Arel a décidé de faire contre mauvaise fortune bon cœur. Depuis, la restauratrice multiplie les initiatives afin de redonner à la communauté.
«À la fin de l’année 2019, j’ai eu l’impression d’avoir fait le tour. Je voulais un défi pour 2020. Parfois, je le regrette un peu», lance avec humour Julie Arel, copropriétaire du restaurant La Muse, à Drummondville.
Retour en arrière : 22 mars 2020, à minuit, les restaurateurs de la province doivent fermer leur salle à manger. La Muse décide d’offrir ses aliments périssables plutôt que de les jeter. Œufs, pains, muffins, bagels, fruits et jus sont notamment remis à des familles nombreuses.
Trois jours plus tard, La Muse prépare 200 litres de potages à donner à des personnes de 70 ans et plus. Les automobilistes font la file sur la rue Heriot, alors qu’un service à l’auto s’improvise. Au même moment, 25 potages sont livrés et déposés sur le balcon de 25 aînés habitant à l’extérieur de Drummondville.
«Au lieu de devenir une perdante de la COVID-19, je voulais être une gagnante. Pour moi, ç’a été une illumination. Je me dis qu’à travers la pandémie, il est né une chaîne d’entraide et je ne veux pas que ça s’essouffle. C’est ce qui me garde en vie et qui fait que je ne vois pas le négatif», soutient Julie Arel.
Entre une réouverture, puis une nouvelle fermeture les mois suivants, l’entrepreneure continue de s’impliquer, pouvant toujours compter sur le soutien de son conjoint Daniel Paulin, des employés de La Muse et de nombreux bénévoles.
«Je ne compte plus le nombre d’initiatives. À ce jour, je dirais qu’il y en a eu une trentaine ou une quarantaine. J’écoute toujours mon cœur. Les jeunes de la DPJ, ça vient me chercher. Les personnes seules aussi. Je me dis que si on peut juste rallumer une petite étincelle, ça sera au moins ça», souligne la mère de deux enfants.
Livraison de repas au personnel médical de l’hôpital Sainte-Croix, distribution de boîtes à lunch aux 540 élèves de sixième année de Drummondville et cadeaux aux jeunes en centre jeunesse sont quelques autres exemples.
«C’est sûr que je veux que ça demeure et peut-être même créer une fondation. Tant que les gens vont être derrière moi, je vais continuer», affirme celle qui s’est retrouvée parmi 15 Québécois d’exception en nomination au Gala Top personnalités Métro en novembre dernier.
Héritage familial
Julie Arel baigne dans le domaine de la restauration depuis son jeune âge. Son père, Richard Arel, a racheté le Madrid en 1987. «Il a toujours eu 100 000 idées. À l’époque, il a acheté le restaurant pour exposer ses Big Foot. Avant même la folie de Jurassic Park, il a fait faire des dinosaures grandeur nature qu’il a aussi exposés. Six mois avant la crise du verglas, il a acheté une génératrice et l’armée canadienne est arrêtée manger au Madrid parce qu’on avait encore de l’électricité! Il a toujours été visionnaire», raconte-t-elle.
Avec ses dinosaures géants et ses Big Foot, le défunt restaurant blanc au toit rouge de l’autoroute 20 est devenu un lieu mythique pour les visiteurs et une deuxième maison pour Julie Arel. «J’avais 13 ans quand mon père l’a acheté. Au début, je faisais la vaisselle. Tranquillement, j’ai fait mon chemin. Début trentaine, j’ai repris le restaurant avec mon conjoint Daniel et mon père a gardé la station-service», se remémore la femme de 46 ans.
«Comme mon père avait toujours des idées, je me demandais comment j’allais faire. Finalement, j’ai aussi ce côté création en moi. Et avec Daniel, on fait une équipe explosive. On a doublé le chiffre d’affaires du restaurant après l’avoir repris», poursuit-elle.
Après 10 ans de travail acharné, le couple a décidé de vendre le Madrid en 2011. C’était la fin d’une époque. Des anecdotes, Julie Arel en a plusieurs et bon nombre témoignent de la bienveillance de la famille Arel.
C’est notamment le cas de John MacBurnie, qui avait quitté Montréal pour retrouver sa famille en Nouvelle-Écosse à quelques jours de Noël. «Il faisait du pouce pour se rendre jusqu’à Halifax. Mon père lui avait acheté un billet de train et offert les repas», se souvient l’entrepreneure. Marqué par cette générosité, le Néo-Écossais, qui avait 23 ans à l’époque, avait publié une lettre dans le journal The Gazette.
«J’ai souvent vu mon père aider des personnes en panne ou encore offrir des repas à des personnes qui n’avaient pas d’argent, mentionne Julie Arel, qui a racheté La Muse en 2012 avec son conjoint. Ce sont des valeurs avec lesquelles j’ai grandi.»
Comme le dit le proverbe, la pomme ne tombe jamais loin de l’arbre.