JUSTICE. L’arrêt Jordan, qui impose des limites de temps aux procédures judiciaires, a provoqué l’arrêt des procédures judiciaires d’un présumé agresseur sexuel, vendredi, au Palais de justice de Drummondville.
Le juge Gilles Lafrenière a décidé de mettre fin aux procédures judiciaires, dans le dossier de Denis Yergeau qui demeure à Magog.
Le magistrat s’est appuyé sur la décision de la Cour Suprême du Canada rendue en 2008 qui limite la durée raisonnable des procédures judiciaires à un maximum de 18 à 30 mois, et ce, depuis juillet 2016. Le juge a noté que la poursuite est responsable des délais de plus de 78 mois, soit 2358 jours dans le dossier de Denis Yergeau.
Ce dernier, âgé de 72 ans, était accusé de quatre infractions à caractère sexuel sur une victime de moins de 16 ans. Les gestes reprochés se seraient produits entre le 17 mars 2006 et le 17 mars 2009. Les accusations ont été déposées le 23 juin 2008. L’accusé a ensuite été arrêté pour une première fois le 4 juillet 2008 à son domicile qui était à Drummondville.
Après avoir entrepris une thérapie en décembre 2009, son avocat a reporté le dossier, le temps que Denis Yergeau la termine. Or, le principal intéressé a quitté la thérapie sans en aviser son avocat. Il a également omis d’aviser les autorités de son changement d’adresse.
Les procédures
Le 20 mars 2009, un mandat d’arrestation est déposé contre Denis Yergeau, sans qu’il en soit informé. En juillet 2010, il fait finalement son changement d’adresse à Magog. Par la suite, pendant deux ans et demi, aucune démarche n’a été faite par les autorités pour le retrouver.
Une policière qui était responsable de ce dossier avait fait savoir au Tribunal que les policiers n’étaient pas toujours informés lorsqu’un accusé ne se présentait pas devant le juge et qu’il y avait un mandat d’arrestation envers ce dernier. Cette policière responsable du dossier n’avait pas été en mesure de le mener à terme, puisqu’elle a quitté le travail pendant un an et demi, en raison d’un cancer. Aucun suivi n’avait été fait par les autorités. Le Tribunal a convenu que de simples démarches judiciaires auraient permis de le retracer.
Le Tribunal a reconnu que l’accusé était responsable des délais pendant 460 jours, suivant le mandat d’arrestation, du 20 mars 2009 au 30 juin 2010. En soustrayant les délais pour la défense, le juge conclut que la poursuite est responsable d’un délai de plus de 78 mois.
Le juge a rappelé que la durée raisonnable d’un procès est importante pour s’assurer la confiance de la population envers le système judiciaire. Il a également souligné qu’un accusé est innocent jusqu’à preuve du contraire et que celui-ci a droit à un procès équitable.
Une bonne nouvelle, estime l’avocat de la défense
Me. Marc-André Beaulieu qui représentait l’accusé se réjouit de la décision du juge Gilles Lafrenière.
«À Drummondville, à ma connaissance, il n’y a pas eu d’autre arrêt Jordan, mentionne-t-il. On n’a pas de problème de délais habituellement ici. Ce que cette décision vient dire aux Tribunaux, c’est qu’il faut que les dossiers avancent rapidement. C’est important pour la société. C’est sûr qu’une personne en attente d’un dossier comme celui-là va en souffrir psychologiquement. Je suis d’accord avec le juge, quand ça s’éternise comme ça, autant l’accusé que les plaignants ne peuvent pas passer à autre chose».