JUSTICE. Une jeune femme âgée de 20 ans a été acquittée du chef d’accusation de conduite avec les facultés affaiblies qui pesait contre elle, puisqu’elle a attendu plus de deux heures avant qu’un agent évaluateur de la Sûreté du Québec (SQ) se rende auprès d’elle, le 5 novembre 2017.
L’avocate de l’accusée, Me Isabelle Castonguay, a demandé l’exclusion des éléments de preuve recueillis après l’arrestation de la Drummondvilloise, arguant que l’évaluation de l’agent évaluateur n’a pas été réalisée dans un délai raisonnable.
Me Castonguay a plaidé que le délai s’expliquait par une organisation déficiente des forces de l’ordre.
L’agent évaluateur, qui était présent à Drummondville, venait de prendre sa retraite quelques mois avant l’événement, sans être remplacé. Celui qui avait été appelé en renfort de la MRC de Val-Saint-François n’avait pas l’équipement nécessaire pour effectuer l’évaluation. Il a dû faire un détour en partant de Richmond pour se rendre à son domicile situé à Sherbrooke, avant de prendre la direction de Drummondville.
Les faits
Le 5 novembre dernier, la Sûreté du Québec (SQ) a reçu un appel dénonçant la conduite erratique d’une automobiliste. Quelques minutes plus tard, peu avant 7 h 30, un policier a intercepté la jeune femme. Il a constaté qu’elle avait «les yeux vitreux, un regard vide, une bouche pâteuse et une démarche chancelante», a rappelé le juge Gilles Lafrenière de la Cour du Québec, lors de la lecture des faits, vendredi, au Palais de justice de Drummondville. Une odeur d’alcool émanait de l’habitacle et une caisse de bière était également présente dans le véhicule, avant que l’agent procède à l’arrestation de la conductrice pour conduite avec les facultés affaiblies par l’alcool.
Par la suite, les policiers n’ont détecté aucune odeur d’alcool provenant de la dame. Au poste de police, elle a soutenu qu’elle n’avait pas consommé de boissons alcoolisées dans les 15 derniers jours. Les policiers ont conclu que la conductrice avait les facultés affaiblies par la drogue. À 7 h 45, les policiers ont commencé la recherche d’un agent évaluateur. Celui-ci est arrivé à Drummondville deux heures plus tard.
«Ce délai est inacceptable, étant donné les circonstances, puisqu’il découle d’une organisation déficiente des ressources policières, a déclaré le juge Gilles Lafrenière. L’absence d’agent évaluateur dans la MRC de Drummond pendant plusieurs mois ne saurait excuser ce délai après l’arrestation, surtout qu’elle est survenue en milieu urbain […]. Plus de 100 000 personnes résident dans la MRC de Drummond. On est loin d’un milieu rural où les ressources sont parfois restreintes.»
Selon le magistrat, l’agent évaluateur de la MRC de Val-Saint-François a fait preuve de «laxisme», puisqu’il n’avait pas l’équipement nécessaire en sa possession au travail. Il a évoqué que le Tribunal ne pouvait cautionner cette façon de faire, qui ne doit pas être incluse dans la définition d’un délai raisonnable, sans risquer de miner la confiance de la population envers la justice.
Puisque la jeune femme âgée de 20 ans a seulement été libérée du poste de police, peu avant midi, soit plus de quatre heures après son arrestation, le juge a conclu que ses droits ont «sans aucun doute» été violés, en raison du contexte des événements.
Après avoir entendu la décision du magistrat d’accepter l’exclusion de la preuve, le procureur de la Couronne, Me Kevin Mailhiot, a faiblement laissé entendre que le ministère public n’avait pas d’autres preuves à déposer, ce qui a ensuite entraîné l’acquittement de la Drummondvilloise. Celle-ci n’a d’ailleurs pas en mesure de cacher son soulagement à sa sortie du palais de justice.
La SQ a remédié à la situation
Le sergent Daniel Thibodeau, porte-parole de la SQ, a assuré que le poste de Drummondville a remédié à la situation, lors d’une entrevue téléphonique, cet après-midi. Il a précisé «qu’au moins deux agents évaluateurs» étaient présents pour servir le territoire de la MRC de Drummond.
Le porte-parole de la SQ a également convenu que le «territoire est très bien servi», puisque d’autres agents évaluateurs des régions voisines peuvent rapidement venir épauler les policiers de la MRC de Drummond, si le besoin se fait sentir.
Rappelons qu’en octobre dernier, peu après la légalisation du cannabis au Canada, le président de l’Association des policières et des policiers du Québec (APPQ), Pierre Veilleux, avait insisté sur son souhait de voir l’arrivée rapide d’appareils de détection pour conduite avec les facultés affaiblies par la drogue. Il avait mentionné que les forces de l’ordre doivent parfois passer plusieurs heures pour s’occuper d’un seul cas.