PROCÈS. Félix Pagé a conclu la présentation de sa preuve aujourd’hui au Palais de justice en livrant un témoignage qui relatait sa version de l’histoire.
Avant de commencer son témoignage, l’accusé, pieds enchaînés, s’est déplacé à la barre des témoins.
«Premièrement, ce qui m’a amené à Drummondville c’est le décès de ma sœur Océane. J’ai voulu me rapprocher de mes proches, car ça faisait plusieurs années que j’étais loin. Le 1er mai 2016, je suis déménagé sur la rue Plamondon avec ma conjointe Audrey. Pour ce qui est de Roland, je l’ai connu vers la fin de l’été 2016. J’étais avec Audrey et ma voiture ne partait pas. Il m’a proposé son auto pour booster ma batterie. Je l’ai revu ensuite quelques jours plus tard. Je partais au dépanneur à pied souffler deux pneus pour ma voiture. Il m’a proposé son auto sans que je lui demande. Ce gars-là avait le cœur sur la main. Ensuite, notre relation a évolué. Roland était un ami, un confident, un bon voisin.
À partir de janvier 2016, la relation avec Audrey s’est détériorée. À un moment, elle est partie vivre chez une amie. Je ne l’ai pas vu pendant plusieurs mois. La fin de semaine du 22 mai, j’ai essayé par tous les moyens de trouver une voiture pour aller chercher Audrey à l’Épiphanie, car sa coloc l’avait mise dehors», a-t-il expliqué au jury.
Le 22 mai 2016
Selon le témoignage de l’accusé, Roland Baker est passé en début de soirée à son appartement afin de lui proposer un contrat de démolition dans sa maison. Selon le témoin, les détails du contrat sont «nébuleux». C’est à ce moment que M. Baker a prêté sa voiture à M. Pagé pour qu’il aille chercher son ex-copine.
Vers minuit et demi, le couple est revenu à l’appartement, soit au 48A rue Plamondon. «J’ai passé la soirée avec Audrey, on a fumé des joints et on a bu du rhum. Un peu plus tard, elle s’est endormie. J’avais pris une peanut, donc je ne dormais pas. Il était rendu tard le soir, ou tôt le matin quand j’ai décidé d’aller chez Roland pour commencer les travaux», a-t-il ajouté. Jusqu’à environ 7h le matin, l’accusé a travaillé à démolir les murs et le plafond dans la maison de son voisin.
Le lendemain, Félix Pagé a passé la journée à dormir et la nuit à rencontrer des enquêteurs de la Sûreté du Québec, car il était un témoin important dans le dossier de disparition de Roland Baker.
Le 24 mai au matin, une chicane a éclaté entre Félix Pagé et son ex-copine, Audrey Verreau.
«Elle a fait une crise d’hystérie, elle m’accusait d’être allé voir des filles dans la nuit. Elle a pris un harpon que j’avais fabriqué et elle est venue dans ma direction avec. En tentant de la désarmer, je me suis blessé sur le pectoral», a témoigné l’accusé.
Les policiers sont arrivés au domicile de M. Pagé et ils ont passé les menottes à Mme Verreau qui avait un mandat d’arrestation contre elle. L’appartement de l’accusé est, à ce moment, devenu une scène de crime dans l’histoire du meurtre de Roland Baker.
Félix Pagé a passé sa dernière journée de liberté au centre-ville avec des amis. En soirée, l’enquêteur Mario Langelier a procédé à l’arrestation de Félix Pagé, accusé du meurtre de Roland Baker et d’outrage au cadavre.
Quelle était la relation entre Félix Pagé et Roland Baker ?
Suite au témoignage de près de deux heures, la procureure de la Couronne, Me Magali Bernier, a débuté le contre-interrogatoire. Elle a questionné longuement M. Pagé sur sa relation avec la victime. «Est-ce exact de dire que vous laissiez M. Baker vous regarder et que vous lui souriez dans le but d’avoir des services de sa part ?», a questionné Mme Bernier en se référant à une déclaration faite par l’accusé le soir où il a rencontré les policiers. «C’est arrivé que Roland me prête son auto et m’ouvre la porte de son frigo», a répondu M. Pagé. La Couronne a tenté de soulever le fait que Félix Pagé ne laissait pas indifférent M. Baker, qui lui était homosexuel.
La procureure de la Couronne a ensuite insisté sur le contrat et les travaux de démolition. Cette dernière est revenue sur le fait que l’accusé n’avait pas eu de confirmation claire de procéder à des travaux de démolition. Roland Baker aurait plutôt demandé une soumission.
«Est-ce habituel pour vous d’aller faire des travaux très tôt le matin comme ça ?», a lancé Me Bernier. L’accusé a répondu par la négative.
«Saviez-vous à ce moment-là si Roland était chez lui ? Vous ne trouviez pas ça étrange que les lumières et la télévision soient allumées ?», a-t-elle ajouté d’aplomb.
La Couronne a également tenté de comprendre pourquoi les démolitions ont été faites sans l’accord de Roland Baker et pourquoi le travail semble avoir été fait de façon si arbitraire.
Finalement, Me Magali Bernier a attaqué la crédibilité de son témoin en relevant son passé judiciaire : plusieurs condamnations pour voies de fait, voies de fait armées, voies de fait causant des lésions et non-respect de conditions.
Le juge Alexandre Boucher a annoncé au jury en fin d’après-midi la conclusion de la présentation de la preuve. Les plaidoiries des deux parties commenceront jeudi au Palais de justice de Drummondville.