COVID-19 : le redémarrage, vu par un homme d’affaires québécois en Chine

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Par Jean-Pierre Boisvert
COVID-19 : le redémarrage, vu par un homme d’affaires québécois en Chine
Carl Breau (Photo : Gracieuseté)

AFFAIRES. Carl Breau, un homme d’affaires québécois qui exploite une entreprise spécialisée en haute technologie à Shanghaï, a connu l’expérience du redémarrage suivant le confinement en Chine et il en fera profiter une centaine d’entrepreneurs d’ici lors d’une webconférence qui se tiendra jeudi matin.

«J’ai été un témoin privilégié, si l’on peut dire, au cœur de la crise de COVID-19 qui a débuté en Chine il y a trois mois et je peux dire qu’il faut garder espoir, qu’il y a moyen de s’en sortir, et peut-être même mieux, si on garde la tête froide et qu’on applique certains principes que je me ferai un plaisir d’expliquer à mes compatriotes», a-t-il indiqué lors d’un entretien téléphonique avec L’Express mardi matin, mardi soir pour lui.

Carl Breau, propriétaire de Cemondia, une entreprise montréalaise dont la filiale, Saimen, est établie à Shanghaï depuis huit ans, a eu non seulement à voir à sa santé et à celle de ses 80 employés, dont aucun n’a été infecté par le coronavirus, mais il a dû aussi préparer son entreprise au redémarrage, ce qu’il a réussi, dit-il fièrement.

«Nous avons vécu les mêmes peurs que vous à l’heure actuelle. À la fin du mois de janvier, après le Nouvel An chinois, la COVID-19 déferlait sur la Chine et le gouvernement a imposé des mesures strictes. Pour nous, la maladie arrivait de nulle part. Au début de 2020, On ne connaissait pas encore l’ampleur que ça pourrait prendre et tout d’un coup, plus moyen d’aller travailler. Il a fallu s’adapter rapidement pour permettre aux employés de travailler à la maison et les protéger. Les consignes ont été moins sévères à Shanghaï qu’à Wuhan mais strictes quand même. Les premiers jours d’isolement ont rendu évidente la nécessité d’élaborer un plan pour éviter de voir Saimen s’écrouler sous le choc. Il est bon d’avoir du temps pour réfléchir en profondeur, une denrée rare quand on exploite une entreprise», fait-il remarquer.

Par ailleurs, il précise, dans un texte qu’il a publié sur sa page Facebook, que l’isolement a duré trois semaines au total. «On nous a permis de retourner au bureau après deux semaines pour aller chercher des documents et du matériel. Une fois de retour au bureau à temps plein, nous maintenions une distance de deux mètres et il fallait prendre la température de tout le monde à l’arrivée au bureau. Cette pratique a toujours cours dans notre immeuble, et dans bien d’autres, y compris au Starbucks du coin. Cela dit, à part cela, nous sommes revenus à la normale à la mi-mars».

La communication, c’est le secret

Selon lui, une fois la santé et la sécurité étant réinstaurées, la relance doit passer par une communication étroite avec les fournisseurs, les clients et les transporteurs. «Pour bien préparer le redémarrage, il faut profiter de la pause pour se tenir au courant de ce qui se passe chez nos sous-traitants. C’est là qu’on réalise qu’on est dépendant de ces partenaires. Seront-ils prêts à redémarrer en même temps que toi? Il faut savoir cela. Car ça peut devenir un obstacle. Je n’ai jamais été si isolé, et pourtant, je n’ai jamais autant communiqué avec employés et clients. Je sais que ce n’est pas facile. Il y a l’angoisse qui s’installe. Mais il faut garder la tête froide, rester combatif et même croire que la crise nous rendra plus forts. Comme a déjà dit Churchill, ne jamais gaspiller une bonne crise. J’ai pris du temps en isolement pour revoir les processus caducs et planifier leur élimination ou leur remplacement. J’ai ainsi réalisé qu’il y avait des déplacements qui n’étaient plus essentiels et qu’on pouvait être plus productifs en utilisant la vidéoconférence», soumet-il, estimant au passage que les Ressources humaines jouent un rôle central dans l’adaptation au télétravail.

Parmi les principes qu’il détaillera lors de sa web conférence, d’une durée d’une heure, avec les dirigeants d’entreprises, il y a ceux de bien évaluer sa trésorerie, de se tenir au fait des annonces officielles, de gérer le stress et la continuité des activités et effectuer les contrôles préalables. «Une question que se poseront les exportateurs en particulier concerne la gestion du risque lié à la chaîne d’approvisionnement. Après le début de la crise, il est presque trop tard pour gérer ce risque efficacement; par contre, si vous avez effectué vos contrôles préalables, vous récolterez les fruits de votre labeur. Sur ce point, nous avons été chanceux. Nous n’avons jamais lésiné sur l’évaluation de nos fournisseurs. Certaines entreprises ont perdu 50 % de leur chaîne d’approvisionnement, ce qui les a conduites à la faillite», précise-t-il.
Carl Breau fait valoir aussi que l’apport de l’équipe des finances est important. «Elle a répondu à des appels, négocié avec les banques, fait reporter des paiements, tenté d’obtenir des paiements anticipés auprès de certains clients. Ces tâches sortent du cadre régulier de nos activités, mais elles sont cruciales en temps de crise».

La webconférence de jeudi, 9 heures, est rendue possible grâce à la collaboration des Manufacturiers de la Mauricie et du Centre-du-Québec (MMCQ) et de Carrefour Québec International (CQI), notamment. Carl Breau sera accompagné de Jean-Luc Hébert, vice-président ventes et marketing. Les places pour la web diffusion en temps réel sont limitées à 100 personnes et environ 80 sont déjà inscrits. Les dirigeants des réseaux des organisateurs seront priorisés. L’inscription se fait au www.mmcq.ca et c’est gratuit.

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