L’idée d’installer un antidémarreur sur tous les véhicules est de retour (MISE À JOUR)

Photo de Jean-Pierre Boisvert
Par Jean-Pierre Boisvert
L’idée d’installer un antidémarreur sur tous les véhicules est de retour (MISE À JOUR)
Le coroner Yvon Garneau (Photo : Archives Ghyslain Bergeron)

Après le coroner Yvon Garneau en 2011, voilà que l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) se range derrière son idée d’imposer l’antidémarreur éthylométrique sur les tous les véhicules automobiles.

Dans un article paru sur son site web le 14 mai dernier, intitulé «Antidémarreur éthylométrique et conduite avec les facultés affaiblies : efficacité des programmes et recommandations pour en maximiser l’impact», l’INSPQ a dévoilé un avis scientifique qui recommande que tous les véhicules soient munis d’un antidémarreur éthylométrique.

L’INSPQ rappelle que la conduite avec les facultés affaiblies par l’alcool est la première cause de décès sur les routes du Québec et que le pourcentage de conducteurs décédés avec une alcoolémie supérieure à la limite permise stagne autour de 30 % depuis le début des années 2000.

«Éventuellement, l’antidémarreur éthylométrique devrait devenir un équipement standard sur tous les véhicules automobiles. À cet effet, des projets pilotes pourraient être réalisés au sein de flottes de véhicules publics et commerciaux», soumet le document d’une cinquantaine de pages.

L’une des recommandations du coroner Yvon Garneau, inscrites dans son rapport sur la tragédie routière qui avait coûté la vie à quatre jeunes Drummondvillois sur le boulevard Mercure en octobre 2010, avait fait grand bruit à l’époque en raison de son audace. Elle se lisait comme suit : examiner l’opportunité de rendre obligatoire sur tous les véhicules neufs vendus au Canada un système de sécurité empêchant le démarrage si le conducteur a consommé de l’alcool.

En juillet 2011, dans une lettre adressée à la coroner en chef Louise Nolet, dont L’Express avait obtenu copie, Gérard McDonald, sous-ministre adjoint à Transports Canada, s’était penché sur cette recommandation. Il était alors impossible, selon lui, «d’envisager un tel règlement à l’heure actuelle étant donnée que la technologie n’est pas assez élaborée. On craint que si la technologie est adoptée avant qu’elle ne soit fiable, le succès de la politique et des changements législatifs nécessaires à la politique du programme pourrait être limité de façon importante par toute réaction négative provenant du public».

Depuis ce temps, la science a progressé et deux technologies au moins ont été étudiées aux États-Unis pour détecter le taux d’alcool du conducteur : soit par l’haleine, soit par le toucher.

Un coroner satisfait

Yvon Garneau se réjouit bien sûr de cet avis scientifique de l’INSPQ rédigé par des experts, qui lui donne raison finalement. «C’était audacieux à l’époque. On me reprochait de vouloir tout règlementer. Mais, au bout du compte, un gadget de plus ou de moins, ce n’est pas si terrible que ça, surtout que ça ne prendrait que quelques secondes à utiliser. Un peu comme ce fut le cas pour la ceinture de sécurité. On s’est habitué. À ceux qui me faisaient des reproches, je répondais : c’est pour vous autres que je fais ça. Bien sûr, l’application n’est pas pour demain, mais, au moins, je n’aurai pas prêché dans le désert. Je suis content que mon idée fasse du chemin», a-t-il confié au journal L’Express.

Éventuellement, le coût d’un véhicule pourrait être augmenté en raison de l’ajout d’un antidémarreur comme équipement standard, mais il pourrait être compensé par une baisse du prix des assurances, si l’on suit une certaine logique.

L’INSPQ fait une autre recommandation tout aussi spectaculaire : «afin de maximiser l’effet préventif de l’antidémarreur éthylométrique, ce dernier devrait être offert à un nombre plus important de contrevenants de l’alcool au volant. Plus précisément, l’antidémarreur éthylométrique devrait être offert de façon systématique dès une première infraction et devrait être imposé à vie aux récidivistes».

Voici les principaux résultats de la synthèse systématique menée afin d’estimer l’effet des programmes d’antidémarreur éthylométrique sur la conduite avec les facultés affaiblies et les collisions:

  • La participation à un programme d’antidémarreur éthylométrique réduit significativement le risque de récidive, tant chez les contrevenants primaires que chez les récidivistes.
  • Une fois que l’antidémarreur éthylométrique est retiré du véhicule, le risque de récidive revient à un niveau comparable à celui des participants du groupe témoin. Cet effet est indépendant des critères d’admission (ex. : avoir purgé une partie de la période d’interdiction de conduire) ou autres mesures (ex. : traitements, suivis médicaux ou programmes éducatifs) ajoutés au programme.
  • En raison du nombre insuffisant d’études, il est impossible de conclure avec certitude quant à l’effet de l’antidémarreur éthylométrique sur le risque de collision.
  • Une seule évaluation a été menée sur une population de non-contrevenants. Il est donc impossible de conclure quant à l’effet de l’antidémarreur éthylométrique sur ce type de population.
Partager cet article