BASKETBALL EN FAUTEUIL ROULANT. Du haut de ses trois pieds et dix pouces, Élodie Tessier respire la joie de vivre. Pourtant, la vie n’a pas fait de cadeau à cette jeune femme de 21 ans originaire de Saint-Germain-de-Grantham.
Née avec une malformation squelettique, Élodie Tessier ne s’est jamais laissée freiner par l’adversité. Aujourd’hui membre en règle de l’équipe canadienne féminine senior de basketball en fauteuil roulant, elle se prépare activement en vue des Jeux paralympiques de Tokyo qui auront lieu en 2020.
C’est avec un sourire contagieux accroché aux lèvres qu’Élodie Tessier se présente dans les bureaux de L’Express. Sans son fauteuil roulant, elle insiste pour monter les escaliers menant au deuxième étage, même si on lui propose de l’accueillir au rez-de-chaussée. Le ton est donné pour l’entrevue qui va suivre.
«Je suis née comme ça : mes jambes sont beaucoup plus courtes que la moyenne. J’ai aussi une scoliose, ce qui affecte ma démarche et la rotation de mon bassin. Malgré tout, je suis fonctionnelle. Je suis capable de marcher, mais j’utilise mon fauteuil roulant sur de longues distances. Je suis surprenante! En principe, selon la science, je ne suis pas supposée marcher», raconte-t-elle sans détour.
Bien entourée par ses parents et sa sœur jumelle, qui ne souffre d’aucun handicap, Élodie Tessier a vécu une jeunesse heureuse malgré ces circonstances difficiles.
«J’ai tout le temps fait la même affaire que ma sœur. Par exemple, je fais du trampoline, de la motoneige et je patine sur une luge… Bref, je fais tout! Mes parents me disaient toujours : si ta sœur peut le faire, tu peux y arriver toi aussi. Des fois, je le faisais différemment, mais l’important, c’était de le faire», témoigne-t-elle.
C’est un peu par hasard qu’Élodie Tessier s’est ensuite intéressée au basketball adapté. «Une amie en fauteuil roulant qui fréquentait l’école Jean-Raimbault m’a proposée de venir essayer ça un vendredi soir. Au départ, je n’étais pas trop intéressée, mais finalement, je ne voulais plus sortir du gymnase! Mes parents ont bien vu que j’aimais vraiment ça. Après, je n’ai jamais arrêté de jouer.»
Après avoir fait ses classes avec les Vikings de Drummondville, une équipe récréative, Élodie Tessier s’est jointe aux Kamikazes de Saint-Hyacinthe, dans la catégorie AA. Elle a ensuite fait le saut avec les Gladiateurs de Laval, un club AAA dont elle fait d’ailleurs toujours partie. Parallèlement, elle a gravi les échelons au sein des équipes du Québec et du Canada, d’abord dans la catégorie junior, puis chez les seniors.
«Le basket m’apporte beaucoup de choses. Je suis plus en forme qu’avant. Ça me permet aussi de me fixer des buts, comme augmenter ma masse musculaire ou améliorer ma rotation. Comme entraînement secondaire, je fais aussi de la natation et du ramage. C’est assez exigeant, mais ça me permet de devenir meilleure au basket, qui demeure mon sport principal», explique celle qui étudie au Cégep à distance et qui envisage une carrière dans le domaine de la bureautique.
Les yeux sur Tokyo 2020
Dernièrement, Élodie Tessier s’est établie à Toronto, où elle s’entraîne désormais quotidiennement avec les meilleures joueuses au pays. «Mon but, c’est vraiment Tokyo 2020, mais d’ici là, je me concentre sur le championnat du monde qui aura lieu cet été à Hambourg, en Allemagne. Notre équipe s’entraîne très fort pour cette compétition. On veut défendre notre titre gagné il y a quatre ans à Toronto. Puis l’an prochain, on se concentrera sur les Jeux panaméricains, au Pérou.»
Après les Jeux de Rio de Janeiro en 2016, où les Canadiennes ont terminé en sixième position, plusieurs joueuses de l’équipe nationale ont pris leur retraite. Plusieurs recrues ont donc percé la formation, qui est maintenant dirigée par le Québécois Marc-Antoine Ducharme. «Il y a une belle chimie dans notre groupe. On n’est pas très grandes, mais on est très rapides. On n’a qu’un seul but : gagner l’or aux Jeux de Tokyo. Tout le monde s’entraîne fort avec cet objectif en tête. On va être prêtes.»
Parmi les rares vétéranes de retour au sein de l’équipe canadienne, la Québécoise Cindy Ouellet a pris Élodie Tessier sous son aile. L’athlète de 29 ans a déjà participé à trois Jeux paralympiques.
«J’apprends beaucoup de Cindy. Elle a une grande force de caractère et une volonté à toute épreuve. C’est la beauté de notre équipe. On est toutes très différentes, mais on apprend les unes des autres», a confié celle qui est l’une des six Québécoises membre de l’équipe.
Identifiée comme une athlète de catégorie 2,5 selon le système de classification des athlètes handicapés, Élodie Tessier se décrit comme une véritable joueuse d’équipe. Compétitive, elle carbure à la victoire.
«Comme il n’y a pas vraiment de position sur le terrain, on nous demande d’être des joueuses complètes. On est toutes capables de dribbler, passer le ballon et tirer au filet. Comme je suis assez rapide, mon coach me demande de monter la balle et de la passer. Ma plus grande force, c’est justement de déjouer un adversaire pour le mettre en dehors du jeu et provoquer un surnombre», explique celle qui a récemment changé son fauteuil.
«Il est complètement différent, plus adapté à ma situation. Depuis, je suis en pleine progression.»
Après avoir remporté la coupe des Amériques, l’an dernier, en Colombie, Élodie Tessier et les Canadiennes ont récemment participé à des tournois préparatoires en France et au Japon.
«Tokyo, c’était très dépaysant. On a pu voir comment on allait réagir à un décalage horaire de 20 heures. On a gagné tous nos matchs contre les Japonaises. On a aussi eu l’occasion de visiter les sites de compétition et le village des athlètes des Jeux de 2020. Tout est encore en construction. Par-dessus tout, ce voyage nous a donné un aperçu de ce qui nous attend dans deux ans. Ça nous motive encore plus.»