DRUMMONDVILLE. Le coroner Yvon Garneau est appelé à côtoyer la mort dans ce qu’elle a de plus atroce. Malgré les scènes difficiles auxquelles il est confronté, il n’a qu’une préoccupation : protéger la vie humaine coûte que coûte.
Coroner depuis 2005, l’ancien avocat et journaliste né à Black Lake a côtoyé le «monde» de la mort dès son enfance. Il faut savoir que la maison familiale abritait le salon funéraire de l’endroit.
«Dans le temps, ça s’appelait le Salon Savoie. Mon père était le propriétaire du salon et de la bâtisse. Il était assistant-directeur de funérailles. Ma mère faisait le ménage du salon. C’est elle qui vidait les cendriers et partait les ventilateurs quand il y avait trop de boucane. Moi restant dans le même immeuble, on parle de quoi? On parle de mort, de deuil, de famille et de tragédie», se souvient celui qui a été en contact avec la fatalité tout au long sa carrière.
Yvon Garneau replonge dans ses souvenirs. «Enfant, j’aimais ça. J’aimais les flashs, les sirènes et l’ambiance. J’aimais surtout l’empathie. Je vois encore mon père qui, devant des gens endeuillés, énervés, en crise même, réussissait toujours à les calmer. Il trouvait toujours les bons mots. Je l’admirais profondément», se rappelle-t-il avec tendresse.
Ce contexte particulier relié à son enfance lui permet, d’une certaine façon, de s’initier, d’apprendre sur la mort et de ne pas la craindre.
«Je n’ai pas peur de la mort. C’est justement une question posée aux candidats pour devenir coroner. Il n’est pas donné à tout le monde de ne pas en avoir peur. On l’apprivoise, on vit avec», observe le coroner. Il n’est cependant pas fasciné par la mort. «Je ne souhaite pas le décès de personne. Mon mandat de coroner, c’est de protéger la vie humaine. C’est tout le contraire de la mort», insiste-t-il.
Bien que la vue d’un cadavre de l’effraie pas, son travail d’enquêteur qui vise à déterminer qui est décédé, à quel endroit, à quel moment, de quelles causes et dans quelles circonstances peut être perturbant.
«Policiers, médecins ou coroners, à la base, on est des humains. C’est toujours un drame une mort. Dans les causes d’enfants, c’est encore plus terrible», confie celui qui a été particulièrement marqué par l’affaire Sonia Blanchette.
«Je me suis rendu rapidement sur le lieu des meurtres des trois enfants. Ça m’a viré à l’envers. Ça, tu y penses longtemps. Pour t’en sortir, il faut que tu en parles à des gens qui savent t’aider pour te faire un peu oublier ça», confie Yvon Garneau.
Il se rappelle également avec émotion de l’accident automobile du 10 octobre 2010 qui a causé la mort à quatre jeunes Drummondvillois. À cette occasion, il a rencontré des familles qui étaient profondément en crise.
«Tu ouvres des dossiers. Tu vas voir rapidement les mères et les pères des quatre jeunes. Tu tentes de les réconforter. Faut que tu leur expliques l’enquête», relate celui qui met la communication au cœur de son approche.
Remaniant à sa façon ce que Félix Leclerc a si bien exprimé («C’est grand la mort, c’est plein de vie dedans»), Yvon Garneau conclut en disant avec émotions : «De protéger des vies, c’est ça qui me stimule quand je fais des enquêtes sur des décès et que j’émets des recommandations. Il y a de la vie dans la mort dans le sens qu’il y a parfois des gens qui ne décèdent pas pour rien».