SANTÉ. Karyne Vaillant vit avec la fibrose kystique. En janvier 2019, elle a cru qu’elle allait mourir, mais les poumons qu’elle a reçus lui ont sauvé la vie.
Karyne Vaillant est rayonnante. Un an et demi après sa double greffe des poumons, elle respire le bonheur. Littéralement. Sa capacité pulmonaire est passée de 27 à 95 %. «La dernière fois que ma santé allait si bien, c’était au primaire», se souvient la femme de 38 ans.
«Je fais des randonnées, des marches, du vélo. Je fais des activités que je n’avais pas faites depuis longtemps parce que la maladie m’empêchait d’être active à mon goût. Depuis ma greffe, j’ai l’urgence de vivre», confie-t-elle.
Pas une journée ne passe sans qu’elle ne remercie sa donneuse, qui lui a offert ce second souffle. En décembre dernier, Karyne Vaillant et sa mère ont écrit à la famille, de façon confidentielle, par le biais de Transplant Québec. «Il fallait que je partage la joie que j’ai de vivre grâce à cette personne qui a décidé de signer sa carte, grâce à la décision de ses proches de respecter sa volonté. Il fallait que je leur dise que maintenant, je profite de la vie et que je suis reconnaissante pour tout ce qu’ils ont fait pour moi», souligne-t-elle.
En février, elle a reçu pas une, mais bien deux réponses. Elle a accepté de partager des extraits de celles-ci.
«Votre lettre est arrivée juste avant Noël. C’était un Noël que je redoutais, car ce serait le premier sans ma femme. Votre lettre a cependant soulagé la douleur de ma perte et m’a réconforté. Votre gratitude était enveloppante. Cela m’a aidé de savoir à quel point le don de ma femme était apprécié et comment votre vie avait changé de façon spectaculaire», écrit le mari de la donneuse, dans une lettre traduite de l’anglais.
«Ma femme et moi étions partenaires depuis 43 ans. Nous avons eu une vie merveilleuse. J’ai épousé une femme incroyable. C’était une personne qui aimait et était aimé de tous. Ma femme et moi parlions rarement de la mort. Cependant, je me souviens d’une conversation que vous avons eue au cours de laquelle elle a dit qu’elle voulait être donneuse d’organes. Cela ne m’a pas surpris, car elle était gentille et généreuse», poursuit-il.
«Je veux vous remercier d’avoir écrit. Votre lettre était un merveilleux cadeau de Noël. Cela m’a aidé à comprendre la mort de ma femme. Il est réconfortant de savoir qu’une partie d’elle vit toujours et vit avec quelqu’un qui remercie chaque jour la générosité de ma femme.»
La deuxième lettre était signée par sa fille. «La mort de ma mère a été accidentelle et nous a plus que jamais choqué. Notre famille a toujours plaidé pour le don d’organes et cela me réconforte de savoir qu’elle n’est pas morte en vain, qu’elle a pu vous offrir la vie. Ma maman avait hâte de voyager à sa retraite, donc je suis très heureuse d’apprendre que vous amenez ses poumons en voyage! Cela signifie qu’une partie d’elle peut faire certaines des choses dont nous avions rêvé même si je ne peux pas partager ces expériences avec elle. Elle avait un grand sens de l’humour et elle en aurait profité au maximum», partage-t-elle, entre autres.
Karyne Vaillant se sent extrêmement privilégiée. «Ça me touche énormément. Je connais des personnes qui écrivent depuis des années sans jamais avoir eu de réponses des familles. Je me considère très chanceuse, exprime-t-elle. Je trouve que ma donneuse me ressemble un peu. Ou que c’est moi qui lui ressemble maintenant. Ils ont dit que c’était une personne qui aimait la vie, qui aimait voyager et profiter du plein-air, tout comme moi.»
Si l’identité du donneur et du receveur demeure confidentielle au Québec, Karyne Vaillant garde espoir de rencontrer, un jour, la famille de sa donneuse. Cette résidente de Gatineau qui lui a sauvé la vie, le 19 janvier 2019. «Si je vis une situation importante, j’aimerais qu’ils soient présents. S’ils avaient refusé de donner les organes de leur être cher, je ne serais pas là aujourd’hui», témoigne-t-elle.
Le dernier mot
Au Québec, pour être donneur d’organes, il faut signer l’autocollant de consentement et l’appliquer au dos de la carte d’assurance maladie. Ce sont toutefois les proches de la personne décédée qui prennent la décision de permettre ou non le don d’organes et de tissus.
«Oui tu dois signer ta carte, mais il faut que tu avises ta famille et tes proches. Ce sont eux qui ont le dernier mot», souhaite sensibiliser Karyne Vaillant.
À compter du 18 janvier prochain, la Nouvelle-Écosse tiendra pour acquis que ses citoyens consentissent au don d’organes et de tissus après leur mort, à moins d’effectuer une demande de refus. Elle deviendra la première province canadienne à adopter une telle loi.
Un seul donneur peut sauver jusqu’à 8 vies par le don d’organes et aider 20 autres personnes à retrouver une qualité de vie par le don de tissus. (Source : Transplant Québec)