JUSTICE. Questionné à savoir où pouvais se trouver Stéphane Cormier, le principal suspect dans sa disparition a invité les policiers à envisager d’autres pistes. Prétendant ne pas l’avoir vu depuis plusieurs jours, Bryan Demers-Thibeault a émis diverses hypothèses au cours d’un long interrogatoire vidéo mené après son arrestation le 12 mai 2011.
«Je ne sais pas ce qui lui est arrivé. Une chose est sûre, avec son problème de drogue, Stéphane avait la mauvaise habitude de se mettre dans le trouble. À moins qu’il se soit fait de nouveaux amis récemment et qu’il soit parti avec eux. Ça peut aussi être son père qui le cache pour faire une passe d’assurance», a suggéré l’accusé à l’enquêteur principal en précisant que les scénarios potentiels sont multiples.
Confronté par son interlocuteur, Demers-Thibeault finira par admettre que Stéphane empruntait continuellement de l’argent à son père pour ses problèmes de consommation de drogue. De plus, Lucien Cormier n’aimait pas beaucoup les fréquentations de son fils, en particulier lui-même. Le père aurait donc pu dire n’importe quoi à la police à son sujet pour l’incriminer faussement.
Interrogé pendant plusieurs heures dans une petite salle du poste de Drummondville sous des accusations initiales d’enlèvement, séquestration et extorsion, le prévenu a parlé longuement et ricané nerveusement souvent, même s’il a répété avoir le droit de ne rien dire. En attendant son avocate, Demers-Thibeault accepte d’aider l’enquêteur principal, Luc Brillant, dans ses recherches parce que Stéphane Cormier avait peu d’amis et que ça lui faisait de la peine qu’on ne le retrouve pas.
«En même temps, enchaîne-t-il, je sais que les charges portées contre moi sont très sérieuses. Et puis, comme j’ai peut-être été la dernière personne à l’avoir vu, je dois faire attention à ce que je dis, parce que vous allez essayer de me prendre en défaut pour me faire porter le chapeau. D’ailleurs, je les connais vos hosties de techniques. Vous étirez le temps et vous me gardez pour rien en espérant me faire perdre patience.»
Avertissant à nouveau préférer se taire pour sa protection, le suspect poursuit l’entretien et s’ouvre sur son passé. «Natif de Sainte-Anne-des-Monts, je n’ai pas eu une belle vie jusqu’à date. J’ai passé dans plusieurs foyers d’accueil. Mais, je n’ai pas vraiment le goût d’en parler en détail, surtout que je ne vois pas ce que ça peut apporter à l’enquête. Je m’en suis sorti seul et, aujourd’hui, je suis adulte et je veux faire quelque chose de ma vie», relate l’individu de 23 ans à l’époque, avant d’encore menacer de se taire.
Problème récurrents
«Je viens juste de changer de bord et je veux développer mes talents pour prendre ma place dans la vie. Faut croire qu’on apprend en vieillissant. Le fait que je me retrouve encore au poste, c’est juste parce que je suis un christ de cave qui a fait des conneries», soutient l’accusé en déplorant être encore en train de parler de lui. Exigeant qu’on revienne à l’essentiel, l’enquêteur Brillant l’amène alors à parler du disparu.
Demers-Thibeault répondra d’un trait que «Stéphane était un gars à problème. Toujours gelé sur la cocaïne (prise par puffs de free base ou par injection), il empruntait à n’importe qui, ne payait pas et s’attirait du trouble. C’est pour ça que je n’ai pas voulu coopérer au début. Avec lui, je n’ai pas le goût d’être accusé pour rien.»
Questionné à savoir pourquoi il se tenait avec lui, il rétorquera avoir un peu pitié parce que c’était un bon gars quand il n’était pas défoncé. «Moi, la drogue, ça ne m’intéresse plus, surtout que j’ai perdu ma mère d’une overdose quand j’avais 15 ans. Je consomme un peu, mais je ne suis pas un dealer. Je suis plus le buzé de Drummond qu’autre chose et vous devez les connaître vos pushers», allègue Demers-Thibeault.
Trouvant l’interrogatoire vidéo long, il s’impatiente à nouveau, avant d’énoncer savoir des choses, mais ne pas pouvoir les dévoiler. «Je vais voir avec mon avocate. Je ne sais pas ce que je peux dire. Aussi, il faut que je me protège, parce que ce n’est pas vous autres qui allez le faire. C’est peut-être des gars dangereux et je ne tiens pas à mourir pour Stéphane. Surtout que ce n’est pas sûr qu’on le retrouve. Je pourrais même prendre les accusations contre moi pour sauver ma vie. Vous êtes conscients que ça peut arriver», lance le prévenu avant de poursuivre l’interrogatoire qu’il souhaite abréger.
Le procès pour le meurtre de Stéphane Cormier se poursuit cette semaine au palais de justice de Québec, devant un jury composé de 2 femmes et 10 hommes.