Une proche aidante découragée et impuissante

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Par Jean-Pierre Boisvert
Une proche aidante découragée et impuissante
Yvonne Ramsay (Photo : Ghyslain Bergeron)

ENTRAIDE. Yvonne Ramsay est découragée et surtout impuissante dans son rôle de proche aidante qu’elle exerce depuis 25 ans auprès de Roch Lachance, non-voyant, qui est incapable d’assumer une augmentation des frais pour son logement et ses soins à la Résidence Saint-Cyrille.

«Moi j’ai toujours fait tout ce que je pouvais pour l’aider. Aller faire son épicerie et ses commissions, aller le voir deux fois par semaine (avant la pandémie) et l’appeler à tous les soirs, mais là, je ne sais pas quoi faire. Son loyer va augmenter de 200 dollars le premier juin, le bail n’est pas encore signé, on lui chargera dorénavant 60 dollars par mois pour changer ses couches. Il porte une sonde pour son urine et des fois, ça coule. Il faut changer sa couche trois fois par semaine. Il a vraiment besoin d’aide, d’aide financière», lance-t-elle sans savoir à qui le dire sinon au journaliste de L’Express.

«J’ai 73 ans, je vis avec 22 000 dollars par année. Je lui achète parfois des petites choses pas chères, soit au Tigre géant ou chez Hart, mais je ne peux pas en faire plus. Je demande de l’aide pour lui, pas pour moi», tient-elle à préciser.

Yvonne Ramsay a une procuration à la caisse Desjardins pour voir aux affaires de Roch Lachance, qui est âgé de 84 ans. «Lui, il signe avec un X et moi je mets mon nom plus bas. Je ne peux pas signer ce bail, il n’arrivera pas à payer ça. Il n’a que sa pension de vieillesse et un supplément. Il n’a rien d’autre. Il n’a même pas d’assurance-vie. Je ne sais plus à qui m’adresser. Il a une sœur aux Terrasses de la Fonderie, mais elle ne veut pas s’en occuper. Vous savez, il a toute sa tête, il parle bien, son moral est bon, il est fortement croyant. Jamais il ne se plaint. Il répond toujours que ça va bien quand on lui demande… Actuellement, il ne sait pas que je vous raconte sa situation», admet-elle.

«Les coûts augmentent partout»

À la Résidence de Saint-Cyrille, le propriétaire Patrice Bouvette reconnaît le cas problématique de Roch Lachance.

«C’est vrai que j’ai dû imposer une hausse des loyers de 200 $, qui a été annoncée l’an dernier. Madame a droit à son opinion, mais je n’ai pas eu le choix de procéder à une hausse. Les coûts augmentent partout. En fait, si je n’avais pas d’autres business, comme le marché et le bistro, je ne pourrais pas tenir longtemps. Le coût pour un bain ou pour le changement de culotte d’incontinence est décidé en collaboration avec le CIUSSS, qui nous surveille de près. Il y a 30 résidents ici, j’ai 12 employés payés à 18 $ de l’heure. Je calcule que c’est un très bon ratio résidents/employés. Pour donner un bain, ça prend une heure et je charge 15 $. Je suis en bas du prix coûtant. Je sais que madame a fait des démarches ailleurs, mais elle a réalisé que c’est plus cher dans les autres résidences», fait-il remarquer.

Patrice Bouvette ne panique pas avec la signature du bail. «Pour le moment, ce n’est pas grave. Mais c’est sûr que s’il n’est pas capable de payer, il faudra qu’il se passe quelque chose. Je n’irai pas en cour et je ne le jetterai pas dehors c’est certain. Je l’enverrai sans doute à l’hôpital et ils verront ensuite où le placer. J’ai entendu dire que, dans un mois, les pensions de vieillesse pourraient être augmentées de 300 dollars par mois. On va voir d’ici là».

Et comme dans toutes les autres résidences, une autre augmentation est prévue l’an prochain.

«J’ai de la peine, dit Yvonne Ramsay avec une larme aux yeux, qu’est-ce qui va nous arriver quand ce sera notre tour?»

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