POLITIQUE. Alors que la nouvelle session parlementaire s’ouvre aujourd’hui à l’Assemblée nationale, André Lamontagne entrevoit avec enthousiasme la deuxième année de son mandat de ministre de l’Agriculture, fort d’expériences qu’il juge favorables… à une exception près!
«Ça m’a pris deux mois environ pour intégrer cet important ministère d’un milliard de dollars qui comprend cinq divisions et 17 régions. Et deux autres mois pour y donner ma couleur. Assez vite, j’ai appris à connaître l’équipe qui m’appuie et qui est dirigée par Sébastien Bénédict, directeur de cabinet, à qui je parle plusieurs fois par jour», de raconter André Lamontagne lors d’un entretien exclusif avec L’Express avant son départ pour Québec.
Sa nomination à la tête du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) n’est pas si étonnante, compte tenu que sa circonscription, celle de Johnson, qu’il représente depuis 2014, est en très grande partie agricole. Les agriculteurs donc, il les connaît. Ce qu’il connaissait moins toutefois, c’est à quel point la machine médiatique peut s’emballer quand les mots ne sont pas bien choisis, comme ce fut le cas dans l’affaire de Louis Robert, cet agronome congédié pour avoir transmis à Radio-Canada des documents confidentiels dénonçant l’ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides. Après avoir déclaré que c’était «ma décision» de l’avoir congédié, le politicien de la CAQ a essuyé un tir groupé de plusieurs organismes, demandant des explications, mais surtout d’adversaires politiques réclamant sa démission. Ce n’est pas arrivé. Son chef, François Legault, est resté inflexible et même des voix drummondvilloises se sont élevées pour se porter à sa défense.
«J’ai pris sur moi quelque chose qui ne m’appartenait pas. J’ai dit des mots que je n’aurais pas dû dire. Cela a pris beaucoup de place dans les médias, beaucoup plus que dans mon quotidien de ministre. C’est une question d’expérience aussi, j’étais pressé de questions dans un scrum, et le sujet était chargé. Dans mon passé d’homme d’affaire, avec mes employés, mes directeurs, ce genre de chose ça s’arrête à moi. Mais là, dans la fonction publique, c’est différent», admet-il avoir retenu.
Le bioalimentaire
Cela étant dit, le ministre a des bons coups à mettre en vitrine. L’application de la politique bioalimentaire du Québec a été l’un de ses gros dossiers, ne serait-ce que par l’ampleur des sujets concernés, soit la chaîne bioalimentaire (agriculture, pêches, transformation, distribution de gros, vente de détail, services alimentaires et restauration) ainsi que les municipalités et les milieux de la santé, de l‘environnement, de l’économie, de l’enseignement et de la recherche.
«D’abord initiée par le gouvernement précédent, il fallait surtout savoir faire vivre cette politique. Près de 400 personnes se sont réunies à Drummondville au mois de mai pour concrétiser un plan d’action que je devrais déposer dans les prochaines semaines. Ce sera notre feuille de route pour l’avenir», a-t-il mentionné.
Les compensations qu’obtiendront les producteurs laitiers, en lien avec les ententes Canada-Europe et Transpacifique, sont aussi un résultat accueilli positivement par André Lamontagne, qui estime que son équipe a joué un rôle politique important auprès du gouvernement fédéral.
Santé psychologique des agriculteurs
Par ailleurs, une aide psychologique aux agriculteurs sera bientôt annoncée. «C’est un sujet qui m’interpelle beaucoup, dans la mesure où le niveau de détresse de l’agriculteur est de loin supérieur à celui de la société générale. Il y a des moyens qui existent pour venir supporter les agriculteurs mais je me suis engagé personnellement à améliorer ce soutien-là. Ce sera une bonne nouvelle pour les agriculteurs», a-t-il dit, précisant que de l’argent sera investi dans cette initiative.
Dans la même veine, André Lamontagne promet d’apporter une attention particulière à l’agriculture qu’il qualifie d’émergente. «On voit plusieurs types de production, sur de petites terres, et c’est tout le talent des jeunes agriculteurs qui doit être favorisé. Ont-ils tous les moyens pour s’exprimer? Il y a place à amélioration».
Toujours au chapitre des efforts qui seront déployés par le MAPAQ au courant de la prochaine année, le ministre identifie le vaste chantier de la réforme de la taxation foncière agricole. «J’ai bon espoir de pouvoir proposé quelque chose cet automne. C’est un dossier qui implique les municipalités, le ministère des Finances, les agriculteurs, le MAPAQ, et on doit essayer d’équilibrer tout ça, avec l’objectif de se donner un système à long terme».
Santé : autonomie au Centre-du-Québec
La promesse des caquistes de redonner au Centre-du-Québec son autonomie en matière de services de santé n’aura été remplie qu’à moitié, pourrait-on dire, à en juger par ce qui est proposé dans le projet de loi qui sera déposé au cours de l’automne, notamment la désignation d’un président-directeur général adjoint responsable de la région centricoise ainsi que l’implantation d’un centre administratif à Drummondville.
«À ma première rencontre avec L’Express après mon élection, j’avais dit que c’était le premier dossier dont j’allais m’occuper. Il y a deux choses que j’ai faites, d’abord vérifier que tout le monde sur le territoire voulait ça ainsi que la faisabilité de tout ça… Je pense que la solution donnera des résultats intéressants. L’avenir va le dire. On va prendre acte, on verra ce qu’on fera. Un comité a été mis sur pied, incluant notamment le maire Alexandre Cusson, qui aura à vérifier le travail qui sera accompli. Chose certaine, le nouveau PDG du CIUSSS, Carol Filion, qui pilote ce dossier, fait bien les choses. J’ai un préjugé favorable. Un adjoint sera nommé après l’adoption du projet de loi et il aura son bureau au Centre d’hébergement Frederick-George-Heriot. C’est lui qui sera le patron pour la région Centre-du-Québec. Il devra se brancher sur la réalité de la région et peser sur les bons pitons pour résoudre les problèmes spécifiques de chez nous. La ministre McCann s’en est mêlée beaucoup et l’évolution sera suivie de près», a-t-il affirmé.