SANTÉ. Des centres jeunesse de la région de la Mauricie-Centre-du-Québec, dont celui de Drummondville, bénéficient depuis quelques mois du projet Iso-Stress. Déployé également à Montréal en Montérégie et bientôt dans les Laurentides, ce programme vise à soutenir les intervenants et les jeunes dans leur gestion du stress.
Julie Moreau et Mélanie Janelle, déléguées à la jeunesse sous la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) au CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec, sont parmi les quatre seuls formateurs accrédités Iso-stress au Québec jusqu’à ce jour. Elles ont reçu cette accréditation par Sonia Lupien, Ph. D., professeur titulaire du département de psychiatrie de l’Université de Montréal, fondatrice et directrice du Centre d’études sur le stress humain de même que directrice scientifique du Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal.
Ainsi, depuis quelques mois, elles forment des animateurs au sein des deux centres jeunesse de la région, dont le Pavillon Laforest à Drummondville, afin d’offrir l’atelier Déstresse et Progresse qui s’adresse aux jeunes ainsi que Stress et Compagnie qui cible les intervenants et gestionnaires.
Ce programme permet aux enfants, adolescents et intervenants d’apprendre ce qu’est le stress, comment le reconnaître et comment s’y adapter dans la vie. Il donne aux jeunes les connaissances nécessaires pour reconnaître les effets du stress sur le cerveau et sur le corps.
«Tout le monde vit du stress un jour ou l’autre. Ce n’est pas parce qu’on est adulte, qu’on est intervenant avec des bases qu’on est à l’abri du stress. D’ailleurs, en ce moment, on en vit un gros, la COVID, et ça a des impacts sur nos vies, notre façon de travailler. C’est pour cette raison que la formation s’adresse à tous. Le but, c’est que l’intervenant applique d’abord les concepts qui collent à sa situation personnelle et professionnelle. Ensuite, les concepts sont appliqués au sein de l’équipe de travail via un plan d’actions sur les stresseurs identifiés. Enfin, cinq ateliers sont donnés aux jeunes en réadaptation», explique Mélanie Janelle.
«Le programme est aussi fait pour que les intervenants fassent du modeling auprès des jeunes. Ils se mouillent, c’est-à-dire qu’ils nomment leur niveau de stress aux jeunes, leurs émotions et indiquent pour quelles raisons ils vivent du stress. En fait, c’est de leur montrer que les adultes vivent du stress, mais parviennent à le gérer par différents moyens», ajoute Julie Moreau.
Désirant outiller davantage les jeunes étant sous la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, les intervenantes ont ajouté trois rencontres supplémentaires portant sur les problématiques de violence. Un programme unique au Québec.
«On voulait aller plus loin. Une fois que le jeune est capable d’identifier ses stresseurs et que c’est acquis, on lui demande de nous dire quels étaient les stresseurs pour la victime lorsqu’il a commis son geste de violence. On veut qu’il soit capable de le voir chez les autres, de reconnaître l’impact que ses comportements ont eu chez l’autre. C’est un peu un travail d’introspection, mais on ne tombe pas dans la psychanalyse, ça reste concret. Ça introduit également le concept d’empathie», précise Mme Janelle.
Les ateliers se donnent selon une approche positive et sous une formule interactive.
«Ce sont des concepts très faciles à comprendre et à intégrer. Les ateliers sont très interactifs, on peut faire des casse-têtes, visionner des vidéos, etc. Et ce n’est pas confrontant pour le jeune, dans le sens qu’on ne lui dit pas qu’il est un mauvais et qu’on va lui enseigner à ne pas être mauvais. C’est vraiment de dire que le stress est partout, que tout le monde en vit, tout comme lui et qu’il en fait vivre aussi à plusieurs personnes. Donc on l’accompagne dans sa façon d’utiliser les outils enseignés pour aider à gérer son stress. Ce n’est pas révolutionnaire, mais la façon dont les ateliers sont bâtis, ça vient structurer la pensée et fait du sens pour tout le monde», indique Julie Moreau.
Un programme «gagnant-gagnant»
Si les intervenantes n’ont pu encore évaluer les retombées positives de ce programme dans la région, étant donné son implantation nouvelle, elles savent néanmoins que cela apportera rapidement des bénéfices pour tous, à se fier aux observations des chercheurs en centres jeunesse montréalais, là où le programme a été déployé en premier.
«Ce qui ressort, c’est une grande diminution du stress dans l’équipe, alors on remarque moins de départs de maladie. Car je ne vous cacherai pas qu’en centre jeunesse, il y a beaucoup de congés de maladie, parce qu’on fait face à de nombreuses situations d’adversité. Donc, s’il y a moins de causes de maladie, il y a un meilleur ajustement aux clients, c’est-à-dire que les intervenants sont plus disponibles à réagir aux usagers qui ont des réactions excessives. Ainsi, il y a moins de retraits hors services remarqués. Bref, c’est gagnant pour les intervenants, mais aussi pour les jeunes et les familles», fait valoir Julie Moreau.
«Jusqu’à maintenant, on est enchantées de la réception des jeunes, mais aussi des parents, car une personne significative accompagne l’enfant à chacune des rencontres», affirme sa collègue.
Par ailleurs, depuis cette semaine, les animateurs offrent des ateliers aux intervenants d’enfants en famille d’accueil pour qu’eux aussi soient accompagnés dans leur gestion du stress.
«La prochaine étape est de voir comment ce programme-là peut faire des petits dans tous les milieux qu’on a sur le territoire. Il y a un million de possibilités. C’est entre les mains de la direction du CIUSSS», souligne en terminant Mme Moreau.