COMMENTAIRE – La remise au Centre-du-Québec de son autonomie pour la gestion des services de santé ne se fera pas ou ne se fera qu’à moitié, si la pression n’est pas mieux exercée sur les élus caquistes qui en ont pris l’engagement en campagne électorale.
La promesse de Sébastien Schneeberger, appuyée par son collègue de Johnson André Lamontagne, était claire, à savoir que «la région doit être autonome en santé, c’est-à-dire qu’elle doit s’administrer elle-même», a-t-il affirmé le 31 août dernier.
Trois jours plus tard, François Legault en avait rajouté lors de son passage au Village québécois d’antan en déclarant : «Il faut séparer le Centre-du-Québec de la Mauricie, tant au niveau économique qu’en santé. Il faut un Investissement Québec juste pour la région ainsi qu’un CIUSSS. C’est une promesse que nous avons faite aux députés de la région».
Il ne serait pas inutile de se rappeler aux bons souvenirs de celui qui est aujourd’hui premier ministre du Québec, à la tête d’un gouvernement majoritaire, qui comprend quatre députés de son parti élus au Centre-du-Québec.
Comme l’a dévoilé L’Express la semaine dernière, les quatre députés caquistes centricois, élus en octobre dernier (Sébastien Schneeberger dans Drummond-Bois-Francs, Donald Martel dans Nicolet-Bécancour, Éric Lefebvre dans Arthabaska, et le ministre André Lamontagne dans Johnson) ont rencontré avant la période des Fêtes les dirigeants du CIUSSS, incluant le grand patron Martin Beaumont. Ces derniers ont promis aux élus de déposer une proposition le 14 janvier, qui, peut-on s’y attendre, ne sera pas rendue publique, pas tout de suite en tout cas. Les fonctionnaires et les politiciens auront à analyser ça sous toutes les coutures avant d’aboutir à une décision finale, qui sera sans doute prise par la ministre de la Santé Danielle McCann, cautionnée évidemment par le PM. Mais quand?
Pour le moment, pour autant qu’on puisse voir, la pression n’est pas forte pour obtenir cette reconnaissance du Centre-du-Québec comme une région socio-sanitaire, un exercice qui, comme le soulignait dans nos pages Pierre Levasseur, ex-directeur général de l’Hôpital Sainte-Croix, exigera un courage politique. Au sein même de l’équipe de la CAQ, on peut deviner que l’idée ne fait pas l’unanimité, les électeurs de Donald Martel, dans Nicolet-Bécancour, ne sont pas entichés par un CISSS au Centre-du-Québec.
Considérons aussi que Martin Beaumont n’est pas un grand défenseur de la chose, sachant qu’il a déjà clamé que l’opération sera dispendieuse et que «si un CISSS devait s’implanter à Drummondville, cela ne changerait rien au problème majeur qui est celui de la pénurie de personnel, ça ne donnera pas plus de main-d’œuvre».
Selon le ministre Lamontagne, «la première chose est de confirmer l’adhésion du milieu. Après ça, il s’agira de trouver les meilleures avenues possibles pour atterrir là où on veut atterrir». S’il est vraiment nécessaire de confirmer l’adhésion du milieu, on pourra s’en remettre au rapport du Comité de pilotage sur le développement du secteur tertiaire à Drummondville, datant de septembre 2018. Les 15 membres de ce comité, incluant de nombreuses personnalités dont Alexandre Cusson, Daniel McMahon, recteur de l’UQTR, Vincent Bourassa, directeur régional pour le Ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, Martin Dupont, de la SDED, et Guy Drouin, de la MRC de Drummond, avaient formulé des recommandations dont celle-ci : développer les activités et les services spécialisés dans le secteur de la santé, incluant les activités d’enseignement et de recherche, mais également les services administratifs.
N’empêche que si on ne veut pas que cette histoire se perde dans les méandres des compromis politiques à moitié satisfaisants, il faudra bien que le milieu le fasse savoir et rapidement. N’oublions pas que la CAQ forme un gouvernement élu par les régions et celle du Centre-du-Québec n’a pas à être la dernière à se faire entendre.