COMMUNAUTÉ. Pour certains toxicomanes, le passage au Pavillon de l’Assuétude à Saint-Guillaume est le début d’un «long combat» pour revenir sur le droit chemin, explique le directeur général, Alexandre Ratté.
Le Pavillon de L’Assuétude reçoit près de 200 personnes annuellement à la thérapie de 13 semaines. Ces derniers y participent à différents moments de l’année, en formant des groupes d’une quarantaine d’individus. Certains décident délibérément de se prendre en main, d’autres viennent sous contraintes correctionnelles ou sur recommandation de leur avocat.
«Ce qu’on offre, ce n’est pas une fin en soi, laisse entendre Alexandre Ratté. On est une étape dans le cheminement de la vie des gens. On ne sauve pas la vie de personne. On n’utilise pas le mot “guérir”. La plupart des personnes qui viennent n’en sont pas à leurs premières démarches et n’en seront probablement pas à leur dernière. Il y a 50% des gens qui complètent la thérapie de trois mois».
Les participants se livrent à différents types d’ateliers pour les faire cheminer sur le plan social. L’objectif est de promouvoir de saines habitudes de vie pour que le passage du toxicomane au Pavillon de l’Assuétude soit marquant pour ce dernier. Le directeur général de l’établissement appuie son raisonnement sur les études qui stipulent que la majorité des gens souffrant d’une dépendance aux drogues a besoin de «quatre à cinq traitements pendant neuf ans pour s’en sortir. La rechute fait partie du processus».
«On ne punit pas et on ne juge, car la rechute fait partie du processus, signale celui qui gère également le Pavillon de l’Assuétude de Shawinigan. C’est gratifiant de voir des gens qui s’en sortent et qui ont évolué dans la vie. Cependant, ce n’est pas la majorité. Il faut trouver notre fierté ailleurs. On la trouve dans l’évolution quotidienne des gens. Ce n’est pas parce qu’une personne abandonne après trois semaines qu’il ne s’est pas produit quelque chose de marquant dans sa vie. On s’efforce de faire en sorte que le passage d’une personne soit significatif.»
Alexandre Ratté se réjouit aussi de voir les 23 employés de l’établissement persévérer dans des conditions difficiles et de «garder la foi en l’humain», malgré tout.
Plus difficile qu’autrefois
L’homme à la tête de l’organisme communautaire à but non lucratif, un regroupement financé partiellement par le ministère de la Santé et par le ministère de l’Emploi et de la Solidarité, estime que les défis sont encore plus nombreux qu’autrefois pour son équipe.
«C’est difficile d’être à jour au niveau de l’intervention, admet-il. Ça change vite et tout le monde manque de ressources pour offrir les services. On a de la misère à fournir à la demande. La pénurie de main-d’œuvre est l’élément qui m’inquiète le plus et elle a déjà commencé à nous affecter. Avec les moyens qu’on a, c’est difficile de compétitionner avec des établissements publics qui sont en mesure d’offrir de meilleures conditions de travail que nous.»
À long terme, Alexandre Ratté souhaiterait disposer de plus de ressources pour offrir de meilleures conditions.
«Le financement des services, c’est le nerf de la guerre. On essaie de faire évoluer les mentalités des décideurs pour qu’ils comprennent que des investissements dans des ressources comme la nôtre sont des investissements qu’ils n’ont pas à faire pour d’autres ressources plus dispendieuses», conclut le directeur général.
La CAQ se trompe au sujet du cannabis, selon Alexandre Ratté
Au sujet de la légalisation du cannabis, Alexandre Ratté martèle que la Coalition avenir Québec (CAQ) fait fausse route en repoussant l’âge légal à 21 ans pour en consommer. À ses yeux, même si la consommation de drogues n’est pas souhaitable pour un jeune, la prohibition n’est pas la solution; elle entraîne un jeune vers le marché noir.
«La prohibition ne fonctionne pas, insiste-t-il. Elle n’empêche pas un jeune d’accéder à substance. Consommer, ce n’est pas une bonne idée. La prohibition ne permet pas la sensibilisation et la prévention auprès des jeunes. Je ne vois pas beaucoup d’investissements pour la prévention présentement. Les jeunes consomment plus de cannabis que de tabac, on pourrait quasiment faire une règle de trois et dire que le cannabis est maintenant plus banalisé que le tabac.»
À lire aussi : De toxicomane à directeur général