MAGAZINE. Derrière son titre de célébrité, Renée Martel est avant tout une femme courageuse qui a mené plusieurs combats. Si sa carrière dans le show-business n’a pas été de tout repos, l’alcoolisme et les problèmes de santé lui ont fait réaliser l’importance de s’accrocher à la vie.
Maintenant âgée de 73 ans, la reine de la musique country est assaillie d’émotions lorsqu’elle repense au chemin qu’elle a parcouru depuis le début de sa carrière. «J’ai commencé à recevoir des hommages. Ça me touche énormément. Dans ma tête, je me dis que j’étais juste la fille d’un cowboy. Lorsque j’ai commencé, je n’aurais jamais pensé me rendre-là. Je vivais ma vie au jour le jour», témoigne Renée Martel, d’une voix empreinte de vécu.
Fille de Marcel Martel et de Noëlla Therrien, la jeune chanteuse a fait ses premiers spectacles à l’âge de cinq ans. Propulsée dans l’univers de la musique, Renée Martel a grandi sous les feux des projecteurs. «L’enfance a été merveilleuse. J’étais beaucoup avec mes parents, contrairement à d’autres enfants, raconte celle qui faisait des tournées à travers le Québec. C’était plus difficile à l’adolescence et au début de l’âge adulte. Parfois, j’avais envie de faire autre chose, mais j’avais des spectacles. Finalement, la roue n’a jamais arrêté. J’ai continué.»
Renée Martel a mordu à pleines dents dans la vague yéyé avec ses chansons Liverpool, Je vais à Londres et Johnny Angel. Les succès de la chanteuse étaient sur toutes les lèvres. «Dans le show-business, tu montes, mais tu ne sais pas si tu vas rester en haut. Un de mes plus grands défis, ça a été de rester», confie celle qui cumule plus de 60 ans de métier.
«Aujourd’hui, je suis fière d’avoir été capable de rester et d’avoir toujours été capable d’apporter quelque chose de nouveau. Je me suis recréée chaque fois. J’ai avancé au lieu de stagner.»
L’artiste, originaire de Drummondville, s’est toujours démarquée par la proximité avec le public. Malgré son côté solitaire, Renée Martel adore s’ouvrir aux spectateurs en discutant avec eux. «Quand j’avais 10 ans, mon père m’avait dit : ‘’Si un jour tu montes très haut, fait attention à comment tu traites les gens. Si tu as à redescendre, tu vas rencontrer le même monde’’. Ça m’est toujours resté.»
L’alcoolisme
Tout n’était pas rose lors des années de gloire de Renée Martel. Derrière les beaux sourires et les paillettes, l’étoile montante a développé une dépendance à l’alcool dès la vingtaine. La consommation a pris une place de plus en plus importante dans sa vie. Pendant longtemps, l’artiste a gardé sous silence son problème. À l’époque, le sujet était tabou.
Après 13 ans de calvaire, la chanteuse a décidé d’affronter la réalité. «C’est sûr et certain que ma consommation n’avait rien de bon, jusqu’à ce que je décide un jour de me prendre en main. Même si les autres voulaient vraiment m’aider, ils ne pouvaient rien faire tant que je ne voulais pas m’aider. Ça n’a pas été facile, mais j’avais assez de motivation», soutient celle qui désirait renouer avec sa véritable personnalité.
En reconnaissant sa dépendance, l’artiste a fait un pas vers la réhabilitation. «C’est l’étape la plus importante. Une fois que tu découvres que tu es une alcoolique, c’est à toi de décider si tu veux rester dans cette vie ou avoir une meilleure vie. Dans mon cas, j’ai voulu une meilleure vie et j’ai bien fait parce que j’en ai eu une», souligne-t-elle, en précisant qu’elle a passé par une thérapie.
Encore aujourd’hui, Renée Martel opte pour la vigilance. «Après 18 ans [de sobriété], j’ai pensé que tout était correct et j’ai eu une rechute. J’ai réalisé que ce n’était pas vrai que ça n’allait plus m’arriver. Je ne serai jamais à l’abri.»
Une santé fragile
Si l’alcoolisme a été une épreuve difficile à surmonter, Renée Martel a eu plusieurs problèmes de santé qui l’ont forcé à prendre des pauses professionnelles. À l’âge de 52 ans, la chanteuse craignait ne plus pouvoir chanter à la suite d’une opération au poumon droit. Cette dernière a eu un certain vertige. «J’ai commencé le métier dès un jeune âge. Je me disais : ‘’ Si je ne peux plus chanter, je vais faire quoi?’’ Je n’ai jamais appris à faire autre chose», exprime-t-elle, avec sincérité.
Neuf ans se sont écoulés avant que Renée Martel ne retrouve son public, plus précisément au Vieux Clocher de Magog. «Quand j’ai réussi à passer à travers le spectacle de deux heures, j’ai éclaté en larme parce que je ne pensais même pas que j’aurais été capable de faire une chanson», se remémore-t-elle.
Ayant une santé fragile, la chanteuse est consciente qu’elle ne peut rien tenir pour acquis. «J’ai dû réapprendre à respirer. Encore aujourd’hui, je suis des cours de chant, mais c’est toujours au niveau de la respiration. C’est un travail continu. Ce n’est pas parce que j’ai réussi que le problème est parti.»
Le cancer, un combat ultime
La reine de la musique country avoue que le cancer du foie, en 2013, et le cancer du sein, en 2019, constituent les combats les plus difficiles qu’elle a bravés. «Quand on apprend qu’on a un cancer, le coup est dur. Pour quelques jours, je me couche en dessous de mon tapis, mais je ne reste pas là. Une fois le choc passé, je me dis qu’on ne peut rien y faire.»
Malgré les mauvaises nouvelles, cette grande dame ne s’est jamais laissé abattre. «Je ne veux pas vivre dans le problème, je veux des solutions. Qu’on me présente les solutions et je vais prendre celle qui me convient.»
Cette dernière voulait à tout prix gagner contre la maladie. «J’avais envie de vivre. J’ai des enfants et des petits-enfants. J’ai envie de les voir grandir. Je n’ai pas envie de les abandonner, soutient-elle. Aussi, j’aime assez mon métier pour vouloir rester vivante», exprime celle qui a maintenant tourné la page sur cet épisode.
Vivant dorénavant sur la Rive-Sud de Montréal, Renée Martel se dit comblée par la vie. Elle ne mesure plus son bonheur en fonction de ses biens matériels, mais bien par la qualité des gens qui l’entourent.
Pour les intéressés, la reine de la musique country ne compte pas accrocher son chapeau de sitôt! «Si le Bon Dieu me le permet, je vais encore faire ça un petit bout. La scène me manque. Les artistes souffrent énormément des événements actuels, moi la première. On a des projets de spectacles. Quoi qu’il arrive, c’est sûr que je vais retourner sur la scène», conclut-elle, tout sourire.
Prix et distinctions
Renée Martel est l’une des plus grandes chanteuses du Québec. Lors de sa carrière, l’artiste a récolté plusieurs honneurs. En voici la preuve.
2016 : Félix de l’album country de l’année «Nous» avec Patrick Norman
2013 : Ambassadrice de la Ville de Drummondville
2012 : Prix miroir de l’année décerné par le Festival d’été de Québec
2012 : Félix hommage
2012 : Félix de l’album de l’année «Country – Une femme libre»
2009 : Félix du spectacle de l’année «Interprète – L’héritage»
2009 : Félix album de l’année «Country – L’héritage»
1999 : Félix album de l’année «Country- À mon père»
1985 : Félix microsillon de l’année «Country – Cadeau»
1983 : Félix microsillon de l’année «Country – C’est mon histoire»
1976 : Prix orange TV Hebdo
1968 : Révélation féminine de l’année au gala des artistes
Qui est Marcel Martel?
Marcel Martel est le père de Renée Martel. Il est né à Drummondville. L’auteur-compositeur et interprète est considéré comme l’un des pionniers de la musique country au Québec. Il se familiarise dès un jeune âge avec l’harmonica avant de passer à la guitare, un instrument qui le suivra tout au long de sa carrière. Parmi ses succès musicaux, on retrouve Un coin du ciel, Bonsoir mon amour, Valser dans tes bras et Mon cœur est comme un train qui vagabonde. Il connut beaucoup de succès dans les années 1940 à 1980.